Le désengagement est un résultat
direct de leur ténacité et de leur faculté à résister, et
maintenant il ne reste qu’une issue à l’occupation, le recul.
Cependant, des dangers et des défis graves nous
attendent. Le Premier ministre israélien, Ariel Sharon, a appris
qu’il y a un prix à payer à l’oppression et
l’expropriation du peuple palestinien. Mais au lieu de
s’engager dans une paix négociée basée sur le droit
international, il s’est limité à des mesures tactiques unilatérales
pour détourner l’attention dans d’autres directions.
Ses tactiques ont dressé trois obstacles devant
le peuple palestinien.
Premièrement, la mauvaise gestion palestinienne
de la Bande de Gaza incite nos détracteurs à prétendre que les
Palestiniens sont incapables d’être autonomes.
Nous pouvons éviter ceci par la tenue d’élections
démocratiques justes au conseil législatif, aux municipales et
à toute institution, garantissant une compétition entre les
factions qui s’exprimerait seulement à travers les urnes, de façon
pacifique et pluraliste. Les pressions par la violence sur
l’opinion populaire, l’intimidation, le favoritisme et le
copinage doivent être écartés à tout prix.
Les rumeurs selon lesquelles les terres libérées
pourraient être monopolisées au profit de membres influents de
l’establishment politique palestinien peuvent facilement êtres
démenties si l’Autorité palestinienne respecte la loi, en
toute transparence, lors de l’attribution des terres. Les terres
sous propriété privée doivent être rendues à leurs propriétaires
légitimes, et les terres publiques doivent retourner dans le
domaine public pour être utilisées pour l’intérêt public.
Deuxièmement, beaucoup ont peur que le « désengagement »
d’Israël ne soit rien de plus qu’un redéploiement qui
rendrait impossible toute souveraineté palestinienne à Gaza. Si
Israël retire ses colons et ses soldats mais maintient son contrôle
sur tous les accès à Gaza, terrestres, maritimes et aériens, la
Bande restera une prison pauvre et isolée. Les Palestiniens
doivent insister pour un contrôle total du littoral et de la
frontière avec l’Egypte, sans ingérence ou surveillance israélienne.
Troisièmement, les tentatives de Sharon
d’utiliser le désengagement pour couper Gaza de la Cisjordanie
et geler le processus de paix indéfiniment posent le plus grand défi.
Tout retard donne à Sharon le temps de créer le
fait sur le terrain, compromettant les négociations pour un
accord final. Par la poursuite de la construction du Mur,
l’expansion des colonies et l’exclusion de Jérusalem-Est du
champ politique, Sharon est en train d’essayer d’imposer une résolution
finale unilatérale, ce qui serait inacceptable pour le peuple
palestinien et incompatible avec la loi internationale.
Les intentions de Sharon pour troquer Gaza contre
Jérusalem-Est et des secteurs très importants et primordiaux de
la Cisjordanie détruiraient le rêve d’un Etat palestinien
structuré et le réduirait en un nouveau cauchemar de cantons
appauvris, isolés, tels les bantoustans que le peuple noir d’Afrique
du Sud a rejetés sous l’apartheid.
Après le désengagement, Sharon va faire face à
une situation politique intérieure précaire. Ceux qui
recherchent la paix doivent immédiatement agir pour s’assurer
que le redéploiement de Gaza conduises à un retrait total de
toutes les colonies de Cisjordanie et de Jérusalem-Est. La loi
internationale établit sans équivoque que les colonies de Gaza
n’avaient aucune légitimité. Les colonies en Cisjordanie et à
Jérusalem-Est relèvent d’une même occupation agressive et illégale
et doivent de la même manière être démantelées et évacuées.
Pour devenir les acteurs de notre propre destinée,
nous, les Palestiniens devons suivre trois étapes. La première
est d’appeler à une conférence internationale pour la paix,
identique à celle de Madrid en 1991. Cela mettra fin au blocage
politique que Sharon est en train d’imposer. Des discussions décisives
s’ouvriront sur des questions comme les colonies de Jérusalem-Est,
les frontières définitives et les droits des réfugiés. Cela
permettra encore d’engager la communauté internationale dans
des négociations auxquelles Israël a longtemps fait obstacle.
Et, plus important, la loi internationale redeviendra la base sur
laquelle le conflit palestino-israélien doit être résolu.
La seconde étape est de se saisir de la décision
de la Cour internationale de justice déclarant le mur d’Israël
contraire à la loi internationale auprès des Nations-Unies, et
d’exiger son application par des moyens non-violents, telles des
sanctions, jusqu’à exécution par Israël.
Enfin, le combat non-violent contre le Mur et les
colonies doit se poursuivre en Palestine et dans le monde afin de
maintenir fortement la pression de la société civile et des
peuples contre la politique illégale d’Israël.
Aujourd’hui, nous, et tous ceux qui nous ont
soutenus dans notre combat pour la paix et la liberté, célébrons
le retrait des colonies illégales de Gaza. Mais nous devons
rester vigilants afin d’exploiter ce moment du processus et de
l’amener à sa conclusion logique : un Etat palestinien
souverain en Cisjordanie, Gaza et Jérusalem-Est.