C’est incroyablement facile de retirer la citoyenneté en Israël.
Pas besoin de la décision d’un tribunal, pas besoin de la preuve
que, sans aucun doute, vous avez trompé l’état et aucun droit de
faire appel.
Seule la recommandation d’un comité qui n’a pas de statut
officiel et la décision d’un ministre sont requises.
Le pouvoir presque illimité qu’a le Ministre de l’Intérieur
d’annuler la citoyenneté de quelqu’un est l’un des pouvoirs
les plus draconiens donné à un responsable en Israël.
Perdre la citoyenneté signifie aussi perdre le droit de travailler,
le droit à l’assurance sociale et le droit à l’aide du
National Insurance Institute (NII). De plus la menace de déportation
plane constamment au-dessus de votre tête comme une épée de
Damoclès.
A bien des égards ceux qui ont perdu la citoyenneté ont été
effacés, ils n’existent plus. Aussi intolérable que soit la
situation aujourd’hui , elle n’a fait qu’empirer.
Jusqu’à quelques années encore, il n’y avait même pas de
comité, et la citoyenneté était supprimée non par un ministre
mais par des fonctionnaires investis par le ministre pour prendre
cette décision.
Une importante coalition de personnalités publiques s’est
cristallisée autour d’une revendication visant à ce que
l’autorité qui révoque la citoyenneté soit une fois de plus déléguée
à un tribunal (le ministre a reçu ce pouvoir en 1980); pourtant,
la situation présente perdure.
Le substitut au président de la Cour Suprême le juge Mishaël
Cheshin, par exemple, a écrit sur le sujet en 2002, dans son
verdict sur le cas Yegodayver : "L’abrogation de la
citoyenneté est un acte tellement exceptionnel et tellement inusuel
qu’il y aura toujours quelqu’un pour dire que le pouvoir
d’abroger la citoyenneté devrait n’être exercé que par
l’autorité judiciaire.
Cheshin notait que c’est ce qui se passe aux Etats-Unis.
L’ex ministre de l’Intérieur, Avraham Poraz a déclaré :
"Dire à une famille après dix ans : 'Vous devez quitter ce
pays parce qu’il a appris que votre grand mère n’était pas
juive’, ce n’est pas quelque chose d’humain. Je soutiens
l’idée qu’il faut transférer ce pouvoir à la justice."
La semaine dernière, le ministre de l’Intérieur, Ophir Pines-Paz,
a déclaré au Ha’aretz qu’il était lui aussi en faveur du
transfert de la procèdure au système judiciaire.
L’ex ministre de l’éducation, le Pr. Amnon Rubinstein, a déclaré
au Ha’aretz : "Je suis fortement opposé à l’idée
d’abroger la citoyenneté des gens. Tous ceux qui entrent en Israël
devraient avant tout être sévèrement contrôlés. Si nous avons
fait une erreur, alors nous avons fait une erreur. Ce n’est pas la
fin du monde. J’espère que le nouveau ministre n’autorisera pas
d’annulation de citoyenneté."
Dix membres de la Knesset qui sont des représentants du Shinui, du
National Union et du Yahad sont respectivement signataires de trois
propositions de loi visant à transférer le pouvoir d'abroger la
citoyenneté aux tribunaux de district, au tribunal de première
instance ou à une commission présidée par la Cour Suprême de
Justice. Mais en même temps, le ministère de l’Intérieur
continue d’abroger la citoyenneté sur une échelle de 10% par an.
Ni mort ni vivant
Mimi Ashato vit dans une arrière-cour d’Israël. Et ce n’est
pas une métaphore. Elle vit en outre dans un immeuble abandonné de
Netanya – pas dans l’immeuble même mais dans une petite
structure de l’arrière-cour. Pendant huit ans, Ashato a été
citoyenne israélienne jusqu’au moment où le Ministère de l’Intérieur
lui a retiré sa citoyenneté, lui retirant, à elle et à sa
famille, presque tous leurs droits civils. On a une expression en
amharique (langue éthiopienne) dit Ahsato qui décrit exactement ma
situation : "Je ne suis ni morte ni vivante."
