AFPS Nord Pas-de-Calais CSPP |
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L’huile d’olive au cœur de
l’économie palestinienne
Monique Etienne, Pour la Palestine n°45
Du 12 au 19 février, répondant à
l’invitation de l’AFPS04, une délégation des Alpes de
Haute-Provence s’est rendue en Palestine pour l’inauguration du
moulin oléicole de Saïda (région de Tulkarem) dont l’AFPS04 a
cofinancé la rénovation et l’achat de cuves de stockage en inox.
Du 12 au 19 février, répondant à l’invitation de l’AFPS04, une délégation des Alpes de Haute-Provence conduite par Jean-Louis Bianco, président du Conseil général et député socialiste, et composée du maire de Sainte Tulle et conseiller général, Yannick Philipponeau, de Gérard Paul, maire adjoint des Mées, du président de la Chambre d’agriculture et du directeur de l’Etablissement agricole de Carmejane, s’est rendue en Palestine pour l’inauguration du moulin oléicole de Saïda (région de Tulkarem) dont l’AFPS04 a cofinancé la rénovation et l’achat de cuves de stockage en inox. Egalement au programme, des rencontres politiques de haut niveau avec le ministre adjoint des Affaires étrangères, le vice-président du Conseil législatif, le ministre des Collectivités locales, le vice-ministre de l’agriculture... et des entretiens avec Messieurs Abed Rabbo, Mustafa Barghouti et Saeb Bamya. Cette délégation était précédée par une mission technique pour travailler sur notre projet de structuration d’une filière palestinienne d’une huile d’olive de qualité. Un projet qui s’avère essentiel pour l’économie palestinienne sinistrée. Plus nous nous rendons sur place, plus nous vérifions la pertinence de notre projet. Cette fois, nous avons été encore davantage frappés par la dégradation des conditions de vie, la montée de la pauvreté dans les campagnes et la nécessité absolue d’offrir des débouchés économiques aux producteurs, notamment en ouvrant de nouveaux marchés pour l’huile d’olive palestinienne qui malheureusement ne se vend pas ou à des prix qui ne couvrent pas le prix de revient. La mévente chronique depuis le début de la deuxième Intifada pèse très lourd dans l’absence de perspectives pour les fermiers et porte atteinte à leur volonté de résistance. Dans de nombreux villages, les fermiers nous ont avoué leur découragement, certains producteurs ayant même cessé de soigner leur verger ou de récolter toutes les olives, d’autant que la production cette année était abondante. D’autres ont commencé à chercher des cultures de substitution. Ceci a des conséquences néfastes sur l’entretien des arbres qui ne produisent plus qu’à 20% de leurs capacités et sur la qualité, car les fermiers se désinvestissent à un moment où il faudrait qu’ils soient motivés pour gagner cette bataille de la qualité. Partout, à Nazlet-Issa, à Dar el Assoun, dans la région de Tulkarem, mais aussi à Beita, région de Naplouse ou dans la région de Qalqilya, la même inquiétude, la même pression : « Notre problème c’est la commercialisation de l’huile. Nous avons des stocks. Aidez-nous à vendre à des prix corrects. » A Beita, l’olivier c’est 90% des terres cultivées. A Nazlet Issa c’est aujourd’hui, après la fermeture du marché avec Israël et la construction du mur, 80% des revenus. « La pauvreté augmente avec les limites imposées à notre liberté. Israël a la mainmise sur nos marchés, sur l’eau. Le mur finit de détruire la colonne vertébrale de notre économie. Avant l’occupation israélienne, nous étions un peuple d’agriculteurs. La colonisation nous a obligés à vendre notre force de travail en Israël qui nous a rendus dépendants. Aujourd’hui, le mur nous empêche de travailler chez eux. Nous sommes redevenus des agriculteurs, sans moyens, sans terre, sans marché. Israël a fait de nous un peuple de nécessiteux. Avant l’Intifada, je vendais mon huile sur le marché local jusqu’à Gaza. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus circuler. Si nous pouvions nous déplacer, nous pourrions travailler. C’est la première condition pour la paix », nous dit le maire de Dar el-Assoun. L’urgence : améliorer les revenus des fermiers Pourtant l’huile d’olive reste un atout
incontournable pour une stratégie de développement et de souveraineté
