"Ce que l’humanité
doit aux Palestiniens"
Gilles Devers, avocat
http://palestine-diplo.blogspot.com/2009/01/ce-que-lhumanit-doit-aux-palestiniens.html
Publié
le 24 janvier 2009
Gilles Devers est l’avocat lyonnais qui a accepté de
porter mandat pour crimes de guerre contre les dirigeants israéliens devant la Cour Internationale
de Justice
Israël peut trembler. Trembler parce que, loin des
bombes, s’est enclenchée la justice qui le jugera. Israël pourra encore
gonfler les muscles de ses hélicoptères et de ses tanks. Mais un jour, dans 5
ans, dans 10 ans ou dans 30, on rendra hommage au peuple palestinien parce
qu’il a su, puisant dans les tréfonds de ce qui fait l’humanité, retrouver
l’idée même des droits de l’homme.
Pendant longtemps j’ai cru qu’Israël n’était pas un Etat comme
un autre. Je vois aujourd’hui, dans un déchirement douloureux, que pour les
dirigeants d’Israël, le crime de guerre est un choix politique.
L’Histoire reste là. Après l’Holocauste, comment la communauté internationale
pouvait-elle ne pas tout faire pour offrir au peuple rescapé du nazisme une
pérennité ? Décision incontestable, mais injustice fondamentale pour les
Palestiniens. « Les Palestiniens» ? Surtout celui-ci, celle-là à qui on a dit
: « Tu n’es plus chez toi. Tu n’es plus chez toi parce que l’ONU a décidé que
la terre de tes aïeuls n’était plus la tienne ». Et l’ONU a décidé ainsi
parce que la communauté internationale, lors de la conférence d’Evian de
1939, avait fermé la porte de l’humanité à la communauté juive, la
précipitant dans l’enfer nazi. L’Occident voulait compenser sa faute. Une
faute payée sur le dos des Palestiniens, auxquels pas le moindre reproche ne
peut être fait. Si, un seul : être là où il ne fallait pas.
Equation impossible ? Ce n’est plus le problème de 2009. Car soixante trois
ans ont passé. En 2009, rien ne justifie qu’Israël, puissance économique et
militaire, utilise la force armée pour construire son avenir. Israël peut
continuer ses guerres. Israël peut continuer d’interdire aux partis arabes de
se présenter aux élections. Israël peut faire tout ce qu’il veut avec la
puissance qui est la sienne, mais Israël tombera devant la loi, qui est plus
forte que lui. Car, devant l’intelligence du monde, c’est le juste qui est le
plus fort.
Qu’on ne se trompe pas. Il y a eu d’autres guerres, et il y en aura d’autres,
avec leurs horreurs. Mais l’agression d’Israël sur Gaza de décembre 2008
marque un basculement dans l’Histoire.
Qu’est-ce-que Gaza ? Gaza est une partie d’un territoire auquel la communauté
internationale, par lâcheté, n’a jamais su imposer la qualité d’Etat. Une
population isolée dans un territoire de 10 km sur 30, affaiblie par le
blocus, sans possibilité de fuir. Désormais, quand Israël veut gagner une
guerre, il attaque des civils… Fin d’un système. N’oubliez jamais le premier
jour : 200 morts. Morts pourquoi ? Parce qu’ils se promenaient dans la rue,
parce qu’ils allaient faire les courses, parce qu’ils étaient des enfants qui
rentraient de l’école.
Et quel est le gouvernement qui a enclenché la guerre le 27 décembre 2008 ?
Un premier ministre démissionnaire depuis septembre 2008 pour corruption et
les deux principaux ministres – affaires étrangères et défense – en une
opposition politique telle qu’ils n’ont pas réussi à constituer une
coalition. C’est un pouvoir sans tête qui s’est engagé dans la guerre. Le
matin, on décide des bombardements de civils ; le soir, on tient meeting. Du
jamais vu ! Les bilans sont là. Monsieur Ban Ki Moon a dénoncé la
disproportion dans l’attaque et il demande aujourd’hui qu’une enquête
approfondie ait lieu pour qu’Israël rende compte. Toutes les grandes
organisations intergouvernementales et les ONG dénoncent ces crimes de
guerre.
