Article paru le 16 juillet – pages9-10
Bataille anticoloniale en
Languedoc-Roussillon
Une
coalition populaire lutte depuis mai contre l’implantation à Sète de la firme
israélienne Agrexco.
Montpellier, correspondance
particulière.
Agrexco est une société spécialisée dans
l’exportation des fruits, légumes et fleurs et détenue à 50 % par l’État
d’Israël. Le hic, c’est que 70 % des produits exportés par Agrexco
proviennent de la vallée du Jourdain, occupée par Israël qui y a dépossédé
les paysans palestiniens de 95 % de leurs terres et de 98 % de
leurs ressources en eau. La coalition contre Agrexco, qui regroupe 80
associations, partis et syndicats, a organisé le 25 juin une marche depuis
Nîmes et une manifestation qui a réuni plus de 1 000 personnes à Montpellier.
Et la mobilisation continue contre ce qui apparaît comme une opération
pro-israélienne montée en catimini par le président de la région
Languedoc-Roussillon, l’ancien socialiste Georges Frêche, qui n’en est pas à
sa première provocation.
« En fait, explique Robert
Kissous, responsable de l’AFPS (1) en Languedoc-Roussillon, nous avons été
alertés par une interview qu’il a donnée au Midi libre, publiée le 5 mai, et
où il annonçait que la région avait approuvé un investissement de 200
millions d’euros pour permettre à Agrexco de disposer d’un terminal
frigorifique dans le port de Sète, qui deviendrait la porte d’entrée des
produits israéliens pour toute l’Europe. L’investissement avait été approuvé
à l’unanimité par le conseil régional le 23 février, les élus ne connaissant
pas sa nature exacte et ayant été alléchés par la promesse de créer 200
emplois nouveaux d’ici à 2014. »
« La délibération ne précisait
pas la nature des produits importés, confirme François Liberti,
vice-président du conseil général de l’Hérault et ancien député maire de
Sète, qui a signé par la suite une déclaration des élus communistes de toute
la région. Ils y refusent de cautionner l’entrée de produits illégaux
provenant du colonialisme, dont l’importation est d’ailleurs interdite par
l’UE. »
Un argument appuyé aussi par la
Confédération paysanne (2), très engagée dans la lutte contre Agrexco.
« Non seulement il s’agit de produits des colonies, ce qui est
inacceptable du point de vue éthique, estime Nicolas Duntze, responsable
régional, mais l’arrivée d’Agrexco à Sète permettrait l’importation massive
de produits qui vont encore accélérer la disparition des agriculteurs dans
une région déjà sinistrée. C’est la deuxième de France pour le taux de
chômage ! Des milliers d’hectares de terres sont disponibles après
l’arrachage des vignes et l’arboriculture est en déclin. Il y a de plus un
problème de traçabilité de ce qu’on mange, auquel les gens sont de plus en
plus sensibles. Sans parler de celui que pose l’utilisation de fonds publics
pour aider Israël à faire une concurrence déloyale aux agriculteurs
languedociens. »
Beaucoup de raisons qui donnent à
réfléchir, ce que refuse de faire Georges Frêche. Il a déjà fixé à octobre
2010 l’arrivée d’Agrexco à Sète et n’en démord pas. « Ce qui est grave,
commente Robert Kissous, c’est son mépris ouvert pour les sentiments de la
population, très sensible aux problèmes éthiques que nous avons soulevés,
surtout après la guerre contre Gaza. »
Il est vrai qu’aux arguments
développés par l’AFPS dans une lettre qui lui était adressée, le président du
conseil régional a répondu en trois lignes : « Je fais de
l’économie, pas de la politique… Et je n’ai pas à vous répondre. » Un
peu court, vu l’ampleur du problème. Ce qu’entend bien démontrer la coalition
contre Agrexco, qui prépare une nouvelle manifestation en octobre.
(1) Association France-Palestine
Solidarité : www.france-palestine.org/IMG/Agrexco
ttp ://www.france-palestine.org/IMG/Agrexco>
(2) www.confederationpaysanne.fr
Françoise Germain-Robin
http://www.humanite.fr/2009-07-16_International_Bataille-anticoloniale-en-Languedoc-Roussillon
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