Negev
: Faire disparaître les villages non reconnus
Par Abu El Heija
Discours de Mohammed Abu El Heija, Président de
l'association des 40, à la Conférence Internationale pour les
Droits du Peuple Palestinien qui s’est tenue du 17 au 19 octobre
2003 à Bilbao.
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Le Negev est une région particulièrement affectée par cette
politique.
Pendant l'année 2002, 29 maisons ont été démolies. Entre janvier
et septembre 2003, 37 maisons ont été démolies ainsi que 12
magasins, 1 mosquée et un réservoir d'eau soit au total 51 bâtiments.
Ce sont les statistiques. Maintenant quel sera le futur de la région
si on se base sur le plan du gouvernement ?
Quand on pense au mot maison, certaines images naissent dans nos
esprits.
Malheureusement, certaines Puissances dans le Monde ont le pouvoir
de réduire ces images en poussière. Evidemment, le gouvernement
israélien est l'un d'entre eux : Il s'autorise à démolir des
maisons quotidiennement, à la fois à l'intérieur et à l'extérieur
de ses frontières.
Israel est un Etat moderne et industrialisé qui est considéré
comme ayant l'un des niveaux de vie le plus élevé au monde. Il est
défini comme un Etat juif et démocratique. Cependant, il existe
une deuxième population non juive qui, selon les lois et la
politique basées sur cette définition, a subi une discrimination
systématique : Ce sont les habitants Arabes Palestiniens
autochtones qui, en 1948, sont restés sur leurs terres et dans les
frontières du nouvel Etat établi. Aujourd'hui, les habitants
Arabes Palestiniens d'Israel représentent à peu près 20% de la
population.
Néanmoins, bien que constituant une communauté d'environ 1200 000
personnes, ils n'ont pas le statut de minorité nationale et ne bénéficient
pas des mêmes droits ni des mêmes protections et privilèges dont
bénéficient les citoyens juifs.
Israel a marginalisé la population palestinienne par le biais de
lois et une politique qui dénient leur existence et ne respectent
pas leurs droits humains élémentaires ainsi que leurs besoins
nationaux, économiques, sociaux et culturels.
" Village non reconnu" : un terme ajouté à notre
vocabulaire, résultat de l'établissement de l'Etat d'Israel. Je
vais vous présenter une brève explication du développement de ce
terme.
• a) La guerre de 1948 a eu pour résultat l'établissement d'un
Etat Juif Démocratique qui possède aujourd'hui 93% des terres.
• b) Pendant cette guerre, plus de 500 villages palestiniens ont
été détruits et leurs habitants évacués. Environ 150 000 sont
restés à l'intérieur de l'Etat dont à peu près la moitié en
tant que réfugiés internes. Tous ont été considérés comme
citoyens israéliens.
• c) Beaucoup de lois furent instituées permettant à l'Etat, au
fil des ans, de prendre le contrôle des terres.
• d) Au cours de l'année 1965, le problème des villages non
reconnus se précisa, car, la Loi de Planification et de
Construction qui divisait la terre d'Israel en zones à destinations
variées, fut instaurée. En même temps, un plan principal fut établi
qui incluait 123 villages arabes, ignorant intentionnellement le
reste . Ainsi fut créé le statut de villages non reconnus.
• e) Par conséquent, les terres sur lesquelles étaient établies
ces villages reçurent un statut illégal sous le pretexte d'être
situées en zones agricoles, militaires ou de parcs.
Aujourd'hui, environ 100 000 Palestiniens citoyens Israéliens
vivent dans ces villages non reconnus : 30% dans le Nord et 70% dans
le Sud, le Negev. ( plus de 90% de ces villages existaient avant l'établissement
de l'Etat d'Israel. Les autres ont été créés par des réfugiés
internes lors de la fondation de cet Etat).
Il n'y a pas de nombre précis des villages non reconnus, car il n'y
a pas de définition légale de ce qu'est un village dans l'Etat d'Israel.
Mais nous parlons de 9 agglomérations dans le Nord et de 46 dans le
Sud soit au total 12 000 maisons construites illégalement. Ces
villages ne sont pas reconnues par les instances gouvernementales,
n’ont pas de représentants officiels et ne reçoivent pas de
subsides gouvernementaux tels qu’en bénéficient les autres
municipalités.