Pendant longtemps, lorsque j’entendais le mot d’Israël, je voyais en image
de fond les camps de concentration et d’extermination. Le crime commis dans
le berceau de la culture. Aujourd’hui je vois toujours les camps, mais Israël
est ailleurs.
L’avenir appartient aux hommes qui savent construire la paix. Or, aujourd’hui
la paix s’appelle le respect du droit. Qu’est-ce qui aujourd’hui fonde les
droits de l’homme ? L’analyse de 1945 en réponse aux crimes nazis, qui est au
cœur de l’actualité. Les bases du droit humain ont leurs racines dans la
criminalité nazie. Tout part de là. De la Déclaration des Droits de l’Homme
de 1948 à la Convention Européenne des Droits de l’Homme en passant par les
multiples systèmes nationaux, le droit de la civilisation a posé pour base
qu’aucun homme ne peut être atteint pour le seul motif qu’il est l’homme
qu’il ne faut pas.
Israël peut trembler. Trembler parce que, loin des bombes, s’est
enclenchée la justice qui le jugera. Israël pourra encore gonfler les muscles
de ses hélicoptères et de ses tanks. Mais un jour, dans 5 ans, dans 10 ans ou
dans 30, on rendra hommage au peuple palestinien parce qu’il a su, puisant
dans les tréfonds de ce qui fait l’humanité, retrouver l’idée même des droits
de l’homme.
Parce que j’existe, sans que quiconque soit en mesure d’apporter la moindre
appréciation sur la qualité de ma vie, j’ai droit à l’ensemble de ce qui fait
la dimension humaine et qui s’appelle la liberté. Parce que je suis né ici,
entre Rafah et Gaza, ou que je suis né ailleurs et que le canon des tanks m’a
assigné à résidence ici, quand la terre n’est plus la mienne et que l’eau
m’est volée, je reste. Regarde mes yeux, Israël, c’est un être humain qui te
regarde. Ecoute ce que je te dis, Israël, car sans le langage nous périssons.
Sors de la prison de ta violence, et viens goûter la force de la liberté.
Depuis soixante ans, tu cherches, par la force, à m’enfermer dans une prison.
Les murs brisent ma vie, mais c’est toi qui es devenu le prisonnier.
Prisonnier des certitudes qui t’interdisent de voir le monde. La vraie
liberté s’invente à Gaza, quand tu as tout détruit. Cette mère éplorée, qui a
perdu sa famille et sa maison, assise sur les gravats en implorant Dieu, dit
tout de la force humaine alors que tes misérables tanks signent la fin d’une
folle épopée.
La sagesse arabe nous dit qu’il n’y a pas de malheur absolu. A Gaza, des
êtres humains ont été tués parce qu’ils étaient palestiniens. Accusés et
condamnés parce que Palestiniens. Qui peut aujourd’hui imaginer que le crime
paie ? Qui peut imaginer qu’Israël emmènera au paradis les enfants qu’il a
tués à Gaza ? C’est la justice humaine qui rétablira l’ordre, et rétablira
les Palestiniens dans l’histoire.
Interview de Gilles Devers concernant la plainte
qu’il dépose au nom de plus de 320 associations devant la CPI
(Interview réalisée
par Chris den Hond - information Capjpo-EuroPalestine).
Source : Basta !
ECOUTER
également l’interview de Gilles Devers concernant la plainte qu’il dépose au
nom de plus de 320 associations devant la CPI (Interview réalisée par Chris
den Hond : http://www.dailymotion.com/video/x8121k_plainte-contre-israel_news
CAPJPO- Euro Palestine http://www.europalestine.com/spip.php?article3704
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