alimentaire qui se fixe trois priorités : Avant la deuxième Intifada, le marché de l’huile d’olive était largement ouvert vers Israël notamment en direction des populations arabes palestiniennes. Le marché israélien importait de 4 à 5 000 tonnes par an. Aujourd’hui Israël importe l’huile d’olive de Turquie, de Grèce et d’Italie, à des prix relativement bas. Le cours du litre d’huile directement rémunéré aux producteurs variait de 3,5 euros pour le cours le plus bas à 5,2 euros pour le cours le plus haut. Il est à moins de 2 euros actuellement. Le mur, par l’annexion de territoires à l’intérieur de la ligne verte, sépare des villages palestiniens et empêche, au-delà des conséquences humaines désastreuses, les échanges commerciaux. Les check-points ralentissent, voire immobilisent la circulation des denrées jusqu’à rendre presque impossible leur mise en marché. Sachant que l’olivier constitue l’une des principales sources de revenus des zones rurales de Palestine, il est ainsi apparu nécessaire d’aider de toute urgence à l’organisation d’un marché qui ne peut être de toute évidence qu’orienté vers l’exportation. Ce constat et cette hypothèse ont donné lieu en 2004 à la mise en œuvre d’une action pilote organisée autour de trois moulins (Saïda, Biddya et Qabalan) qui ont reçu l’appui financier du Consulat général de France et de l’AFPS 04, à hauteur de 43 000 euros. Suite à un voyage d’étude d’une délégation de cinq Palestiniens sur l’olivier et l’huile d’olive, qui a eu lieu en mai 2004 dans le sud de la France, cette action s’est étendue à deux autres secteurs : Qireh (région nord de Salfeet) et Taybeh. Si cette action a permis d’agir sur une organisation effective des fermiers, d’améliorer les conditions sanitaires des moulins concernés, d’aboutir à la réalisation effective d’une huile d’olive de qualité (environ 130 tonnes), et d’établir des liens privilégiés avec Andines, entreprise de commerce équitable basée à Paris, elle a cependant révélé une absence de cohésion et d’organisation de la filière en Palestine et l’absence d’un environnement technique, économique et scientifique. « Nous sommes en train de réaliser une révolution oléicole » Saeb Bamiah, que nous avons rencontré au ministère de
l’Economie, nous a confirmé combien notre projet était essentiel
pour l’économie palestinienne : « Nous
devons redoubler d’efforts pour améliorer la qualité et les
infrastructures nécessaires à la création d’une filière oléicole
palestinienne structurée en interprofession, capable de répondre aux
exigences du marché européen. C’est capital pour nous et vous devez
vous aussi redoubler d’efforts pour que nous puissions développer un
commerce direct, sans passer par Israël, entre nos producteurs et les
circuits commerciaux. Nous avons une formidable opportunité avec
l’ouverture des quotas européens, indispensable pour cette ouverture
des marchés. Pour le travail sur la qualité, nous avons besoin de vos
compétences scientifiques et techniques. Vos objectifs rejoignent les nôtres : L’enjeu de ce projet est capital, comme le résumait avec enthousiasme Wisam, le directeur de la coopérative de Qireh, qui grâce à l’opération pilote a pu produire et vendre une huile de très grande qualité : « Nous sommes en train de réaliser une révolution oléicole. » Quoi de plus encourageant que cette joie de l’un des producteurs s’exclamant : « Cette année, j’ai pu vendre mon huile à un prix correct ! » A ce stade, le projet n’engage plus seulement le groupe local des Alpes de Haute Provence, mais l’AFPS dans son ensemble. Le rôle de l’AFPS s’avère essentiel pour la sensibilisation et la mobilisation du réseau pour l’achat des huiles d’olives du projet (c’est à dire une demande précise auprès d’Andines). Il faut assurer un relais en France et plus largement en Europe auprès des entreprises de commerce équitable et/ou solidaire pour promouvoir les huiles de grande qualité issues du projet. Plus généralement, un travail d’information sur le projet auprès de divers organismes et institutions françaises et européennes est nécessaire. Les groupes locaux pourront accompagner le projet en mobilisant des fonds, non seulement pour soutenir des projets oléicoles pilotes, à l’instar de ce qu’a déjà fait l’AFPS des Alpes de Haute Provence et de ce que s’apprête à faire l’AFPS Alsace, mais également pour des projets transversaux sur ou autour des sites du projet : promotion des femmes, micro-crédits, etc. Pour l’AFPS, il s’agit d’une solidarité qui permet d’aider concrètement la Palestine à mettre en place une logique de développement alternative d’envergure. C’est aussi pour nous une illustration concrète de notre engagement dans d’autres rapports Nord/Sud. Monique Etienne
[1] OXFAM : Oxford Committee for Famine Relief
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