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Article paru dans l'édition du 21 décembre 2010 WikiLeaks : L'espoir de paix avec les Palestiniens Ehoud Barak évoque un « accord
secret » avec Washington L’analyse
est celle du chef des renseignements militaires israéliens, Amos Yadlin, en décembre 2008, peu avant l'accession au
pouvoir du président-élu Barack Obama et de Benyamin Nétanyahou, qui va
retrouver les fonctions de premier ministre en mars suivant. Interrogé par un
membre du Congrès américain sur les perspectives de paix entre Israéliens et
Palestiniens, le responsable israélien avance les points suivants : tout
d'abord, les Palestiniens ne viennent qu'en quatrième position dans l'ordre
de priorité de l'armée israélienne, sous entendu, ce dossier ne présente pas
de caractère d'urgence ; ensuite, toute tentative de parvenir à un règlement
du conflit sera vouée à l'échec et ne pourra déboucher que sur une reprise
des violences comme après le sommet raté de Camp David, en 2000. Amos
Yadlin annonce incidemment qu'Israël doit se
montrer "beaucoup plus
dur" à Gaza. Deux semaines plus tard, l'armée israélienne
lancera la plus violente offensive dans un territoire palestinien depuis
1967. Le
pessimisme à propos du processus de paix israélo-palestinien irrigue les
télégrammes diplomatiques américains obtenus par WikiLeaks
et révélés par Le Monde.
En 2007, avant la prise de contrôle de Gaza par le Hamas, le chef du Shin
Beth, Youval Diskin, voit
dans la faiblesse du Fatah, le parti du chef de l'Autorité palestinienne,
Mahmoud Abbas, vis-à-vis des islamistes du Hamas, "un problème stratégique" pour
Israël, les Etats-Unis et l'Union européenne. En août 2007, le chef du
Mossad, Meir Dagan, assure ne voir aucun espoir côté du côté des
Palestiniens. Deux
ans plus tard, en 2009, lors d'une rencontre avec une délégation américaine,
le vice-premier ministre Moshé Yaalon, ancien chef
d'état-major passé au Likoud, estime ainsi que la stratégie du premier
ministre Benyamin Nétanyahou d'améliorer la situation en Cisjordanie pour
renforcer le camp des modérés ne produira pas d'effet avant une vingtaine
d'années. En
novembre 2009, une note américaine constate qu'il n'a jamais été aussi
évident que "le fossé
est trop large entre le maximum que peut proposer un premier ministre
israélien et le minimum que peut accepter un leader palestinien"
pour survivre politiquement. Toujours en novembre, le chef des affaires
politiques de l'armée israélienne, Amos Gilad,
estime que M. Abbas ne survira pas politiquement après 2011, ajoutant que le
gouvernement israélien a une confiance très relative dans l'équipe de
négociateurs palestiniens. Compte
tenu de la volonté du président Barack Obama de s'impliquer dans un règlement
du conflit, la diplomatie américaine s'interroge : "Il n'est pas clair pour nous
jusqu'où Nétanyahou est prêt à aller." "Il est intéressé par des gestes
pour renforcer Abou Mazen (Mahmoud Abbas) mais il
n'acceptera pas le gel total des constructions israéliennes en Cisjordanie
qu'Abou Mazen considère comme une condition
nécessaire pour s'engager", avertit la même note. Cinq
mois plus tôt, en juin, M. Nétanyahou a en effet écarté un gel total qualifié
d'"injuste".
"Israël doit parvenir à
un accord avec les Etats-Unis dont la position doit être 'raisonnable'",
assure-t-il. C'est
pourtant sur la question du gel total de la colonisation que la diplomatie
américaine va se concentrer dans les mois qui vont suivre, soutenue par les
Européens. Ce même mois de juin, la diplomatie française, toujours prête à
des offres de service, fait savoir aux Américains que le ministre israélien
de la défense, Ehoud Barak, se prévaut auprès
d'elle d'un "accord
secret" avec Washington permettant la "croissance naturelle"
des colonies en Cisjordanie. "Qu'allez-vous
répondre aux réactions israéliennes à votre pression" sur la
colonisation ? s'inquiètent les diplomates français, qui anticipent à juste
titre une forte résistance israélienne. Lorsque
le premier ministre israélien se prononce pour un gel partiel de la
colonisation, en novembre 2009, les réactions palestiniennes sont évidemment
très tièdes. Les Occidentaux, sans être dupes, se félicitent cependant d'une
décision sans précédent de la part d'un héritier du courant politique
israélien qui a longtemps plaidé pour un Grand Israël. Sans attendre la crise
que provoquera l'annonce des constructions à Jérusalem-Est en mars 2010, les
diplomates américains sont attentifs aux accommodements pris avec cette
décision. Dès
décembre, le choix des autorités israéliennes d'inclure par les "zones prioritaires
nationales" 90 colonies est considéré comme "de courte vue et contre-productif
dans la perspective d'une relance de discussions de paix". "Le gouvernement israélien tente
d'apaiser les colons et complique à l'avenir la manière de traiter avec leur
mouvement", écrivent les diplomates américains. En
mai 2008, à la veille de la visite du président américain George Bush en
Israël, une note diplomatique mettait déjà en garde contre ce qui était
considéré comme une évidence : "L'inertie joue au profit des colons.
Même s'ils n'ont plus la sympathie de l'opinion américaine, ils disposent d'alliés puissants dans
l'administration, de riches soutiens
en Israël et à l'étranger, prêts à financer leur entreprise, et ils
savent que l'armée ne fera rien sans instructions claires de l'échelon
politique (et que même avec des consignes, cette armée pourra traîner des
pieds)." La
relance en septembre 2010 du processus de paix israélo-palestinien s'est
brisée nette, quelques semaines plus tard, sur la question du gel de la
colonisation. Gilles Paris |