Samedi
23 octobre s’est tenue à Gaza la conférence internationale de soutien aux
prisonniers de la Palestine dans les prisons de l’occupation sioniste en
présence de nombreuses délégations et de personnalités palestiniennes, arabes
et mondiales. Le comité national supérieur pour le soutien aux prisonniers,
fondé sous le patronage du gouvernement de Isma’il
Haniyyé, à Gaza, a été l’organisateur de cette
conférence.
C’est
en fonction de la date de la conférence, le 23 octobre, que le convoi Viva Palestina 5 avait
organisé son arrivée à Gaza, puisque de nombreux conférenciers y ont
participé, notamment un ancien ministre mauritanien. Des personnalités
internationales, comme l’ancien premier ministre malaisien, Mahatir Mohamad, étaient présentes, pendant que
d’autres, officielles ou juridiques, avaient envoyé leurs contributions
devant être lues à la conférence, ou bien étaient intervenues par vidéoconférence,
comme Louisa Morgantini, ancienne député au
parlement européen.
La
question des prisonniers de la Palestine détenus dans les prisons sionistes
est une des questions les plus importantes à laquelle auraient dû prêter
attention toutes les instances internationales, soucieuses de protéger les
droits des peuples à la liberté et à la souveraineté. Mais ces instances,
et notamment celles de l’ONU, ainsi que les différentes commissions et
instances de l’Union européenne, les sommets islamiques et arabes, les
parlementaires dans le monde, ont tous délibérément ignoré ou négligé de
prêter attention à cette question, par lâcheté d’abord, craignant de fâcher
l’ennemi sioniste, et souvent par crainte d’ouvrir ce dossier à la douleur
infinie, vécue par les prisonniers et leurs familles, qu’elles soient en
Palestine ou dans les pays arabes voisins. D’abord et essentiellement
politique, la question des prisonniers de la Palestine a une dimension
humanitaire indéniable à cause de la souffrance qu’elle introduit dans le
vécu quotidien des prisonniers et de leurs familles, de leurs amis et de
leurs voisins. C’est pourquoi il s’agit d’une question unanimement adoptée,
du moins en paroles, par les responsables politiques palestiniens, mais
quand il s’agit de négociations avec les sionistes, la question des
prisonniers est rarement abordée, sinon par des supplétifs dans les médias.
La
capture du soldat sioniste par la résistance à Gaza, il y a plus de quatre
ans déjà, a suscité la colère chez les Sarkozy, Kouchner (le soldat
sioniste est également français) et tous ceux qui ont adopté le sionisme
pour mode de pensée et d’action. Mais peu de voix officielles dans le monde
ont été indignées et se sont soulevées face aux scènes éprouvantes et
moralement insupportables de soldats sionistes arrêtant les enfants, âgés
entre 7 et 13 ans, dans la ville occupée d’al-Qods.
Aucune voix officielle, et nous n’avons certainement pas entendu Ban Ki Moon le faire, n’a dénoncé la torture à
l’électricité de jeunes Palestiniens âgés de 16 et 17 ans, dans les centres
d’arrestation situés dans les colonies en Cisjordanie, ou bien
l’arrestation et la prolongation de la détention de l’enfant Sayel Abou Qwayder, à
al-Khalil, arrêté devant son école, brutalisé par les soldats et détenu
depuis presque un mois. Aucune voix officielle, américaine ou européenne,
n’a mentionné les noms de Na’il Barghouty ou de son cousin Fakhry
Barghouty, détenus sans interruption depuis plus
de 30 ans, dans les prisons sionistes, alors qu’elles sont promptes à
intervenir pour dénoncer les arrestations dans de nombreux pays, surtout
musulmans et hostiles à la politique américaine.
Et
ils s’imaginent pouvoir nous donner des leçons de démocratie et de liberté
!
Au
cours de ces quatre dernières années, le nom du soldat sioniste capturé par
la résistance palestinienne, ceux de ses parents et de ses amis, sont sur
toutes les lèvres des ambassades et cercles occidentaux. Les médias
internationaux ne cessent de nous montrer l’agitation et les déplacements
de ses amis et de sa famille. Mais qui s’est soucié de se pencher, rien
qu’un instant, sur la vie de ces dizaines de milliers de familles qui
attendent le retour de leur père ou mère, de leur frère ou sœur, de leur
fils ou fille ? Avant qu’elles n’apprennent que cet être cher, tant
attendu, est mort sous la torture ou à cause de la négligence médicale ?
Avant qu’elles n’apprennent qu’elles ne pourront pas le visiter parce que
les geôliers ont décidé de le punir ou de les punir, elles, les familles,
parce qu’elles ont enfanté, éduqué et soutenu ces héros d’aujourd’hui ? Ces
familles protestent pourtant toutes les semaines dans les locaux de la Croix-Rouge
internationale et d’autres organisations internationales. La patience de
ces familles est inépuisable et c’est surtout leur persévérance et leur
courage qui ont maintenu la question des prisonniers vivante dans la
société palestinienne.