Ashato est arrivée en Israël en 1991 à 17 ans. Elle étaient
enceinte.
Son nouveau-né, un petit garçon, lui a été retiré sous prétexte
qu’elle était incapable de l’élever. On l’a proposé à
l’adoption.
Selon sa carte d’identité israélienne elle est chrétienne, bien
qu’elle affirme que sa mère est juive. Ashato travaillait aux
cuisines de la cafeteria du Wingate Institute.
En 1995, elle s’est mariée à un travailleur étranger non juif
arrivé d’Ethiopie, Molona Tiroso. Le couple a eu deux enfants :
une fille qui a maintenant six ans et un fils qui a 4 ans.
En 1999, quand elle était enceinte, elle a fait une demande auprès
du Ministère de l’Intérieur pour obtenir un statut officiel pour
son mari. Depuis lors, sa vie est devenue un cauchemar.
"Je suis allée au Ministère de l’Intérieur. Et là on
m’a demandé : "Quoi, vous allez épouser un Chrétien
?". J’ai répondu : "Oui, c’est ce que le destin m’a
ordonné".
On m’a dit "Vous êtes chrétienne, et lui aussi. Vous devez
quitter Israël. Retournez dans votre pays."
Cette année, elle a été convoquée pour une être entendue au
ministère. Après quoi, elle a reçu une lettre de Sarah Krasnov,
chef de la section des visa de l’Office de la Population qui lui
écrivait : "Je souhaite vous informer qu’il a été décidé
d’abroger votre statut d’immigrante et que votre mari n’a pas
droit le non plus de recevoir un statut légal."
En 200, Ashato et Tiroso se sont mariés dans une cérémonie
paraguayenne
Quand ils ont voulu faire enregistrer leur mariage, ils ont reçu
une autre lettre laconique : "En réponse à votre requête
nous souhaitons vous informer que vous devez quitter Israël immédiatement.
Si vous ne le faisiez pas, un ordre d’expulsion serait émis pour
vous deux."
Pas si inhabituel
Ces lettres ne sont pas un phénomène si inhabituel. N’offrant ni
raison et ni possibilité de recours, l’Office de la Population
informe régulièrement de nombreuses personnes qu’elles ont perdu
leur citoyenneté et exige qu’elles cessent de vivre en Israël et
retournent dans leur pays natal (même si, dans certains cas, elles
n’ont plus aucun lien là-bas).
"Je n’ai pas falsifié de document. Je ne suis pas capable de
tromper quelqu’un." dit Ashato. La décision d’abroger sa
citoyenneté soulève de sérieuses questions, parce qu’Ashato a
en Israël quatre enfants dont la citoyenneté n’a pas été abrogée.
Il y a un autre gros problème avec la décision du ministère : sa
citoyenneté a été abrogée bien qu’elle soit arrivée en Israël
alors qu’elle était mineure et elle et ses enfants ne sont
citoyens d’aucun autre pays.
Selon la politique du Ministère de l’Intérieur, d’autres
services ont été informés que la citoyenneté d’Ashato était
abrogée. Avec comme conséquence que le NII (service social) a cessé
d’allouer à ses enfants les allocations (qui leur revenaient) et
leur garantissaient une aide pendant que la Banque Tefahot
suspendait la subvention pour ses locations au mois et lui a même
demandé qu’elle rembourse tout ce que la banque lui avait déjà
versé.
N’ayant plus de citoyenneté, elle ne peut pas trouver de travail
salarié.
"Je suis obligée d’emprunter partout pour simplement
survivre," explique-t-elle. "Mon mari et moi sommes
jeunes. Nous pourrions être en mesure financièrement d’aider
dignement nos enfants. J’ai perdu 15 kg, je ne suis que peau et
os. Je dois mendier pour qu’on me donne de la nourriture."
Ashato était enceinte mais a avorté parce qu’elle a compris
qu’elle n’aurait pas les moyens d’élever un enfant de plus.
