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Article paru le 3 mars 2009
http://www.humanite.fr/2009-03-03_Tribune-libre_Heritieres-de-la-Shoah-aux-cotes-des-Palestiniens tribune
libre Héritières de la
Shoah aux côtés des Palestiniens par Henriette Zoughebi,
conseillère régionale d’Île-de-France, Profondément
choquées que le CRIF ait décidé d’exclure de son dîner annuel le PCF, nous
éprouvons le besoin de nous exprimer en tant que militantes communistes de
culture juive. Nous nous sommes senties très concernées par la tragédie de
Gaza, nous avons participé aux manifestations pour l’arrêt des massacres. L’amalgame
entre terroristes, antisémites et manifestants pour les droits humains est
inadmissible. Nous en avons assez que soient qualifiés d’ennemis d’Israël
ceux et celles qui sont solidaires du peuple palestinien et qui s’opposent à
la politique belliciste de l’État d’Israël. Nous avons donc une vraie
divergence avec le CRIF. Pourtant
le CRIF est né pendant l’Occupation allemande et ses objectifs étaient
« la défense du judaïsme, des juifs et des droits de l’homme ».
Fidèles à cette histoire et à ces engagements, nous nous indignons des crimes
de guerre commis par l’armée israélienne faisant plus d’un millier de morts
civils, utilisant des armes chimiques, bafouant le droit international et les
résolutions de l’ONU, quand le CRIF ne fait que « déplorer les victimes
civiles ». Les droits humains sont par définition universels, il ne
saurait y avoir deux poids deux mesures. Loin des procès d’intention, la paix
ne peut naître que du débat rationnel et d’un dialogue ouvert. Nous
avons été profondément marquées par ce qu’ont subi pendant la Seconde Guerre
mondiale nos parents auxquels on a volé leur jeunesse. Une grande partie de
leur famille a été exterminée. Comme beaucoup d’enfants juifs de
l’après-guerre, notre enfance a été hantée par le fantôme de la guerre,
l’inimaginable absolu de la Shoah. Il a fallu apprivoiser la peur de
l’horreur pour tenter de comprendre, être à la hauteur de la chance de nos
parents survivants. Nous
ne sommes pas croyantes en Dieu, mais nous sommes juives et nous l’avons
toujours revendiqué. Le yiddish est notre langue maternelle, celle des
premiers mots d’amour, celle des berceuses. Le yiddish a pour nous la voix de
notre mère, cette langue est notre racine, la seule terre qui nous relie à
l’histoire de nos ancêtres. Notre judaïté est un bien culturel précieux
assumé à travers la célébration des fêtes pour se souvenir et transmettre. C’est
la raison pour laquelle nous sommes particulièrement sensibles à la
persécution dont est victime le peuple palestinien. Il est révoltant que le
gouvernement d’Israël prétende mener sa politique de colonisation au nom de
ce que les juifs ont enduré. Certains juifs justifient aujourd’hui les
exactions de l’armée israélienne et du gouvernement d’Israël contre le peuple
palestinien par les souffrances subies pendant la guerre. Les Palestiniens ne
sont pas responsables de la Shoah. Seuls la reconnaissance, le respect
réciproque dans la dignité pour les deux peuples peuvent permettre de trouver
une solution négociée. Les
chiffres publiés récemment concernant les actes antisémites commis en France
nous inquiètent beaucoup. Ils indiquent une forte augmentation dans les deux
derniers mois. Nous pensons nécessaire de faire la clarté. Il faut dire aux
Français de toutes origines et de toutes confessions que le conflit
israélo-palestinien n’est pas un conflit religieux entre juifs et musulmans,
mais qu’il s’agit d’un problème politique. La solution est connue depuis
1947 : celle du droit à l’existence de deux États pour deux peuples.
L’usage de la force conduit au désastre pour les Palestiniens mais aussi pour
les Israéliens. La condition de la paix est le respect du droit international
et des résolutions de l’ONU. Sur cette base, le dialogue, avec les jeunes des
quartiers populaires en particulier, peut faire reculer les tentations
d’antisémitisme et de racisme. Mais
cela ne suffit pas. Au moment où les négationnistes se manifestent
ouvertement par des prises de position d’intégristes catholiques d’extrême
droite, la lutte contre l’antisémitisme nécessite que les forces politiques,
syndicales et associatives s’engagent résolument pour faire connaître
l’histoire, aider à comprendre les causes et les responsabilités. La raison
doit retrouver toute sa place, même s’il s’agit d’une raison sensible. Ce
combat est de toute actualité. |