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http://www.humanite.fr/Une-si-silencieuse-guerre 20 avril
2009 Une si silencieuse guerre Retour
de Palestine, devenue véritable bantoustan. Par Patrick Le Hyaric, Directeur de l’Humanité. Imaginez : des militaires
haineux pénètrent chez vous par la force. Ils vous expulsent. Puis détruisent
votre maison. Ils s’emparent de votre terre. Imaginez, chaque jour, votre
ville, votre quartier réduit de plus en plus à la portion congrue par un État
étranger qui annexe. Et installe dans ce qui hier était encore la maison de
vos voisins, le quartier de vos amis, ses colons. Partout dans le pays,
l’inique processus de colonisation s’accroît ainsi sans limite et dans
l’illégalité la plus totale. Jusqu’à vous cerner, vous emprisonner dans ce
qu’il faut bien appeler un bantoustan. Imaginez : chaque matin, pour
vous rendre à votre travail, chaque soir pour en revenir. Quand vos enfants
vont à l’école, et quand ils en reviennent. Dans votre propre pays, une
frontière à franchir. Le cliquetis glacial d’un tourniquet. Vos vêtements,
vos affaires passées aux rayons X des détecteurs de métaux ou d’explosifs.
Votre pays et pourtant, un laissez-passer à présenter. Et puis les insultes
et les quolibets proférés par les jeunes soldats d’une armée d’occupation. Imaginez que l’État qui occupe,
qui annexe votre terre, construise de larges routes modernes à travers votre
pays, au service exclusif des colons qui peuplent les villes construites pour
eux, quand vous devez vous contenter de chemins goudronnés ou en terre, où le
croisement du moindre véhicule est dangereux. Imaginez que dans votre pays,
votre ville, votre jardin, au milieu de votre maison, l’État occupant
construise un mur de séparation : séparation avec les habitants de cet
autre État, mais aussi avec votre famille. Imaginez : vous vous mariez
avec une personne habitant Lyon, Marseille, Tulle ou Lorient. Mais comme vous
résidez en Seine-Saint-Denis, on vous interdit de vivre avec votre amour et
vos enfants. Non, je n’exagère pas ! Non, ce n’est pas un cauchemar. Car
ceux dont je parle ici le vivent au quotidien. Nous l’avons hélas vérifié,
avec effroi, à nouveau la semaine dernière, avec une délégation d’une
centaine d’élus et d’acteurs sociaux, citoyens et culturels d’opinion
diverses. Où ? En Palestine. Oui.
Par-delà nos opinions religieuses, politiques et philosophiques, discutons
raisonnablement, sans haine, et constatons ce fait : une autre guerre,
silencieuse est menée contre le peuple palestinien. Une guerre qui consiste à
coloniser, à annexer des terres, à mener à Jérusalem ce qu’on ne peut
qualifier que d’épuration ethnique. Jérusalem, cette si belle ville, historique,
culturelle, carrefour des religions, à l’intérieur de laquelle sont détruites
les maisons des Palestiniens selon une géographie minutieuse qui consiste à
couper Jérusalem-Est en deux, à bien scinder la ville grâce à la construction
désormais bien avancée d’un tramway. Et à installer et développer à la
périphérie des colonies équivalentes à une ville moyenne de France qui
enserrent Jérusalem, défigurée par ce mur hideux qui la traverse de part en
part désormais. Tout cela se fait chaque jour dans
un silence aussi assourdissant qu’inquiétant, pour que le peuple palestinien
n’existe plus. Tout est fait pour liquider l’idée même d’un État national
palestinien. Pourtant toutes les règles internationales interdisent de
toucher à Jérusalem. Le gouvernement israélien n’en tient aucun compte et
personne n’y trouve rien à redire. Révoltant ! Quelle conscience humaine, quelle
humanité peut continuer à accepter cela ? Ne nous y trompons pas !
Vivre ensemble, dans le même monde, faire humanité ensemble, implique de
relancer le processus de paix et de faire cesser cette colonisation, cette
annexion, cette militarisation de l’espace palestinien, cette politique qui
ne peut porter d’autre nom que celui d’apartheid. Le monde entier, ses dirigeants
doivent bien comprendre que laisser les mains libres au gouvernement
israélien ne fait que renforcer les extrémismes, et donc la guerre. Le
Conseil de sécurité de l’ONU doit se saisir d’urgence du scandale de
l’occupation et de la destruction des maisons et du mur de séparation, comme
de l’enjeu de la souveraineté alimentaire et de l’accès à l’eau des
Palestiniens. On ne peut laisser seul le peuple
palestinien grillagé, emmuré, colonisé, occupé, contrôlé par des miradors, à
la merci des meutes de militaires et de policiers israéliens. On ne peut le
laisser ainsi humilié, étouffé, réduit au silence, sans réagir ! C’est
de la mobilisation internationale aux États-Unis, en Europe et ailleurs, de
tous les peuples, de tous les humanistes que dépend maintenant la solution.
L’Union européenne dispose d’un moyen de pression : suspendre
immédiatement l’accord d’association avec l’État d’Israël tant que ses
dirigeants ne reviennent pas à la table des négociations. Quelles que soient nos opinions,
nos préférences philosophiques on doit, tous ensemble, réclamer la simple
application des résolutions de l’ONU. C’est la voie de la justice, de la
sécurité, du droit, de la paix pour tout le monde. Le gouvernement israélien
doit répondre de ses crimes à Gaza, cesser le blocus, la colonisation, ces
affreux check-points et la destruction des maisons. Il doit abattre le mur,
appliquer la résolution des Nations unies pour le droit au retour des
réfugiés et restituer les biens volés aux familles palestiniennes. Il doit
libérer les 11 000 prisonniers politiques palestiniens, à commencer par
Marwan Barghouti. Et le président de la République française doit agir avec
fermeté pour sortir le jeune Franco-Palestinien, Salah Hamouri, des geôles
israéliennes où il croupit depuis 1 500 jours. Une solution juste et durable
pour le peuple palestinien et israélien, c’est le retour aux frontières de
1967 avec Jérusalem-Est comme capitale, comme l’exige le droit international.
Il y a urgence ! Il faut que le monde se bouge ! L’impunité ça
suffit ! C’est le cri que nous ont lancé les populations palestiniennes,
ses élus, les partis politiques, les responsables des camps de réfugiés. Nous
le relayerons jusqu’à ce que justice soit enfin faite ! Rien n’est
jamais irréversible. Les peuples unis ont toujours fait gagner la démocratie,
la liberté, la paix, la souveraineté des peuples contre la barbarie. |