Ahsato, son mari et ses enfants ont fait appel auprès de la Haute
Cour de Justice le 12 avril. Ils étaient représentés par Nicole
Maor, un avocat qui travaille avec Israël Religious Action Center
(IRAC) – Centre israélien d’action religieuse – d’Israel
Movement for Progressive Judaism (Mouvement israélien pour un judaïsme
de progrès). Maor a fait valoir que la citoyenneté d’Ashato lui
avait été illégalement retirée et qu’on n’avait trouvé
aucune preuve qu’elle ait cherché à tromper les autorités.
Pour Maor, l’Office de la Population a abrogé "de
manière brutale et inhumaine les droits fondamentaux des membres de
la famille d’Ashato."
Le porte-parole de l’Office de la Population, Sabine Hadad,
déclare "Le comité dirigé par le juge à la retraite David
Bar-Tov a recommandé en 1999 que le statut légal de Mimi Ashato
soit abrogé pour avoir été obtenu frauduleusement. Pour des
raisons personnelles inconnues de nous, il y seulement deux semaines
qu’elle a fait appel auprès de la Haute Cour de la décision qui
lui avait été envoyée en premier en août 1999. L’état présentera
sa réponse à la Haute Cour d’ici peu.
Avec le consentement de l‘état, une injonction temporaire
interdisant l’expulsion des pétitionnaires a été rendue.
L’abrogation massive de la citoyenneté, qui représente des
dizaines de cas par an, a été mise en place quand Eli Suissa (Shas)
était ministre de l’intérieur entre 1996 et 1999. Un ex-
responsable du ministère de l’Intérieur raconte que, pendant des
années, les hauts responsables de l’Office de la Population,
avaient délégation pour abroger la citoyenneté.
Le directeur de l’Office de la Population quand Suissa était
ministre de l’Intérieur, Rafi Cohen, expliquait à l’époque à
Aryeh Dayan du Ha’aretz que : "En raison de l’importance de
l’immigration au début des années, on n’examinait pas très
attentivement les droits (à la citoyenneté) des immigrants. Selon
Cohen, bien que le ministère n’ait pas eu de politique visant à
mettre en place un système de vérification des documents des
immigrant, il ne pouvait pas ignorer les cas où il y avait
suspicion de fraude.
"Les gentils (non-Juifs) qui arrivent en Israël, a-t-il
souligné incluent beaucoup de gens qui se présentent
fallacieusement comme des immigrants remplissant les conditions
requises. Il y a un nombre presque illimité de mariages
blancs." Résultat : des familles qui ont immigré en Israël
il y a sept ou huit ans se voient retirer leur citoyenneté. Dans
bien des cas, on avait dit à ces gens qu’ils devaient renoncer à
leur ancienne citoyenneté pour devenir des immigrants, et
maintenant ils n’ont plus de citoyenneté.
A l’époque où le ministre Roman Bronfman (qui représentait
alors Yisraël b’Aliah (Aliah en Israël = retour en Israël) mais
qui représente aujourd’hui le Yahad) a déclaré : "le but
c’est de rendre la vie aussi difficile que possible aux immigrants
non Juifs et par conséquent de les forcer à quitter ce pays."
Dans de la vague de critiques très dures contre ce système
d’abrogation de la citoyenneté, le ministre de l’intérieur
d’alors, Natan Sharansky a décidé en 1999 de créer un comité
consultatif pour discuter des procès possibles. Le comité était
dirigé par un juge à la retraite David Bar-Tov et comprenait aussi
des personnalités publiques.
Dans ses discussions, le comité s’est basé sur les dossiers
qu’il a reçus de l’Office de la Population et sur le résumé
des audiences que l’Office avait entendue. Ce n’était pas dans
la pratique du comité de convoquer, et d’écouter le témoignage
de ceux dont il avait à décider du destin.
La politique massive d’abrogation de la citoyenneté a été
fortement approuvée ces dernières années par le directeur de l’Office
de la Population d’alors, Herzl Gadj, considéré comme un très
proche du premier ministre Ariel Sharon.
