Le gouvernement israélien et les Etats-Unis
dénoncent une démarche " politique "
Jean-Jacques Candelier - 3
juillet 2012
La
réaction de dépit et de colère d'Israël et des Etats-Unis
à la suite de l'inscription du site
de la basilique de la Nativité de Bethléem au Patrimoine mondial de
l'Unesco, peut se comprendre : les Palestiniens n'ont pas
cherché à dissimuler que cette décision, prise le 29 juin à
Saint-Pétersbourg, par 13 voix contre 6 (et 2 abstentions), constitue
d'abord une victoire politique, un jalon vers la reconnaissance d'un Etat palestinien.
Or,
cet objectif lointain ne peut être atteint, insiste-t-on à Jérusalem comme
à Washington, qu'au travers de négociations israélo-palestiniennes, et non
par des "démarches unilatérales". Américains et Israéliens
estiment que la demande d'inscrire, par le biais de la procédure d'urgence,
le " lieu de naissance de Jésus " et la route de pèlerinage qui y
mène, au Patrimoine mondial, relève d'une telle stratégie, tout comme l'a
été l'entrée de la Palestine à l'Unesco, le 31 octobre 2011. Nabil Abou Roudeina, porte-parole du président de l'Autorité
palestinienne, Mahmoud Abbas, a salué une " reconnaissance par le
monde des droits du peuple palestinien ". Et le premier ministre,
Salam Fayyad, a souligné que ce vote " donne
espoir et confiance " au peuple palestinien " dans son inévitable
victoire " pour obtenir un Etat sur la base des
frontières de 1967, avec Jérusalem-Est comme capitale. Pour Israël et les Etats-Unis, ce verdict prouve que l'Unesco s'est
prononcée " sur la base de considérations politiques et non
culturelles ". " Au lieu de prendre des décisions pour faire
avancer la paix, les Palestiniens adoptent des initiatives unilatérales qui
ne font que l'éloigner ", a insisté le bureau du premier ministre
israélien, Benyamin Nétanyahou, tandis que l'administration américaine se
déclarait " profondément déçue ". Le monde doit se rappeler,
précise un communiqué israélien, que l'église de la Nativité, " sacrée
pour les Chrétiens, a été profanée dans le passé par des terroristes
palestiniens ". Cette allusion au siège de la basilique (pendant
trente-neuf jours), en 2002, tord quelque peu la réalité : lors de
l'opération " Rempart " menée par l'armée israélienne en
Cisjordanie, 200 militants palestiniens armés avaient trouvé refuge dans
l'édifice. Si les Israéliens ont été exaspérés par la décision de l'Unesco,
c'est aussi parce que celle-ci semble abonder dans le sens de la thèse
palestinienne, pour qui l'Etat juif est
responsable du " délabrement et de la dégradation de l'ensemble
architectural ". Le toit de l'édifice nécessite des réparations, mais
l'urgence de ces travaux n'allait pas de soi pour le Conseil international
des monuments et des sites de l'Unesco, qui a jugé que la basilique n'est
pas " sous une menace imminente ". Une curieuse polémique s'est,
d'autre part, développée s'agissant de la position des Eglises
chrétiennes (grecque-orthodoxe, arménienne et catholique) qui administrent
conjointement les lieux saints : des diplomates palestiniens ont fait
savoir qu'elles soutenaient l'inscription en urgence de la basilique, alors
que ce n'était manifestement pas le cas. Cette " victoire "
revendiquée par l'Autorité palestinienne pourrait être relative, si elle
devait déboucher sur une nouvelle dégradation des relations
israélo-palestiniennes. La rencontre qui devait avoir lieu - la première à
ce niveau depuis septembre 2010 - dimanche 1er juillet, à Ramallah, entre
le vice-premier ministre israélien, Shaul Mofaz, et Mahmoud Abbas a été annulée. Cette décision
semble en partie liée à des divergences entre MM. Mofaz
et Nétanyahou, mais à la suite d'une rencontre entre le président du parti Kadima (centre-droit) et le président Barack Obama, le
21 juin à Washington, l'administration américaine n'avait pas caché qu'elle
comptait sur M. Mofaz pour " dégeler "
le processus de paix israélo-palestinien.
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