Le
nombre des prisonniers de la Palestine se situe aujourd’hui entre 7500 et
8000 prisonniers et prisonnières. Il est extrêmement difficile de donner un
chiffre exact au jour le jour, étant donné d’une part le nombre des
arrestations quotidiennes, en Cisjordanie y compris al-Qods
(Jérusalem) mais également dans les territoires occupés en 48, et d’autre
part, la libération au compte-goutte de prisonniers ayant achevé leur «
peine ». Il y a trois ans, le chiffre dépassait les 10.000 prisonniers mais
les autorités de l’occupation avaient libéré, avant 2008, des centaines de
prisonniers palestiniens faisant passer cela pour des « gestes de bonne
volonté », afin d’amener l’Autorité palestinienne de Ramallah à négocier,
ou pour encourager cette Autorité à durcir le ton envers la résistance
palestinienne. Car jusqu’à présent, les autorités de l’occupation refusent
de considérer les prisonniers palestiniens et arabes, les prisonniers de la
Palestine, comme des prisonniers de guerre devant être traités selon le
droit international et les traités internationaux. C’est donc sous le
prétexte de « bonne volonté » que l’arrogance des dirigeants sionistes
envisage de libérer les prisonniers palestiniens, qu’ils considèrent, ce
faisant, comme des otages.
Mais
la capture par la résistance palestinienne du soldat israélien qui
participait à la guerre contre Gaza, en 2006, a changé la situation,
puisque la résistance réclame son échange contre des centaines de
prisonniers, ceux précisément que les sionistes refusent d’envisager la
libération : les anciens (plus de 25 ans de prison), les combattants
condamnés aux plus lourdes peines (comme Abdallah Barghouty,
de Jordanie, condamné à 67 perpétuités, la plus lourde peine jamais
prononcée par les sionistes), les dirigeants des organisations
palestiniennes (Ahmad Saadate, Marwan Barghouty, Hassan
Youssef et Bassam Saadi, entre autres), les députés enlevés après les
élections législatives en 2006 (ils sont actuellement au nombre de dix),
les 37 prisonnières et notamment celles qui sont condamnées à plusieurs
perpétuités comme Ahlam Tamimi,
Qahira Saadi, Amné Mouna et Du’a Jayyusi ainsi que les prisonniers gravement malades.
Alors que les négociations par l’intermédiaire de l’Allemagne étaient
proches d’aboutir en 2008, la volte-face du gouvernement sioniste et son
durcissement ont fait échouer l’échange. Depuis, le dossier remonte à la
surface de temps à autre, et il semble que le médiateur allemand ait été de
nouveau sur place et qu’il ait rencontré sheikh
Hassan Youssef, en prison, en vue de reprendre les négociations. Quoiqu’il
en soit, le dossier de l’échange mené par le mouvement Hamas qui détient le
soldat israélien est devenu un enjeu particulièrement important pour les
Palestiniens.
Plusieurs
pays ont voulu intervenir dans le dossier pour obliger le Hamas, et non
l’Etat sioniste, à reculer. D’abord la France qui prend à cœur le sort du
soldat franco-israélien et qui souhaite, non pas un échange qui prenne en
compte les revendications palestiniennes, mais la satisfaction des parents
du soldat et de l’opinion sioniste. L’Egypte a tenté d’intervenir pour
montrer sa bonne volonté envers les sionistes et envers la résistance à
Gaza, à la fois. Mais il faut dire que c’est l’attitude de l’Autorité
palestinienne de Ramallah qui peut surprendre quelque peu, si l’on ne
comprend pas jusqu’où sont allés certains responsables de cette Autorité
pour satisfaire les Etats-Unis et les sionistes. Au lieu d’accuser les
sionistes, certains responsables de l’Autorité font porter la responsabilité
de l’échec de l’échange aux résistants du Hamas, en leur demandant
d’alléger leurs revendications.
Il
est vrai que ce que le Hamas revendique, dans cet échange, brise net les
normes des dirigeants sionistes. Renouant avec le célèbre échange qui a eu
lieu en 1985 entre le FPLP-commandement général et l’occupant sioniste, la
résistance palestinienne n’opère aucune distinction entre d’une part, les
prisonniers de Cisjordanie et de Gaza, et d’autre part, les prisonniers
d’al-Qods et des territoires occupés en 48, mais
inclut également les prisonniers arabes, jordaniens et syriens du Golan
notamment. Elle revendique la libération de ceux qu’Israël considère comme
ayant les mains « tâchées du sang des juifs », soit les combattants de la
résistance arrêtés pour avoir mené des opérations armées ayant entraîné la
mort de colons « Israéliens ». Elle réclame également la libération de tous
les dirigeants des organisations palestiniennes, ceux que les sionistes
refusent de libérer à cause précisément de leur rôle ancien et présent,
dans le soulèvement palestinien. Des bruits avaient circulé à un moment
donné, disant que les dirigeants sionistes avaient stoppé les négociations
parce que le Hamas avait inclus les prisonniers de 48 dans l’échange, car
Israël les considère, comme d’ailleurs les prisonniers de la ville occupée
d’al-Qods, comme des prisonniers « israéliens »,
ne pouvant être inclus dans tout échange. Ce sont les normes sionistes que
Hamas cherche à briser, soutenu d’ailleurs en cela par la plupart des prisonniers
et leurs familles. En quatre ans, aucune pression n’a été exercée par ces
familles, courageuses et endurantes, sur la résistance, malgré leur douleur
extrême, pour hâter les négociations et accepter d’aller à la baisse. Car
la question des prisonniers n’est pas une question humanitaire, mais une
question de dignité, individuelle et collective. Il s’agit avant tout de
les faire reconnaître en tant que combattants pour la liberté d’un peuple
et d’une nation, en tant que héros ayant décidé de sacrifier leur vie pour
sauver et libérer la Palestine. C’est ainsi que doit être abordée la question des prisonniers de la Palestine, car
c’est ainsi qu’eux-mêmes et leurs familles la voient.
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