L’ancien ministre de l’intérieur, Avraham Poraz, a renvoyé
Gadj l’an dernier ; Selon les chiffres de l’Office de la
Population fourni par le Ha’aretz, en 2002, quand Gadj était son
directeur et que le chef du Shas Eli Yishai était ministre de l’Intérieur,
la citoyenneté de 170 personnes avait été révoquée.
Quand Poraz est devenu ministre de l’Intérieur au début de 2003,
il a décidé de remplacer Bar-Tov et de nommer à la place son
ancien conseiller juridique à la Knesset, Zvi Inbar. Pendant
l’année et demi qui a suivi la nomination d’Inbar, le comité
ne s’est pas réuni.
Quand il a commencé à se réunir Inbar à introduit un certain
nombre de changements.
Il a commencé par convoquer les gens qui démentaient avoir fraudé
pour entrer dans le pays et, dans deux cas, les personnes qui
avaient été convoquées sont venues accompagnées de leurs
avocats.
Combien y-a-t-il eu de abrogations de citoyenneté au cours de la période
Poraz-Inbar ? C’est très difficile à dire.
Initialement, l’Office de la population a déclaré que, en 2003,
97 personnes ont vu leur citoyenneté abrogée et que, en 2004, il y
avait eu 76 abrogations de citoyenneté.
Ha’aretz a demandé si des citoyennetés avaient été abrogées
pendant la période où le comité d’annulation de la citoyenneté
s’était à peine réuni et si ces abrogations, s’il y en avait
eu alors, avaient été décidées sans réunion du comité, et sans
que le ministre n’ait fait connaître son accord.
Poraz a déclaré au Ha’aretz qu’une seule fois où il avait reçu
des "formulaires qui semblaient indiquer que la citoyenneté
d’une personne avait été abrogée sans réunion du comité. Gadj
a signé à la place où le comité était supposé rédiger sa décision.
A la suite de cette déclaration, le porte-parole de l’Office de
la Population a fait connaître sa réaction : "Un examen des
chiffres indique que, en 2003, c’est le statut officiel de 55
personnes qui a été abrogé (à l’issu de trois réunions) alors
qu’en 2004, c’est le statut officiel de 20 personnes qui a été
révoqué. Toutes ces abrogations ont été engagées par des comités
consultatifs.
On ne sait pas si il y a quelqu’un, excepté le contrôleur d’état,
qui puisse donner une réponse crédible aux questions suivantes :
Combien y-a-t-il eu de statuts de citoyenneté été abrogés ?
Qui précisément les a abrogés ?
Avaient-ils la compétence pour ça ?
Incidemment, le comité Inbar s’est réuni cinq fois l’an passée
et, selon Inbar, chacune des sessions du comité a été consacrée
à débattre de cinq à quinze cas.
Le bureau de l’actuel ministère de l’Intérieur, Ophir
Pinez-Paz, a déclaré que depuis sa nomination de ministre, il
avait signé quinze abrogations d’autorisation à la citoyenneté.
Le Ha’aretz n’a pas pu obtenir de réponse quant à la position
de Pines-Paz sur la question de l’abrogation de la citoyenneté et
sur son mode exécutoire.
Pas même un seul document
Un jour Tatyana Levitin, ancienne citoyenne israélienne, a été
arrêtée et incarcérée à la prison de Nazareth. On l’a traitée
comme si elle était une travailleuse étrangère.
Ce n’est qu’un prompt recours en justice de son avocat, Yael
Katz-Mastaum, qui a empêché l’expulsion de Levitin.
Avant son arrestation elle avait la carte d’identité israélienne
bleue et pouvait travailler et gagner de quoi vivre pour elle est
son compagnon, Mordecha Zaoulay.
Dès l’instant où on lui a confisqué sa carte d’identité,
elle n’a plus pu avoir de travail légal. Elle ne peut pas non
plus adresser de requête auprès de la Haute Cour pour faire appel
de son abrogation de citoyenneté.