Cela veut dire que ces villages existent et se maintiennent :
• sans infrastructure routière, d'alimentation en eau, d'écoulement
des eaux usées, de branchements électriques et de lignes téléphoniques,
• sans services et programmes gouvernementaux comme le ramassage
des ordures, les Services Postaux, les Centres de Soins, les écoles,
les crêches, les parcs ainsi que les autres services culturels et
sociaux dont bénéficient généreusement la population juive.
Le gouvernement n'a pas réussi dans sa stratégie à persuader les
habitants d'abandonner leurs maisons. Au lieu de cela, les habitants
se sont adaptés à ces conditions de vie insupportables. Ainsi, à
la fin des années 70 et au début des années 80, des ordres de démolitions
furent produits et des dizaines de maisons démolies.
Le refus de l'autorisation de construire dans tout le secteur arabe
en Israel a abouti à une augmentation du nombre des immeubles
construits illégalement. Par exemple, entre 1986 et 2000, le nombre
des immeubles illégaux dans le secteur arabe a progressé de près
de 11 000 à plus de 30 000, parce que nous avons une demande tres
égoiste : nous voulons avoir des maisons ( en 2003 : 126 immeubles
arabes ont été démolis dans les frontières d'Israel ).
Il est important de noter qu'au cours de l'année 2000, 16 400 bâtiments
illégaux appartenaient à des Juifs. Cependant, aucune démolition
n'a été enregistrée concernant ces immeubles illégalement
construits.
Le Negev est une région particulièrement affectée par cette
politique.
Pendant l'année 2002, 29 maisons ont été démolies. Entre janvier
et septembre 2003, 37 maisons ont été démolies ainsi que 12
magasins, 1 mosquée et un réservoir d'eau soit au total 51 bâtiments.
Ce sont les statistiques. Maintenant quel sera le futur de la région
si on se base sur le plan du gouvernement ?
Le " plan de développement du Negev" , un
programme prévu sur une période de 6 ans, propose un généreux
budget de 200 millions de shekels pour le développement du Négev.
Cependant, 48% de ce budget sera dépensé pour renforcer les démolitions
de maisons.
Par exemple, il sera établi un Département de Police avec 50
officiers se consacrant à l'exécution des ordres de démolitions,
2 nouveaux juges seront désignés pour traiter le problème et des
plans ont été budgetés pour empoisonner les champs cultivés illégaux.
La prochaine mesure prise par le gouvernement israélien pour développer
le Negev c'est d'établir un Département pour la mise en
application du programme d’Aménagement et de la Construction. Ce
Département comprend des représentants du Ministère de l’Aménagement
Intérieur, du Ministère de la Justice, des officiers de police, et
des juristes externes. Cette combinaison va permettre d'accéler le
processus d'émission d'ordres de démolition et leur exécution.
De plus, le Gouvernement israélien a l'intention de développer le
Negev par une Loi actuellement en cours de législation : "la
loi sur les intrus" qui raccourcira la procédure de démolition
de maisons et de confiscation de terres. Ces mesures, si elles
sont mises en application, constitueront une autre catastrophe pour
notre peuple et créera de nouveaux réfugiés internes.
C’est drôle comment notre destin à nous, les Palestiniens,
semble avoir des dénominations commençant par "non" (ex
: villages "non" reconnus ndlt). Nous sommes confrontés
à une situation difficile et instable. J'aimerais terminer en
mentionnant le fait que lors des années 90, l'Association des 40
avec l'aide d'organisations nationales et internationales a fait
pression sur le gouvernement pour reconnaître 9 des villages non
reconnus. Cependant, cette reconnaissance n'est pour l'instant que
de l'encre sur du papier. Pourtant, cette expérience nous a laisse
penser qu' avec des partenaires appropriés nous pourrions obtenir
beaucoup plus en faisant du lobbying et en développant des contacts
nationaux et internationaux.
Ittijah - Union des Associations de Communautés Arabes
Ittijah est une organisation regroupant des organisations non
gouvernementales ( ONG) en Israel. Ittijah lutte pour renforcer les
droits des citoyens Arabes Palestiniens en Israel , pour promouvoir
le développement de la société civile palestinienne et soutenir
des changements politiques, économiques et sociaux.
Traduction de la Lettre d'information N° 16
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Source
: Ittijah |
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Traduction
: MDB
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