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Les Palestiniens suspendent
leur participation aux négociations avec Israël
Laurent Zecchini A peine lancées, les négociations de paix indirectes entre Israéliens
et Palestiniens ont été brutalement interrompues. Saëb Erakat, principal
négociateur palestinien, a confirmé au Monde, jeudi 11 mars, les
propos tenus la veille au soir, au Caire, par Amr Moussa, secrétaire général
de la Ligue arabe, selon lequel le président de l'Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas,
l'a informé de sa décision "de ne pas participer à ces négociations
maintenant". "La partie palestinienne n'est pas prête à
négocier dans les circonstances présentes. Les discussions ont déjà
cessé", a ajouté M. Moussa. Cette décision est la
conséquence de celle des autorités israéliennes de construire 1 600 nouveaux
logements dans la colonie ultraorthodoxe de Ramat Shlomo, à
Jérusalem-Est. Annoncée mardi, alors que le vice-président américain, Joseph Biden,
se trouvait à Jérusalem pour officialiser la reprise des discussions, cette
escalade de la colonisation juive a déclenché un net refroidissement entre
Israël et les Etats-Unis. Dissensions au gouvernement Mahmoud Abbas attend
désormais "une réponse américaine à notre demande que les Israéliens
renoncent à la construction" des logements de Ramat Shlomo, nous a
précisé M. Erakat. Sans une réponse positive, a-t-il ajouté, "il nous
sera très difficile de poursuivre des négociations avec les Israéliens".
Or, il est quasiment exclu
que le premier ministre israélien, Benyamin
Nétanyahou, annule la décision de son ministre de l'intérieur, Eli Yishaï,
président du parti ultraorthodoxe Shass. M. Nétanyahou a réuni ses
ministres pour souligner à quel point le moment choisi pour annoncer de
nouvelles constructions était fâcheux. Dans ce qui apparaît de plus en plus
comme un règlement de comptes au sein de la coalition gouvernementale,
plusieurs ministres travaillistes, dont Ehoud Barak,
ministre de la défense, ont estimé qu'il eut été préférable, au minimum,
d'attendre le départ de M. Biden de
Jérusalem. Sur le fond, en revanche,
M. Nétanyahou a réaffirmé que les constructions à Jérusalem-Est devaient
aller de l'avant. L'Autorité palestinienne, de son côté, capitalise
manifestement sur la colère américaine vis-à-vis de l'Etat juif, espérant
convaincre Washington d'adopter une attitude plus ferme envers Israël. Dans
ce match politique entre Israéliens et Palestiniens, où chaque camp s'efforce
d'abord de faire porter à l'autre la responsabilité des errements du
processus de paix, les seconds viennent de prendre l'avantage. D'autant qu'il n'est pas
exclu que cette énième crise du processus de paix ait des conséquences
politiques. Selon Shalom Simhon,
ministre travailliste de l'agriculture, "les travaillistes ont de
plus en plus de difficultés à participer à la coalition gouvernementale dans
laquelle ils sont entrés pour relancer le processus de paix avec les
Palestiniens". Si cette phase délicate est
dépassée, les relations israélo-américaines ne devraient pas être durablement
affectées. La liste est longue des visites de responsables américains ayant
coïncidé avec une relance de la colonisation : Washington manifeste avec plus
ou moins de force son mécontentement, et les bulldozers israéliens reprennent
invariablement les travaux de construction dans les colonies. |