Levitin est l’exemple type des abrogations de citoyenneté en
vigueur au Ministère de l’Intérieur quand un non juif a soit
divorcé de son partenaire ou que son mari ou sa femme est mort.
Elle avait la citoyenneté israélienne depuis cinq ans. Elle s’était
mariée à Alexei Levitin, dont le père était Juif, en Ukraine en
1995.
Deux ans plus tard, le couple a immigré en Israël.
L’intégration sociale du mari a échoué, et il a décidé de
repartir pour l’Ukraine. Selon Tatyana, il travaillait la nuit et
ça lui a brisé l’esprit. Elle a décidé de rester en Israël.
L’unique raison de sa décision, c’était une relation
romantique qu’elle avait nouée avec son employeur Mordechai
Azoulay, le propriétaire de 70 ans, d’une entreprise de
nettoyage.
Elle a divorcé de son mari, est allée vivre chez Azoulay et a même
acheté un appartement avec lui. En même temps, Azoulay a pris sa
retraite. Il souffrait d’une maladie cardiaque, sa vue s’était
sérieusement affaiblie et il dit qu’il est devenu très dépendant
de ses soins.
Le couple a fait des requêtes répétées auprès du Ministère de
l’Intérieur pour que le divorce de Levitin soit reconnu et que le
couple puisse se marier.
En guise de reconnaissance, ils ont reçu une réponse en 2002 les
informant qu’il avait été décidé d’abroger la citoyenneté
de Levitin parce que son premier mariage avait été un mariage
fictif.
Levitin et Azoulay ont demandé que Tatyana soit autorisée à
rester en Israël au titre de compagne d’Azoulay. Mais au lieu
d’une réponse, Levitin a été arrêtée parce qu’elle avait
renoncé à sa citoyenneté ukrainienne et se retrouvait donc sans
état.
Levitin admet que le calendrier de son immigration en Israël peut
paraître bizarre. Pourtant, elle dément que son mariage ait été
fictif. Selon Levitin, elle s’est mariée par amour et son ex
beau-père qui réside en Israël, peut l’attester.
"Je leur ai montré toutes les preuves, les photographies et le
bail de l’appartement que je partageais avec mon ex mari ainsi que
le document indiquant que nous avions un compte joint à la
banque." souligne-t-elle, et elle demande : "Quelle
logique peut-il y avoir dans leurs arguments ? Est-ce que j’aurais
fait un mariage fictif pour laisser mon travail dans une banque et
venir en Israël nettoyer les sols ?"
Réponse de l’Office de la Population : "Mr et Mme Levitin ne
vivaient pas ensemble après leur immigration en Israël. A la fin,
ils ont divorcé et M. levitin a quitté le pays."
L’Office ajoute qu’il a informé Levitin que "à la lumière
du fait qu’elle se trouve ici illégalement, nos procédures
exigent qu’elle quitte Israël. Ce n’est qu’après son départ
que la requête de son compagnon pour l’autoriser à vivre en Israël
sera examinée.
Qu’est-il arrivé à la directive ?
Apparemment le problème aurait dû être résolu, au moins
partiellement, l’année dernière, quand le ministre de l’Intérieur
d’alors, Poraz (du Shinui) avait sorti des instructions pour qu’Israël
n’expulse aucun de ceux qui sont dans le pays depuis plus de trois
ans ou qui ont des enfants.
Dans une directive de Sasi Katzir, directrice de l’Office de la
population, datée du 14 novembre 2004, les responsables du ministère
ont reçu pour instruction de donner aux gens de cette catégorie le
statut de résident permanent, qui autorise la plupart des privilèges
dont bénéficient les citoyens israéliens.
Pourtant, dans une lettre qu’elle a envoyée à l’Office de la
Population, l’avocate Nicole Maor déclare que, un mois et demi
après que la directive ait été publiée, Katzir diffusait une
lettre qui l’annulait.
