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http://medias.lemonde.fr/mmpub/img/lgo/lemondefr_pet.gif  Article paru dans l'édition du 11 mars 2010

Camouflet d'Israël au vice-président américain

Jérusalem Correspondant

La visite du vice-président américain, Joe Biden, à Jérusalem, venu à la faveur de la reprise du dialogue de paix indirect entre Israël et les Palestiniens pour faciliter les contacts, tourne à la crise bilatérale israélo-américaine. Mardi 9 mars, le jour même où il commençait ses consultations, le gouvernement du premier ministre Benyamin Nétanyahou a annoncé qu'il avait autorisé la construction de 1 600 nouveaux logements dans la colonie ultraorthodoxe de Ramat Shlomo, située à Jérusalem-Est.

A l'aune des relations très privilégiées unissant les deux pays, la double condamnation de cette escalade dans la colonisation, rendue publique par la Maison Blanche et par une déclaration écrite de Joe Biden, est une réaction diplomatique forte, très inhabituelle de la part des Etats-Unis.

Soulignant ainsi le mécontentement américain, M. Biden et son épouse sont arrivés avec une heure et demie de retard au dîner offert, mardi soir, par M. Nétanyahou.

"Je condamne la décision du gouvernement d'Israël de projeter de nouvelles unités de logement à Jérusalem-Est. La substance et le moment de cette annonce, en particulier avec le lancement des pourparlers de proximité (avec les Palestiniens), sont justement le genre de mesure qui sape la confiance nécessaire dont nous avons besoin en ce moment précis", a déclaré M. Biden.

"Nous devons bâtir une atmosphère pour soutenir les négociations, et non pas les compliquer", a insisté le vice-président américain, ajoutant que "des actions unilatérales prises par l'une des parties ne peuvent préjuger de l'issue des négociations".

La Maison Blanche a publié un communiqué similaire, et le secrétaire général des Nations unies, Ban Ki-moon, a également condamné la décision israélienne, rappelant que "les implantations violent la loi internationale".

Les Palestiniens ont réagi avec une relative modération. Mahmoud Abbas, président de l'Autorité palestinienne, a pris contact avec Amr Moussa, secrétaire général de la Ligue arabe, les deux hommes se concertant pour envisager "des mesures politiques urgentes et appropriées pour répondre à l'escalade et aux provocations israéliennes". L'Autorité palestinienne a dénoncé une "décision dangereuse qui menace les négociations", et Saëb Erakat, principal négociateur palestinien, a insisté sur ce point : "Avec une telle annonce, comment voulez-vous bâtir la confiance ? Cela détruit nos efforts pour travailler avec George Mitchell (l'émissaire américain pour le Proche-Orient)."

La décision israélienne a été rendue publique par la commission d'urbanisation du district de Jérusalem, qui est sous l'autorité du ministre de l'intérieur, Eli Yishaï, par ailleurs président du parti ultraorthodoxe Shass. Ramat Shlomo est une communauté de 20 000 colons ultraorthodoxes située au nord de Jérusalem et du côté est de la "ligne verte", soit la ligne de séparation entre Israël et la Cisjordanie datant d'avant la guerre de 1967.

Les entourages de M. Nétanyahou et du ministre de l'intérieur ont rivalisé d'explications embarrassées pour tenter de justifier une décision qui a été accueillie avec incrédulité par les diplomates américains et européens. Les premiers ont ressenti comme un véritable camouflet pour M. Biden l'annonce de cette décision contraire à la position de Washington sur la colonisation, faite durant le séjour du vice-président à Jérusalem.

Quelques heures avant, Joe Biden avait réaffirmé "l'engagement absolu, total et sans réserve des Etats-Unis en faveur de la sécurité d'Israël". Les conseillers de M. Yishaï ont cependant rappelé que le moratoire partiel et temporaire sur la colonisation, annoncé par M. Nétanyahou, ne concerne pas Jérusalem. L'explication d'une initiative intempestive des services administratifs israéliens était jugée peu convaincante, mercredi, par plusieurs commentateurs, qui évoquent une "gifle" à l'administration américaine.

Alors que Meir Margalit, élu du parti de gauche Meretz, a estimé qu'il s'agit d'une réponse de M. Yishaï à la décision de M. Nétanyahou d'ouvrir des négociations avec les Palestiniens, Akiva Eldar, éditorialiste du quotidien Haaretz, avance cette explication : soit Benyamin Nétanyahou "a décidé de faire échouer la reprise des négociations, y compris au prix d'une crise avec l'administration Obama ; soit il a perdu le contrôle sur l'une des questions les plus explosives du Proche-Orient".

Laurent Zecchini


Une population de colons en constante hausse

Cisjordanie. Le nombre de colons israéliens vivant dans ce territoire palestinien occupé a progressé de 4,9 % en 2009. Ce chiffre est en légère diminution, puisque la population des colons juifs avait progressé de 5,1 % en 2008.

Statistiques. Selon les chiffres du ministère de l'intérieur rendus publics mardi 9 mars, 4,1 % des Israéliens, soit 301 200 personnes (sur 7,4 millions d'habitants, en comptant les Arabes israéliens), vivaient en Cisjordanie à la fin de 2009.

Jérusalem-Est. La population juive établie dans la partie arabe de la Ville sainte était estimée, début 2010, à environ 200 000 personnes.

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