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Israël compromet la création d'un État palestinien Benyamin
Nétanyahou passe pour être un homme politique de statu quo. Quand il s'agit
de la recherche de la paix, le premier ministre israélien n'aurait qu'un
programme : geler la situation en l'état, enterrer politiquement toute
tentative de négociation sérieuse avec les Palestiniens. Rien n'est plus
inexact. M. Nétanyahou
vient encore de prouver qu'il avait un programme, poursuivi avec assiduité :
développer sans cesse plus avant les implantations israéliennes en
Cisjordanie et dans la partie arabe de Jérusalem. Autrement dit, empêcher
physiquement la possibilité d'un État palestinien. La
semaine dernière, le gouvernement de droite que dirige "Bibi"
Nétanyahou a donné son accord à la construction de 2 610 unités de
logement dans une partie très disputée de Jérusalem-Est. Cette nouvelle
implantation rendra très difficile, sinon impossible, d'aller vers un
règlement de paix fondé sur la solution dite "des deux États" : un État
palestinien aux côtés d'Israël. L'ensemble
prévu va séparer les Palestiniens de Jérusalem du reste de la Cisjordanie,
brisant la continuité entre la Ville sainte et le territoire qui pourrait
accueillir l'essentiel d'un État palestinien. L'annonce
de ce programme immobilier est intervenue mercredi 1er octobre, le
jour même où M. Nétanyahou, de retour de l'Assemblée générale de l'ONU, à New
York, était reçu à Washington par le président Barack Obama. Il n'est rien
sorti de cet entretien, sinon un communiqué rageur de la Maison Blanche
dénonçant la dernière décision du gouvernement israélien. Celle-ci " empoisonne
l'atmosphère et conduit à s'interroger sur la sincérité de
l'engagement d'Israël à arriver à un règlement négocié, pacifique, avec les
Palestiniens ", a dit la présidence américaine. La
Maison Blanche aura rarement condamné aussi clairement la politique du
gouvernement Nétanyahou. Elle avait implicitement déjà reconnu que la
colonisation continue était à l'origine de la rupture, en avril, de la
médiation entre Israéliens et Palestiniens à laquelle le secrétaire d'État,
John Kerry, s'est efforcé durant neuf mois. Deux
jours plus tôt, à l'ONU, le premier ministre avait assimilé le Hamas au
groupe djihadiste dit "État islamique" – une manière d'exclure à
l'avance toute possibilité de négociation entre Israël et un gouvernement
palestinien d'unité représentant à la fois le Fatah et le Hamas. Il avait
aussi fait part de toute sa méfiance à l'égard des négociations nucléaires en
cours avec l'Iran – qualifié d'un des pays les plus dangereux du monde. Sans
doute était-ce là sa manière de répondre à M. Obama qui, quelques jours plus
tôt à la même tribune, avait fait cette remarque attristée : " La
violence qui submerge aujourd'hui la région - le Moyen-Orient - conduit
trop d'Israéliens à abandonner le difficile chemin de la paix - avec les
Palestiniens - . Ce devrait être un sujet de réflexion en Israël. " Benyamin
Nétanyahou est assuré d'un soutien sans faille au Congrès américain,
notamment du côté des républicains. Ceux-là s'apprêtent à élargir encore leur
majorité à la Chambre des représentants et peut-être à gagner le Sénat lors
du scrutin législatif de mi-mandat, le 4 novembre. Le premier ministre
profite de la faiblesse de Barack Obama. Pour
paraphraser ce dernier, cela devrait être un sujet de réflexion à la Maison
Blanche. © Le Monde |