Maor s’est tournée vers l’Office de la Population, demandant
l’identité de la personne qui avait autorisé Katzir à annuler
une directive du cabinet ministériel. Elle a même écrit que
"dans les circonstances actuelles, il y a des raisons de
suspecter qu’on a voulu rendre des décisions 'par la petite
porte' et que derrière ça, les considérations qu’il y a derrière
ne collent pas avec une procédure administrative normale."
Réponse de Hadad, le porte-parole l’Office de la Population :
"La directrice de l’Office de la Population, Sasi Katzir, a décidé
que la directive ne serait traitée que par le bureau principal de
l’Office de la Population, et non par ses agences, et que le
processus serait conduit par le biais d’un comité extérieur
dirigé par l’avocat Zvi Inbar.
De plus, l’Office de la population déclare que la "décision
d’abroger le statut légal des personnes n’est jamais prise à
la légère.
Au contraire, ça ne se fait qu’au terme d’un long processus, au
cours duquel tous les faits documents et détails sont étudiés et
recoupés avec d’autres agences, et après auditions des personnes
concernées.".
Selon Hadad, son bureau s’appuie, dans les procédures
d’abrogation de citoyenneté "sur des faits sans équivoque
et des preuves administratives dont le poids a été déterminé par
la législation adéquate. Certain de ces cas, comme ceux qui
concernent les fraudes alléguées ou l’emprunt présumé de
l’identité de quelqu’un d’autre, sont transférés à la
police pour qu’elle enquête.
A l’égard de la demande que le pouvoir qui abroge la citoyenneté
soit transférée au système judiciaire, Hadad dit : "La loi
autorise le ministre à abroger la citoyenneté et c’est cette
procédure qui est suivie." Selon Hadad, le comité
d’abrogation de la citoyenneté est un "comité consultatif
extérieur qui sert l’Office de la Population et son rôle,
c’est de faire en sorte que le processus et les audiences soient
conduits comme il faut."
Une absence de procédure
Ce n’est que dans de rares cas que le comité consultatif dirigé
par l’avocat Zvi Inbar refuse d’accéder à la requête du
Ministre de l’Intérieur pour l’abrogation de la citoyenneté
d’une personne ; selon Inbar, l’ancien conseiller juridique de
la Knesset, "le Registre de la population nous apporte généralement
des cas qui sont nébuleux. Dans certains cas, nous ne parvenons pas
à décider et nous demandons des informations complémentaires."
Inbar dit : "L’abrogation du statut officiel de quelqu’un
ne signifie pas nécessairement que la personne sera expulsée ;
dans certains cas, nous recommandons que le ministre qui abroge la
citoyenneté de quelqu’un et son certificat d’immigrant, lui
donne le statut de résident ou de résident temporaire, bien que
nous possédions la preuve que sa citoyenneté a été obtenue par
des moyens frauduleux."
"Plus généralement, si un enfant est né ici ou qu’il est
ici depuis sept ou huit ans, nous recommandons qu’un statut de
remplacement soit autorisé."
Pourtant, selon les chiffres que le Registre de la Population a
soumis au Ha’aretz, très peu de personnes dont la citoyenneté a
été abrogée ont obtenu un statut de remplacement : 16 en 2002 six
en 2003 et 4 en 2004.
Le responsable du comité Inbar a été nommé par Avraham
Poraz, le ministre de l’intérieur d’alors, le 10 juillet 2003
mais sa première réunion n’a eu lieu qu’en décembre 2004. Le
contrat d’Inbar prévoit sept réunions et le comité s’est réuni
une fois toutes les deux semaines. Il attend maintenant son nouveau
contrat.
D’autres membres au service du comité sont le Dr. Natan Patlas,
un immigrant russe, et Shlomo Mulah, un immigrant éthiopien.
Inbar dit qu’il n’a aucune idée sur la question de
savoir pourquoi le comité a mis un an et demi pour se réunir la
première fois.
Est-ce que le comité convoque les immigrant pour entendre leur
version ?
