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Un article de Yann
Leroy sur l'impunité israélienne. Adhérent de l'AFPS Nord-Pas de Calais, il
s'exprime à titre citoyen dans son organisation politique. L'an dernier il était de ceux qui étaient
allés garder le bateau pour Gaza au Pirée retenu par des autorités
gouvernementales grecques prisonnières des autorités israéliennes et
européennes. Lettre des Relations Internationales Juin 2012 page 4 actualités du monde égypte élection présidentielle
: une révolution commence… C’est une difficile
campagne qui « s’achève » en Égypte avec la proclamation de la victoire du
candidat des Frères musulmans, Mohamed Morsi. Le
nouveau Raïs l’emporte sur son rival, le général Ahmad Chafiq,
avec 51,7 % (13 230 131 voix) des suffrages contre 48,3 % (12 347 380
voix) pour le dernier premier ministre de l’ère Mouba
rak. Le taux de participation terriblement faible,
a culminé au second tour à 51,85% les 16 et 17 juin. Seule la moitié des
Égyptiens se sont déplacés pour participer à ces élections, une faible mobilisation
qui témoi gne du manque
de clarté de cette campagne et conséquence des difficultés de reconstruction des
organisations politiques. Le peuple égyptien aura dû payer le prix fort afin
d’arriver à ce résultat pour le moins mitigé. Ces élections se sont déroulées
difficilement, après des mois d’affrontements meurtriers entre le mouvement
social et les « barbouzes » de l’ancien régime accompagnés du Conseil suprême
des Forces armées (CSFA). Vainqueur d’une courte tête d’un
petit million de voix, Mohamed Morsi est un homme
adepte du double langage. Connu au sein de la confrérie comme un « radical »,
président de la branche politique des Frères, le parti Liberté et justice, il
est propulsé candidat de l’organisation après l’invalidation de Khairat El-Shater et d’autres
candidats dans des circonstances obscures. Morsi est un brouilleur de pistes capable au 22 juin de s’entourer d’un
front commun de partis impliqués dans la révolution, après avoir copieusement
combattu le phénomène révolutionnaire aux premiers jours du soulèvement de Tahrir en janvier 2011. C’est notamment lui qui s’est accroché
avec les jeunes de la confrérie qui affirmaient alors l’urgence de descendre
sur la place pour rejoindre le mouvement. Élu président, il cultive cette
ambiguïté : dans une tribune publiée par le Guardian juste avant le second
tour, Mohammed Morsi rappelle son attachement aux
accords de Camp David que, dans une interview à l’agence iranienne Fars, il
appelle à réviser… Simultanément, les responsables de
la confrérie se sont efforcés de faire oublier leur arrogance des derniers
mois pour recréer un semblant d’unité dans le front révolutionnaire, afin de
ne pas se retrouver isolés face au pouvoir militaire. Morsi
s’inscrit dans ces orientations opportunistes des Frères musulmans qui tout
au long de la transition politique, ont donné le sentiment d’alterner con - frontation et connivence avec le pouvoir militaire, ainsi
qu’avec les partis et mouvements laïques, s’appuyant alternativement sur les
uns ou les autres pour faire avancer leurs intérêts. Morsi
a reçu nombre de félicitations des pays étrangers, nombres d’avertissements
aussi… Les États-Unis qui ont félicité discrètement le nouveau président, ont
par ailleurs fait la sourde oreille aux coups de force du CSFA, marque d’un
soutien toujours vivace. La riposte du Conseil suprême s’est
intensifiée durant la campagne, l’armée pesant de tout son poids en faveur de
Chafik, notamment par l’entremise des médias de masse. Jeudi 14 juin, la
Chambre basse du Parlement, largement dominée par la confrérie, a été
invalidée par la justice (elle-même largement corrompue suite aux vagues de promotions
éclair sous Mou ba rak en
réponse aux forts mouvements de contestations dans la magistrature). Dimanche
17, le CSFA a publié une déclaration constitutionnelle qui dépouille le futur
président de certains pouvoirs régaliens, confie temporairement aux
militaires le pouvoir législatif et leur donne la haute main sur la rédaction
de la future Constitution. Par ce « coup d’État institutionnel », l’armée s’arroge
notamment le pouvoir de faire du Raïs, un président temporaire à la marge de manoeuvre plus que réduite. L’armée a réussi le coup de force
d’inverser le calendrier politique de la transition au profit du CSFA et
contre la confrérie, car selon les mots mêmes du maréchal Tantaoui,
chef du Conseil suprême : « Impossible
que le chef de l’État reste en fonction après la création d’une nouvelle
constitution et après de nouvelles élections législatives ». Comme une ultime provocation le chef du Conseil suprême des
Forces armées a fait savoir qu’il avait félicité le vainqueur et a promis de
remettre avant le 30 juin le pouvoir exécutif au nouveau chef de l’État… Mohammed Morsi
Isa el-Ayyat, « président de tous les Égyptiens »,
est néanmoins le premier président civil élu depuis le renversement du roi
Farouk par les « officiers libres », le 23 juillet 1952. La société civile
sort de plusieurs décennies de traumatisme qui ont laminé les formations politiques
progressistes. La recomposition de véritables partis de gauche, relais des
aspirations de la place Tahir doit être une
priorité des acteurs politiques et doit recevoir tout notre soutien. Ensemble,
les candidats proches de la révolution, MM. Sabbahi,
Aboul Foutouh et quelques
autres rassemblaient près de 40 % des voix, mais se sont retrouvés éliminés
du scrutin. Plus que jamais la question de l’union est posée. Ces élections ne sont qu’une étape
dans la longue transition entamée depuis la chute du président Hosni Moubarak
: les révolutions ne s’achèvent pas en un jour, encore moins dans l’un des
plus anciens États au monde. Le 24 juin marquera, quoi qu’il en
soit, une étape importante dans l’histoire de l’Égypte et ouvre la bataille
pour la satisfaction des revendications originelles de Tahir
pour la justice sociale, les droits fondamentaux et le nettoyage de l’ensemble
de l’appareil d’État. Yann Leroy collaborateur Monde arabe des Relations internationales |