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Article paru dans l'édition du 18-19 Octobre 2009- page 5Les Palestiniens veulent
porter le rapport Goldstone devant les Nations unies
Par Philipe Bolopion et
Laurent Zecchini L'Autorité palestinienne
entend placer l'ONU face à ses responsabilités. Elle est déjà parvenue à
convaincre le Conseil des droits de l'homme d'adopter, vendredi 16 octobre à
Genève, une résolution soutenant les conclusions du rapport du juge Richard
Goldstone, qui accuse Israël et le Hamas d'avoir commis des "crimes
de guerre" lors du conflit de Gaza (décembre 2008-janvier 2009). Les responsables
palestiniens oeuvrent désormais pour que le dossier soit examiné par
l'Assemblée générale des Nations unies, voire transmis au Conseil de
sécurité. Le document de Genève a été approuvé par 25 voix sur 47. Six pays
ont voté contre (notamment les Etats-Unis, l'Italie et les Pays-Bas), onze se
sont abstenus et cinq n'ont pas participé au vote, dont le Royaume-Uni et la
France. Dans un communiqué du Quai d'Orsay,
vendredi, Paris avait estimé "la mise aux voix de ce projet
prématurée" et que le texte "mêlait de manière inopportune
le rapport de la mission d'établissement des faits et des questions sans lien
direct avec le mandat du Conseil des droits de l'homme", détournant
ainsi l'action du Conseil "de l'objectif qu'il s'était initialement
assigné". Outre les conclusions du
juge Goldstone, ce texte dénonce des violations des droits de l'homme à
Jérusalem-Est et accuse Israël d'entraver l'accès des musulmans à la mosquée
Al-Aqsa. Très critique pour l'Etat juif, cette résolution, initiée par les
Palestiniens, a été soutenue par les pays arabes, africains et non alignés.
"Le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon,
doit faire ce qui est attendu de lui et transmettre le dossier au Conseil de
sécurité", a expliqué au Monde le représentant de l'Autorité
palestinienne à l'ONU, Riyad Mansour. Il est probable que les
Etats-Unis, qui jugent le rapport Goldstone "déséquilibré"
au détriment d'Israël, utiliseront leur droit de veto pour bloquer son examen
par le Conseil de sécurité. Le représentant palestinien
travaille avec les pays arabes et non alignés à l'organisation d'un débat au
sein de l'Assemblée générale de l'ONU "avant le mois de
décembre". Une majorité des 192 pays de l'assemblée est acquise à la
cause palestinienne et, en l'absence de droit de veto au sein de cette
institution, le passage d'une résolution condamnant Israël ne devrait guère
poser problème. Le gouvernement de Benyamin
Nétanyahou s'est livré à un intense lobbying, avec le soutien de
Washington, pour éviter que les pays européens approuvent la résolution, pour
en diminuer la portée devant l'Assemblée générale de l'ONU. Rivalité interpalestinienne De ce point de vue, les
Israéliens s'estiment satisfaits, même s'ils dénoncent une résolution "injuste",
qui "ignore les attaques meurtrières perpétrées par le Hamas et
d'autres organisations terroristes contre des civils israéliens ".
Les Palestiniens se sont en revanche réjouis du vote du Conseil. Mahmoud
Abbas, président de l'Autorité palestinienne, a exprimé l'espoir que cette
décision "devienne un levier pour protéger les Palestiniens contre
Israël" et le Hamas s'est félicité de cette "victoire". Cette réaction, apparemment
identique, des organisations palestiniennes cache une rivalité qui n'a cessé
de croître. Début octobre, soucieux de ne pas s'aliéner le soutien des
Américains, le Fatah, qui contrôle l'Autorité palestinienne, avait renoncé à
soutenir la résolution devant le Conseil des droits de l'homme. Immédiatement
qualifié de "traître" par le Hamas, Mahmoud Abbas,
dont la décision avait été contestée au sein même du Fatah, avait fait
machine arrière et demandé une nouvelle réunion du Conseil de
Genève. Le vote de vendredi permet
au chef de l'Autorité palestinienne de retrouver un peu de crédit, même s'il
est peu probable qu'il suffise à restaurer l'unité palestinienne. Prenant
acte des "répercussions de la dispute" entre les deux
organisations à propos du rapport Goldstone, l'Egypte, qui mène depuis
plusieurs mois une médiation, a annoncé le report sine die de la signature de
l'accord de réconciliation interpalestinien, prévue le 26 octobre. |