"Dans les cas où les faits sont clairs comme de l’eau de
roche et où il n’y a pas l’ombre d’un doute, le comité dépend
de l’audience qui s’est tenue au Ministère de l’Intérieur ou
des preuves réunies par la police.
Dans ce cas, le comité ne convoque par l’immigrant.
La plupart du temps, la personne est une prostituée qui s’est
faite attraper sur son lieu de travail et qui a avoué avoir obtenu
la citoyenneté frauduleusement, ce qui signifie qu’elle a soit
fabriqué des documents ou soit qu’elle a fait un mariage fictif.
Toutes les fois que l’homme ou la femme en question insiste en
disant que son entrée en Israël n’a pas été obtenu
frauduleusement nous convoquons la personne.
Nous informons les immigrants que, s’ils ont un avocat, cet avocat
peut aussi les accompagner.
Dans combien de cas les immigrants sont-ils venus avec leur
avocat ?
"Deux"
Inbar raconte que la "cadence de travail du comité se situe
entre cinq et quinze cas par session, qui chacune dure entre trois
et quatre heures, ça dépend de la complexité des cas."
On peut ainsi conclure que la discussion concernant l’abrogation
de la citoyenneté d’une personne dure en moyenne vingt minutes.
Ca ne serait pas une bonne idée si on suivait une procédure
plus juridique ?
J’essaie de conduire une procédure qui soit très semblable à
une procédure juridique. Chaque cas est accompagné par les minutes
de la discussion dans lesquelles je consigne toutes les considérations
et les recommandations.
Très généralement, les minutes prennent une page ou deux.
Y’a-t-il une procédure spéciale pour annuler la citoyenneté
de quelqu’un ?
Je n’en connais pas. Ce serait certainement un ensemble de procédure.
Ce serait une très bonne idée mais c’est du ressort du ministère.
Personnellement je n’ai ressenti aucun besoin particulièr d’un
tel ensemble de procédures parce que je suis très clair sur ce que
je dois faire avec le comité.
Quand j’ai été nommé, j’ai annoncé ce que serait la procédure.
Est-ce que ce ne serait pas une bonne idée de fixer une date
limite pour l’entrée frauduleuse en Israël, comme il y a une loi
pour limiter les délais dans tous les délits?
Il y a une loi sur les délais pour les infractions pénales. Mais
ici nous ne nous occupons pas de d’infractions pénales. Nous nous
occupons du statut civil d’une personne qui l’a obtenu par des
moyens frauduleux.
La loi dit que le ministère est autorisé à abroger la citoyenneté
obtenue frauduleusement.
La loi n’inclut pas de restriction de date.
Et le temps qu’un individu est resté ici en Israël n’a pas de
poids décisif dans notre recommandation concernant l’attribution
d’un statut de remplacement.
N’êtes-vous pas troublé que l’état annule la citoyenneté
de gens qui vivent ici depuis longtemps ?
Non ça ne me trouble pas. Après tout, s’ils sont ici depuis tant
d’années, c’est parce que leur fraude a réussi.
L’obtention frauduleuse de la citoyenneté et d’un certificat
d’immigrant, et avec tous les bénéfices liés à ces documents,
c’est une affaire sérieuse.
Ne devrait il pas y avoir une cour d’appel à laquelle les
demandeurs pourraient s’adresser pour récuser la décision du
comité ?
La cour d’appel c’est le ministère. Certains cas vont jusqu’à
la Haute Cour et alors le Ministère de l’Intérieur doit
justifier sa décision.
Pourquoi cette décision ne serait-elle pas dans les mains d’un
tribunal ?
La procédure de mon point de vue est adéquate parce qu’il existe
un tampon entre le mécanisme professionnel et le ministère : le
comité.
Ce que dit la loi
La section 11 (c) de la Loi sur la citoyenneté dit : « Le ministre
de l’Intérieur est autorisé à décider, quand il existe de véritables
raisons à cette décision, à abroger le visa de l’immigrant et
son certificat attribués selon la Loi du Retour 5710-1950 – si
lesdits documents ont été obtenus frauduleusement
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