ETATS-UNIS En campagne, le candidat démocrate a
exprimé des positions parfois floues ou changeantes
La diplomatie de M. Obama suscite de fortes attentes
Les
intentions américaines au Proche-Orient restent floues
Comme Israël, les dirigeants arabes
auraient sans doute préféré voir élire John McCain,
parce qu'il incarnait une certaine continuité
Si l'élection de Barack Obama ravive auprès des opinions
arabes, après les deux mandats d'un George Bush particulièrement décrié, la
fascination pour la démocratie américaine, qui garantit l'accession à la
Maison Blanche d'un jeune candidat noir en partie d'origine musulmane,
cette élection plonge les dirigeants arabes, qui appréhendent l'inconnu,
dans la perplexité, en particulier les monarchies pétrolières du Golfe. Le
candidat républicain, John McCain, avait ceci de rassurant qu'il
représentait à leurs yeux une certaine continuité de la politique régionale
de l'administration américaine à laquelle, après une période de tensions,
ils avaient fini par s'adapter, tout en déplorant ce qu'ils considéraient
comme ses lacunes et ses insuffisances.
Pour eux, les intentions du nouveau président concernant la
situation en Irak, le programme nucléaire iranien ou encore le conflit
israélo-arabe sont pour le moins floues. Ces dirigeants tiennent certes
l'administration sortante pour responsable du « chaos » qui prévaut en
Irak. Ils n'en sont pas moins convaincus de la nécessité absolue d'une
présence militaire américaine relativement durable dans ce pays, pour en
assurer la stabilité et empêcher qu'il ne vole en éclats ou ne tombe dans
l'orbite de son puissant voisin iranien. D'où leur inquiétude quant au
projet du président élu américain de retirer le plus rapidement possible
les forces américaines de ce pays.
Leur hostilité et leurs craintes quant à l'acquisition
éventuelle par l'Iran de l'arme nucléaire n'ont d'égal que leur refus d'une
intervention militaire contre ce pays pour y parvenir. A maintes reprises,
ils l'ont signifié au président George Bush et à ses collaborateurs, en
prônant une solution par la voie diplomatique. Ils craignent néanmoins que
la diplomatie vire au laxisme, en filigrane de la volonté prêtée à M. Obama
d'engager un « dialogue inconditionnel » avec Téhéran. Cette inquiétude est
partagée par les autorités israéliennes.
INCERTITUDES RENFORCÉES
Les incertitudes à propos du conflit israélo-palestinien
sont enfin renforcées par les prochaines élections anticipées israéliennes.
Il faudra attendre le 10 février 2009, puis la formation d'un nouveau
gouvernement, pour que Barack Obama puisse traiter avec de nouveaux
dirigeants israéliens. De plus, le mandat de Mahmoud Abbas, président de
l'Autorité palestinienne et chef du Fatah, vient théoriquement à échéance
le 9 janvier et, même s'il a l'intention de le prolonger d'un an, sa
légitimité sera contestée par les islamistes du Hamas qui ont pris le
pouvoir dans la bande de Gaza.
D'ici là, les frères ennemis palestiniens vont engager, à
partir du 10 novembre, au Caire, un dialogue qui pourrait durer plusieurs
semaines. Si un accord est finalement conclu et s'il débouche sur un
gouvernement d'union nationale, la donne sera changée. Reste à savoir si,
dans le même temps, le cessez-le-feu en vigueur depuis le 19 juin entre le
Hamas et l'armée israélienne à Gaza perdurera. Il a subi un sérieux accroc,
mercredi 5 novembre, à la suite de la découverte d'un tunnel creusé en
direction d'Israël pour, selon Tsahal, capturer des soldats. Six membres
des brigades Ezzedine Al-Qassam ont été tués et une cinquantaine de
roquettes et d'obus de mortiers ont été tirés en direction d'Israël sans
faire ni victime ni dégât.
Dans l'attente de la prise de fonctions de Barack Obama,
Condoleezza Rice, secrétaire d'Etat américaine, va entreprendre, jeudi 6
novembre, un ultime voyage dans la région pour tenter de faire avancer le
processus de paix, relancé le 27 novembre 2007 à Annapolis (Maryland) par
le président George Bush. Cette visite culminera lors d'un sommet avec le «
Quartet » (Etats-Unis, Union européenne, Russie, Nations unies), à Charm
El-Cheikh (Egypte), les 8 et 9 novembre.
Mme Rice souhaite coucher sur le papier les grands principes
de la négociation sur lesquels se sont accordés les deux camps sans
toutefois progresser véritablement dans l'ébauche d'un accord. Il s'agirait
en quelque sorte d'un remake des « paramètres » laissés par le président
Bill Clinton après l'échec de Camp David, en juillet 2000, qui, cette fois,
porterait le nom de George Bush. Les Palestiniens sont cependant très
réticents, échaudés par le peu de cas qui a été fait de tous les accords
signés auparavant.
Michel Bôle-Richard et Mouna Naïm
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