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Nakba et pique-nique un texte d'Amaya Galili http://brahim-senouci.over-blog.com/article-30815150.html
Voici un texte d'Amaya Galili, une
activiste israélienne appartenant à un groupe nommé Zochrot Mercredi
29 avril 2009 “Où seras-tu pour le
vacances ? Vas-tu en ville assister aux célébrations ? A un
pique-nique à la forêt de Carmel ? C’est vraiment beau là-bas ! Tu
ne veux pas venir ? Tout le monde y va. Quelques années
auparavant, j’aurais accepté de me joindre au groupe; un pique-nique à la
campagne – Quel mal à ça ? Mais quelque chose a changé. Les gens autour
de moi font la fête, mais pas moi. Une fois, à l’un de ces
pique-niques, j’ai traversé les ruines d’une vieille bâtisse surmontée d’un
dôme bleu. J’ai découvert que cette bâtisse appartenait au village d’Aïn
Ghazal. Les soldats israéliens en ont expulsé les habitants le 26 juillet
1948. Israël les a empêché d’y revenir et a planté la Forêt de Carmel parmi
les ruines des bâtisses qu’il a détruites. Il était difficile de voir ces
ruines, mais une fois que ce fut fait, je ne pouvais plus les ignorer – les
ruines des villages dans lesquels des gens ont vécu jusqu’en 1948. La Nakba (qui signifie
"grande catastrophe" en arabe) a commencé en 1948, quand les
sionistes ont commencé à expulser la majeure partie des habitants
palestiniens, à détruire leurs maisons et à faire disparaître la riche
culture palestinienne. La Nakba continue aujourd’hui avec la destruction d’édifices
palestiniens, de mosquées, de cimetières, d’expropriation de terres au bénéfice
d’Israéliens juifs, de discrimination institutionnalisée, de refus
d’autoriser les réfugiés palestiniens de revenir chez eux, d’occupation
militaire de la Cisjordanie et de Gaza, de tueries systématiques à Gaza, région
dont la majorité des résidents sont des réfugiés, etc. Nous ne voulons pas
voir ni entendre cela, encore moins le Jour de l’Indépendance. Quand j’ai parlé à des
gens de la Nakba, quand j’appris davantage sur ce sujet, j’ai commence à me
poser des questions et à me sentir tracassée. Une fracture s’est opérée dans
ce que je savais et dans mon identité. Cette fracture m’a amenée à continuer
de me questionner. Ce processus me permet de repenser à ma vie sur cette
terre. La Nakba n’est pas seulement la mémoire et l’histoire des
Palestiniens. C’est aussi un événement qui fait partie de ma mémoire
individuelle et collective et de mon identité d’Israélienne. La mémoire collective
israélienne insiste sur l’histoire juive-nationale du pays et dénie
majoritairement son passé palestinien. Nous, en tant que société et en tant
qu’individus, refusons d’accepter la responsabilité de l’injustice perpétrée
envers les Palestiniens, ce qui nous permet de continuer à vivre ici. Mais
qui a décidé que c’était la seule manière de vivre ici ? La société que
nous sommes en train de créer est saturée de violence et de racisme. Est-ce
la société dans laquelle nous voulons vivre? Qu’y a-t-il de bon à refuser
d’assumer sa responsabilité ? Qu’est-ce que cela nous empêche de faire ? Apprendre la Nakba me
donne en retour une place centrale de mon être, celle qui a été effacée de
mon identité israélienne, de mon environnement, de mon éducation israélienne,
de ma mémoire. Apprendre la Nakba me permet de vivre ici les yeux ouverts, et
développer une autre manière d’envisager à l’avenir les relations dans le
pays, un avenir de reconnaissance mutuelle entre tous ceux qui ont un lien
avec ce lieu. Accepter la
responsabilité pour la Nakba et ses conséquences m’oblige à poser des
questions difficiles sur l’établissement de la société israélienne, en
particulier sur la manière dont nous vivons aujourd’hui. Je veux accepter la responsabilité,
corriger la réalité, la changer. Il ne faut plus dire: “Nous n’avons pas le
choix. C’est ainsi que nous avons pu survivre pendant 61 ans et c’est ainsi
que nous continuerons à survivre.” Il ne me suffit pas de
"survivre". Je veux vivre dans une société qui connaît son passé,
et qui l’utilise pour construire un avenir qui inclut tous les habitants du
pays et tous les réfugiés. Reconnaître et
appliquer le droit au retour sont les conditions nécessaires pour l’avènement
de ce futur. Le retour ne signifie pas plus d’injustice et l’expulsion des
Juifs du pays. Comme cela s’est produit ailleurs dans le monde, des moyens
peuvent être trouvés pour que le retour des réfugiés dans le pays se fasse
sans en expulser les résidents actuels. C’est ce qui devrait se passer ici et
c’est possible. Appliquer le droit au retour nous permettra, à nous, Juifs
d’Israël, d’en finir avec le rôle tragique d’occupants. La vie ne doit pas être
un jeu à somme nulle. Il y d’autres alternatives. Palestiniens et Juifs
peuvent construire ensemble une société juste et égalitaire. Les gens vivront
sainement, sans être perpétuellement anxieux et sans avoir peur de la guerre. Et alors? Alors, nous
aurons vraiment de bonnes vacances. Amaya Galil Zochrot |