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jeudi 30/07/2009 Triste
jeu de go en Palestine.
Est-il absurde de désirer l'impossible ? Tel est un des
sujets de philosophie qui a été traité le 18 juin par les candidats au
baccalauréat. À Hébron, en Palestine, le mot « absurdité » a pris une
résonance particulière à mes oreilles : comment un lieu saint pour trois
religions qui enseignent la paix, le tombeau d'Abraham, peut-il être le lieu
d'affrontements si haineux ? Au fil de cette semaine passée en Israël et Palestine, à
travers des moments forts, j'ai approfondi ma connaissance de ce conflit,
certainement plus politique et territorial que religieux. Ce fut d'abord la visite du site du village rasé
d'Imwas-Emmaüs, celui de l'Évangile, aujourd'hui un parc de détente et «
archéologique ». Ce village a été détruit en 1967 et ses habitants expulsés
sans ménagement vers La discussion en soirée avec un membre de l'autorité
palestinienne, qui me fait partager ses attentes ; les contraintes d'un
véritable État palestinien qui essaye d'exister entre les pressions sans
ménagement de l'État israélien, les déchirements internes à la société
palestinienne, et les bailleurs de fonds internationaux, cantonnés de fait à
l'humanitaire. Une matinée avec Michel Warschawski, Israélien, et
militant de longue date pour la paix. Il nous montre la logique des
implantations de colonies autour de Jérusalem : c'est celle du jeu de go où
l'on pose un pion d'un côté, un deuxième de l'autre et on les relie en
quelques années. La résultante, c'est la construction sans interruption
depuis 1967 d'un espace à trois dimensions où, grâce à des ponts, des
tunnels, des murs, les Israéliens et les Palestiniens se rencontrent de moins
en moins ; il ne faut pas oublier bien sûr la quatrième dimension, celle du
temps : les frontières bougent en fait chaque jour. L'église de Le passage à pied du check-point au retour vers Jérusalem
: un sentiment de honte devant ce véritable apartheid ; je croise des
dizaines de Palestiniens qui rentrent chez eux après une journée de travail. Ils
doivent patienter, passer un contrôle humiliant, et puis sortir en empruntant
un long couloir grillagé, et enfin courir pour attraper un taxi collectif qui
les ramènera chez eux, bien tard. Plusieurs milliers font cela tous les
jours, matin et soir. La visite dans un petit village, Azzun-Atma, au nord de
Ramallah. Ce village est de fait encerclé par deux colonies qui grignotent
jour après jour les champs de leurs habitants. Pour y rentrer et en sortir,
nous devons passer un check-point. Un groupe de soldats y monte la garde.
Qu'ils sont jeunes ! Je réponds à leurs questions en expliquant que je vais
voir des amis. L'un d'eux réagit par une moue insultante, comment puis-je
avoir des « amis » dans ce trou ? Effectivement, si ce sont vraiment des
amis, lui n'aurait aucune raison d'être là. En réalité, en disant cela, je le
condamne au néant ou à la révolte, choix difficile, en particulier lorsqu'on
a 20 ans ! Non, ils ne peuvent être des « amis ». Eh bien si ! Dans ce
village nous avons été reçus comme des rois et j'ai pu y prendre des raisons
d'espérer car j'y ai vu des hommes et des femmes debout qui travaillent, qui
ont des projets, qui vivent malgré tout. Et nous, quelles raisons leur
donnons-nous d'espérer ? Chrétiens et européens, il nous faut donc agir, en
interpellant nos leaders d'opinion pour qu'eux-mêmes puissent agir sur les
gouvernants d'Israël, et en n'étant pas indifférents à ce qui se passe
là-bas, visible par tous. J'ai croisé de nombreux Israéliens qui ne sont plus
d'accord pour vivre dans cette société-là. Aidons-les, aidons les
Palestiniens à vivre en paix dans deux États aux frontières durables. Oui,
vraiment, il n'est pas absurde de désirer ce qui paraît aujourd'hui
impossible. MALAFOSSE Antoine (1)
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