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La fabrique

éditions       

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Notes sur l’occupation :
Naplouse, Kalkilyia, Hébron

Eric Hazan

96 pages ; 7 euros   ISBN : 2-913372-57-0    Parution le 26 oct. 2006

À l’approche du 40e anniversaire de l’occupation militaire de la Palestine, les informations sur la vie quotidienne et politique en Cisjordanie sont toujours aussi rares et parcellaires. Eric Hazan a choisi de passer un mois dans la région, en particulier pour tenter de comprendre pourquoi un peuple plutôt laïque a porté au pouvoir un parti religieux. Et aussi pour essayer de saisir l’état d’esprit actuel (confrontation Fatah/Hamas, espoirs en ce qu’on appelle « l’opinion internationale »). Les trois villes choisies se trouvent dans trois situations différentes : Naplouse, dans une vallée dominée au nord et au sud par des hauteurs occupées par l’armée israélienne, encadrée par les camps de Balata et d’Askar, soumise presque chaque jour à des incursions des jeeps et chars. Kalkilyia, petite ville complètement entourée par le mur, qui ne communique avec la Cisjordanie que par une porte gardée par l’armée. Hébron, où une colonie israélienne de 400 habitants, installée en plein centre et protégée par l’armée, parvient à rendre la vie impossible à toute une ville. Le livre se présentera sous la forme de notes discontinues (entretiens, scènes de rue, réflexions...). On trouvera en contrepoint quelques « informations » tirées de la presse parisienne de la même période.


Le sionisme du point de vue de ses victimes juives.
 Les juifs orientaux en Israël

 

Ella Shohat

96 pages ; 8 euros  ISBN : 2-913372-59-7  Parution le 26 oct. 2006

Ella Shohat est née et a grandi en Israël dans une famille de Juifs irakiens originaires de Bagdad qui avaient quitté leur pays dans les années 1950. « En tant qu’Arabe juive, écrit-elle, je suis souvent amenée à expliquer les “mystères” de cette entité antinomique. Expliquer que nous parlions l’arabe et pas le yiddish, que pendant des millénaires, notre culture, comme notre créativité profane ou religieuse s’est largement exprimée en arabe. » Elle est une figure emblématique des intellectuels et militants orientaux de la deuxième génération - celle née en Israël après l’immigration massive de Juifs du Maghreb et du Moyen-Orient dans les années 1950-1960 - qui développèrent à partir de la fin des années 1980 une critique radicale du sionisme et de la société israélienne façonnée par les ashkénases (Juifs d’Europe).

Dans les années 1950-1960, en réaction à l’hégémonie ashkénase, des mouvements de protestation et de résistance orientaux émergent en Israël. Le plus célèbre fut celui des Panthères noires d’Israël, composé essentiellement de jeunes maghrébins juifs issus des quartiers et des cités populaires de Jérusalem. D’abord réprimées par les autorités israéliennes, puis récupérées par des groupes d’extrême gauche ou le parti communiste, et finalement écartées de la société israélienne, les Panthères noire - malgré leur brève existence - demeurent une référence pour les jeunes orientaux.

Il faut attendre les années 1980 pour voir apparaître en même temps que le Shas (parti religieux des Juifs orientaux) une critique intellectuelle laïque chez les Orientaux. Le titre de l’article d’Ella Shohat, « Le sionisme vu par ses victimes juives », en résume la teneur. Écrit en 1986, il fut publié pour la première fois en ouverture du numéro spécial de Social Text consacré au débat colonial. Traduit ici pour la première fois en français, il est considéré comme un texte fondateur et reste une référence pour toute une génération d’intellectuels qui analysent le sionisme comme une idéologie européenne à caractère orientaliste et colonial, orchestrant l’acculturation, la sécularisation et la destruction des références identitaires des Arabes juifs. Les intellectuels de cette mouvance, tout en insistant sur le désastre social et culturel que fut la « sionisation » des Arabes juifs, pensent leur propre histoire en rapport avec les autres victimes du sionisme, les Palestiniens.

« Jusqu’à présent, le discours critique alternatif sur Israël et le sionisme s’est essentiellement concentré sur le conflit israélo-palestinien, considérant Israël comme un État constitué allié au bloc occidental contre le bloc oriental, et dont la fondation même reposait sur la négation de l’Orient et des droits légitimes du peuple palestinien. Je voudrais ici élargir le débat et dépasser ces anciennes dichotomies (Orient contre Occident, Arabes contre Juifs, Palestiniens contre Israéliens) pour aborder un aspect que toutes les formulations précédentes ont éludé : la présence d’une entité médiatrice, à savoir les Juifs orientaux, également appelés misrahim, originaires dans leur grande majorité de pays arabes et musulmans. Une analyse plus complète doit, comme je m’efforcerai de le montrer, prendre en compte les effets négatifs du sionisme pour le peuple palestinien, et pour les misrahim qui représentent aujourd’hui la majorité de la population juive en Israël. De fait, le sionisme prétend parler au nom de la Palestine et du peuple palestinien, lui confisquant du même coup toute capacité de représentation indépendante, et il se veut en outre le porte-parole des Juifs orientaux. Or, en niant l’Orient arabe, musulman et palestinien, le sionisme a nié les Juifs “misrahim” (littéralement, “ceux d’Orient”) qui, tout comme les Palestiniens, ont eux aussi été spoliés de leur droit à la représentation - à travers des mécanismes certes plus subtils et moins franchement barbares. La voix dominante d’Israël, dans le pays même et sur la scène internationale, a presque toujours été celle des Juifs européens, les ashkénazes, tandis que celle des misrahim a été largement étouffée, voire réduite au silence. »

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