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Article paru dans l'édition du 4 Octobre 2009Le chef de l'Autorité
palestinienne accumule les revers
Benjamin Barthe, Agathe
Duparc, et Laurent Zecchini La réunion du Conseil des droits
de l'homme des Nations unies, qui s'est tenue vendredi 2 octobre à Genève, a
tourné à l'avantage d'Israël. S'exprimant au nom des pays arabes, musulmans
et africains, le représentant du Pakistan a demandé que le vote sur une
résolution reprenant l'essentiel des conclusions du rapport du juge Richard
Goldstone sur la guerre de Gaza (27 décembre 2008-17 janvier 2009) soit
reporté à la prochaine session du Conseil, en mars 2010. Cette décision a été
prise après que l'Autorité palestinienne a indiqué, jeudi, qu'elle renonçait
à soutenir le projet de résolution. Le même jour, le premier
ministre israélien, Benyamin
Nétanyahou, avait lancé un avertissement : "L'adoption du rapport
Goldstone porterait un coup fatal au processus de paix." Les Etats-Unis,
échaudés par le sommet tripartite peu fructueux de New York, le 22
septembre, n'ont voulu prendre aucun risque. L'administration américaine a
exercé d'intenses pressions sur l'Autorité palestinienne, ainsi que sur les
pays européens, pour que le vote sur un texte accusant Israël - mais
également le Hamas - de "crimes de guerre" et de "possibles
crimes contre l'humanité" n'ait pas lieu. Ainsi, quelques jours après
avoir de facto entériné le renoncement de Washington à exiger un gel intégral
de la colonisation israélienne en Cisjordanie, l'Autorité palestinienne a dû
une nouvelle fois s'incliner. Une reculade que son représentant à Genève, Ibrahim
Khreisheh, s'est efforcé de présenter comme une pause tactique : "Le
rapport est très technique. Nous voulons donner le temps à toutes les
délégations de l'étudier en profondeur. Nous espérons qu'à la prochaine
session, certains pays européens auront changé d'attitude." "CAPITULATION INTÉGRALE" Cette décision risque
cependant de choquer profondément la population des territoires occupés. "L'Autorité
palestinienne ne représente plus le peuple palestinien, affirme ainsi le
psychiatre Eyad
Sarraj, figure de la société civile de Gaza. C'est une capitulation
intégrale." Du côté du Hamas, ravi de prendre son rival de
Cisjordanie en flagrant délit de faiblesse, le ton est encore moins amène. "Abou Mazen (nom de guerre de M. Abbas)
a torpillé tous les efforts des organisations de défense des droits de
l'homme qui espéraient rendre justice aux habitants de Gaza. Quelle meilleure
preuve que l'Autorité palestinienne a en fait soutenu la guerre ?",
estime Fawzi
Barhoum, un porte-parole du mouvement. A Genève, l'embarras des Européens
était manifeste. Juliette de Rivero, la représentante de l'ONG Human Rights
Watch (HRW) s'est dit choquée du "silence et de l'absence de
position" de l'Union européenne (UE). Alors que la France et la
Grande-Bretagne n'ont fait aucun commentaire, la Suède, au nom de l'UE, s'est
contentée d'évoquer un "rapport sérieux", tout en se
demandant s'il n'aurait pas "un impact négatif sur les pourparlers de
paix en cours". L'adoption d'une résolution
aurait ouvert la voie à d'éventuelles poursuites d'officiers et de
représentants du gouvernement israélien devant la Cour pénale internationale
(CPI) à La Haye. Un vote du Conseil de sécurité de l'ONU pour saisir la CPI
était cependant nécessaire. La position américaine le rendait peu probable. Les Israéliens ont
néanmoins insisté sur le fait que le précédent ainsi créé pourrait
s'appliquer à toutes les armées engagées dans un conflit. Jeudi, M.
Nétanyahou a reporté la création d'une commission d'enquête indépendante sur
la guerre de Gaza prônée par le rapport Goldstone. Le gouvernement israélien
a décidé d'attendre la conclusion des vingt-trois enquêtes criminelles qui
ont été ouvertes à la suite de la guerre de Gaza. Le rapport du juge
Goldstone paraît aujourd'hui avoir été mis sous le boisseau, ce qui n'épuise
pas pour autant le débat sur les "crimes de guerre" à Gaza. Le
gouvernement israélien va intensifier ses efforts pour inciter davantage de
pays à se rallier à la position américaine : le rapport Goldstone, avait
indiqué le département d'Etat, "se focalise de manière écrasante sur
les actions d'Israël". |