Un
homme d'affaires profite de la division des religieux pour conquérir la mairie
de Jérusalem
Nir Barkat, ancien
du Likoud et soutenu par la droite radicale, veut redynamiser la ville et
son économie tout en poursuivant sa judaïsation aux dépens des Palestiniens
Contrairement à ce que prédisait le candidat ultraorthodoxe
Meir Poroush, l'avenir de Jérusalem n'appartient pas définitivement aux religieux.
Après un intermède de cinq ans avec Ouri Loupolianski, c'est un laïc, Nir
Barkat, un homme d'affaires de 49 ans qui a remporté, mardi 11 novembre,
les élections municipales dans la Ville sainte avec un score sans appel (52
% contre 43 % à Meir Poroush et 3,6 % pour le milliardaire d'origine russe
Arcadi Gaydamak).
Le candidat ultra-orthodoxe, contesté parmi les siens, n'a
pas réussi à faire le plein des voix des religieux et le taux de
participation, relativement élevé pour une municipale (42 %), a fait la
différence. M. Gaydamak, qui tablait sur une participation plus importante
des Palestiniens, a essuyé un revers cuisant. Ces derniers, qui
représentent un tiers des 750 000 habitants, ont, encore une fois,
largement boudé les urnes répondant ainsi aux appels de boycottage afin de
protester contre l'occupation et la poursuite de la colonisation à
Jérusalem-Est.
Déjà victimes d'une véritable discrimination de la part des
services municipaux, les Palestiniens vont devoir subir la pression du
nouveau maire qui n'a pas caché qu'il avait l'intention de poursuivre la
colonisation dans le secteur oriental de la ville et de rattacher
l'implantation de Maale Adumim (35 000 habitants) à Jérusalem, coupant
ainsi en deux la Cisjordanie. « Je vois les choses en grand pour Jérusalem
», a-t-il déclaré à l'issue de sa victoire, reprenant les principaux thèmes
de sa campagne qu'il a appelée « sa vision ».
Nir Barkat veut tout d'abord stopper l'hémorragie de la
jeunesse qui quitte cette ville emprisonnée dans l'étau des religions. Il
souhaite développer l'économie qui y fait défaut pour procurer du travail à
l'une des populations les plus pauvres d'Israël. Il désire augmenter
considérablement les capacités touristiques de cet important lieu de cultes
en faisant venir chaque année dix millions de touristes contre deux
millions actuellement.
Pour ce faire, il a ainsi l'intention de multiplier par sept
la capacité hôtelière déjà nettement insuffisante. « C'est la mission de ma
vie », a-t-il dit, affirmant « qu'il avait tout laissé » pour se consacrer
à ce projet. Entre autres, il a parlé d'un tunnel creusé sous le mont Sion
pour que les juifs puissent accéder directement au mur des Lamentations, au
quartier juif et au quartier de Silwan, qu'il revendique bien que situé en
zone arabe. « Il faut construire une Jérusalem juive et l'étendre », a
indiqué ce partisan de l'indivisibilité de Jérusalem.
RÉUSSITE DANS LA HAUTE TECHNOLOGIE
Nir Barkat a quitté le parti Kadima pour protester contre la
possibilité évoquée par Ehoud Olmert, le premier ministre de transition, de
laisser des quartiers arabes aux Palestiniens. Affirmant être indépendant,
il a néanmoins fait alliance avec l'extrême droite d'Israël Beiteinou
(Israël ma maison, du russophone Avigdor Lieberman) et les religieux nationalistes
de l'Union nationale et du Parti national religieux (PNR), favorables à
l'extension des colonies.
Capitaine dans une unité parachutiste, cet homme de droite,
ancien du Likoud, a fait fortune en créant en 1988, avec trois partenaires,
le groupe BRM, spécialisé dans les logiciels de protection informatique. Il
a ensuite investi dans plusieurs start-up avant de lancer, à partir de
1999, divers projets à caractère social à Jérusalem. En 2003, il
démissionne de toutes ses fonctions pour se lancer à la conquête de la
mairie, en vain. Affirmant être proche de la tradition juive sans être
religieux, il a claironné sa victoire en soufflant dans un shofar, la
traditionnelle corne de bélier.
Michel Bôle-Richard
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