|
|
|
Article paru dans l'édition de dimanche 6 et lundi 7 septembre 2009 -
page 6 Israël voudrait relancer la colonisation en Cisjordanie avant
d'accepter un gel temporaire des constructions En langage diplomatique, lorsque l'administration américaine dit "regretter" une initiative de l'un de ses alliés, cela équivaut à une condamnation. Cette réaction de la Maison Blanche, vendredi 4 septembre, faisait suite à des informations de l'entourage du premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, selon lesquelles, avant d'accepter un gel partiel de la colonisation dans les territoires palestiniens occupés, Israël entend donner un coup d'accélérateur aux constructions. Aucune annonce officielle
n'a été faite, mais ce projet, qui a fait l'objet d'indiscrétions calculées
dans la presse israélienne, et dont George Mitchell,
l'émissaire américain pour le Proche-Orient, avait été informé, a suscité une
large condamnation, à la fois de Washington et de plusieurs capitales
européennes, ainsi que de l'Autorité palestinienne, dont le président Mahmoud Abbas
a été reçu, vendredi, à l'Elysée par Nicolas Sarkozy. M. Nétanyahou devrait ainsi
approuver prochainement de nouveaux projets de construction en Cisjordanie,
avant d'accepter un gel de plusieurs mois. Le président Barack Obama et
l'Autorité palestinienne considèrent que l'arrêt des constructions constitue
un préalable à une relance des négociations dans le cadre du processus de
paix. "La poursuite de la
construction dans les colonies n'est pas conforme à l'engagement d'Israël. Les Etats-Unis
ne reconnaissent pas la légitimité d'une expansion continue des colonies, et
nous demandons que cela cesse", a souligné la Maison Blanche, en
précisant que ce type de mesure "rendait plus difficile"
l'instauration d'un climat propice aux négociations. Faire monter les enchères En France, le porte-parole
du Quai d'Orsay
a indiqué que Paris "condamnait" les intentions
israéliennes, "totalement contraires à la dynamique du processus de
paix", et Javier Solana,
le représentant de l'Union européenne (UE) chargé de la politique étrangère,
a rappelé que, pour l'UE, "toutes les activités de colonisation
devaient s'arrêter". De son côté, Mahmoud Abbas
a estimé que les projets israéliens ne sont "pas acceptables".
Ce concert de protestations ne signifie pas que les projets du gouvernement
Nétanyahou - s'ils se confirment - vont remettre en cause la timide dynamique
du processus de paix qui paraît s'engager. A ce stade, Américains, Israéliens
et Palestiniens sont encore dans un jeu de rôles, chacun faisant monter les
enchères, sachant qu'il devra faire tôt ou tard des concessions. Les intentions israéliennes
traduisent cependant une réalité politique : pour préserver la stabilité de
sa coalition gouvernementale, M. Nétanyahou doit lâcher du lest. L'aile
droite de son parti, le Likoud, ainsi que les partis d'extrême droite et
religieux, ont fixé des lignes rouges : un gel complet de la colonisation
juive en "Judée-Samarie" (Cisjordanie) est inacceptable. M. Nétanyahou en a tenu
compte, et a dit aux Américains que celui-ci ne concernerait en aucun cas
Jérusalem-Est, pas plus que les 2 500 logements en Cisjordanie dont la
construction a été approuvée par le ministère de la défense, et les bâtiments
publics. Enfin, Yescha (le conseil qui représente les colons) a rappelé qu'un
accord avec Washington ne porterait pas sur les projets privés. M. Nétanyahou n'est pas
forcément mécontent de cette intransigeance, qui lui permet de faire valoir à
l'administration américaine qu'elle ne peut trop exiger de lui, sauf à
vouloir provoquer une crise politique en Israël. Or c'est la dernière chose
que pourrait souhaiter M. Obama, qui joue une partie de son crédit sur une
relance du processus de paix israélo-palestinien. Laurent Zecchini |