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Article paru dans l'édition du 17 juillet
2009 – page 2 Le 15 juillet à Gaza
par Gilles
Paris
Le Centre culturel français
installé à Gaza a bien mérité de la patrie. Les trois couleurs qui y flottent
vaille que vaille tranchent avec l'océan vert des oriflammes du Hamas, qui
contrôle étroitement la bande de terre depuis deux ans. Les Palestiniens
peuvent trouver dans les locaux installés dans le quartier résidentiel de
Rimal, dans une improbable "rue Victor-Hugo", une petite fenêtre
sur ce monde extérieur dont ils sont privés, soumis qu'ils sont à un blocus
impitoyable d'Israël renforcé par la fermeture de la frontière avec l'Egypte.
Pas question d'en sortir ni
d'y entrer. Le Centre culturel n'a pas été visité par un artiste de passage
depuis des lustres. Dernière victime en date, le plasticien Ernest Pignon-Ernest
n'a pas été autorisé à y coller son travail réalisé en hommage au poète
palestinien Mahmoud
Darwich, mort en 2008 : des effigies grandeur nature de celui qui
écrivait avec une froide lucidité au lendemain du coup de force islamiste de
2007 : "Comme nous avons menti lorsque nous avons dit : "Nous
sommes une exception."" Les personnels humanitaires
étrangers doivent parfois batailler pour accéder à Gaza. Les diplomates
eux-mêmes peuvent éprouver les plus grandes difficultés à franchir le point
de passage d'Erez avec Israël. Y compris, lorsqu'ils sont français, pour se
rendre au Centre culturel afin d'y célébrer la fête nationale. Elle se tient
traditionnellement à Gaza le lendemain de la réception organisée au consulat
général de France à Jérusalem, qui fait face aux murailles de la vieille
ville. Ce consulat général est l'interlocuteur des Palestiniens, alors que
l'ambassade à Tel-Aviv est chargée de la relation avec les Israéliens. Cette année, l'autorisation
israélienne n'a été accordée qu'à la dernière minute, après un tir de barrage
de l'administration civile israélienne chargée des territoires palestiniens
(militaire en vérité) relayé par le site du quotidien Haaretz. Ce dernier
a fait état de l'hostilité des responsables israéliens chargés du dossier à
ce qu'une fête se déroule à Gaza en présence de représentants de l'Etat
français alors que le soldat franco-israélien Gilad Shalit y
est toujours embastillé, retenu en otage par ses ravisseurs palestiniens
depuis plus de trois ans. Une réaction admirable. Les
geôliers sont, à n'en point douter, des inconditionnels du 14-Juillet, dont
le caractère festif à Gaza reste extrêmement relatif. Une réaction aussi
clairvoyante que d'empêcher des artistes d'offrir aux Palestiniens
de Gaza autre chose que la logorrhée des médias contrôlés par le Hamas.
Comme l'est celle de barrer l'accès aux matériaux de construction qui
aideraient à effacer les cicatrices de la dernière offensive israélienne ou
d'empêcher que les eaux usées de ce territoire, faute d'installations de
retraitement, ne s'écoulent dans cette mer que Palestiniens et Israéliens ont
en partage. L'embargo, traduction du dépit d'une puissance à l'encontre d'une
autre, a rarement produit les fruits espérés. |