Article paru dans l'édition du 12décembre
2009.
En Israël, Benyamin
Nétanyahou multiplie les annonces contradictoires sur la colonisation
Jérusalem
Correspondant
De la main droite,
j'impose un gel partiel de la colonisation ; de la main gauche, je prends des
mesures l'encourageant : telle est la politique faussement schizophrénique
menée par Benjamin Nétanyahou. Le jour même où des milliers de colons en
colère ont manifesté dans le centre de Jérusalem, le bureau du premier
ministre israélien a annoncé, mercredi 9 décembre, des mesures ayant pour
effet d'accorder le statut de "zones de priorité nationales" à des
colonies éparses en Cisjordanie, statut qui se concrétise par de nouvelles
aides économiques.
Le plus significatif
dans cette décision, qui devrait être approuvée dimanche par le gouvernement,
est qu'elle va pérenniser des colonies qui, en cas d'accord sur les
frontières d'un futur Etat palestinien, sont susceptibles d'être rétrocédées
à l'Autorité palestinienne.
Une telle décision
ne peut que renforcer les doutes sur la volonté de M. Nétanyahou d'aboutir à
un accord de paix, et la détermination de Mahmoud Abbas, président de
l'Autorité palestinienne, de ne pas revenir à la table de négociations.
Plus de 110 000
colons vont donc bénéficier d'aides dans les domaines de l'éducation, de
l'urbanisme et de l'emploi. Les localités et colonies concernées - notamment
Ariel, Itamar, Nokdim, Betar Illit, Elon Moreh, le quartier juif de Hébron,
Kiryat Arba, Emmanuel, ainsi que des colonies dans la vallée du Jourdain -
sont situées à l'est de la "Ligne verte", la ligne de démarcation
d'avant le conflit de 1967, et de la "barrière de sécurité" érigée
en Cisjordanie par Israël, du moins selon son tracé actuel.
Encourager
la dispersion
Il ne s'agit donc
pas d'implantations faisant partie des deux grands "blocs de
colonies" que sont le Goush Etzion et Maalé Adoumim, lesquels, bien
qu'également situés à l'est de la "Ligne verte", seront intégrés à
l'avenir - plus personne n'en doute -, dans les frontières de l'Etat
israélien. Le gouvernement de l'ancien premier ministre Ehoud Olmert s'était
refusé à prendre cette décision. Il avait expliqué que cela n'avait aucun
sens d'encourager des colons à s'installer dans des implantations qui seront
évacuées en cas d'accord de paix israélo-palestinien.
M. Nétanyahou a
adopté une position inverse : il s'agit "d'encourager la dispersion
de la population sur le territoire d'Israël et d'accroître sa présence à la
périphérie et dans des zones proches des frontières", a souligné le
bureau du premier ministre. Au total, le gouvernement va allouer 110 millions
de shekels (19,7 millions d'euros) à cette extension des "zones de
priorité nationales", qui devraient à terme concerner 1,9 million
d'habitants, soit 25 % de la population israélienne, dont 40 % d'Arabes
israéliens.
Yescha, le Conseil
des colons, s'est félicité de la décision de M. Nétanyahou, tout en prévenant
qu'elle n'atténuera en rien sa détermination à lutter contre le gel partiel
de la colonisation. Celui-ci semble d'ailleurs être de plus en plus partiel :
si l'on en croit le mouvement israélien La Paix maintenant, alors que le
gouvernement avait annoncé que le gel épargnerait 3 000 projets de logements
en Cisjordanie, le total serait en fait de 3 492 nouveaux logements exemptés.
La raison ?
Plusieurs mois avant l'annonce du gel, Yescha a encouragé les colonies à
jeter les fondations de centaines de nouvelles habitations. Or le gel ne
s'applique pas, dès lors que des fondations existent. Qui avait prévenu
Yescha ? "Nous avions anticipé", a expliqué benoîtement
Pinchas Wallerstein, directeur général du Conseil des colons...
Laurent Zecchini
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