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Le plan de désengagement, arrière plan et conséquences Dr. Mahmoud Muharib 12 août 2005
Sharon peut être considéré comme le dirigeant israélien dont les idées,
les opinions politiques et la politique que doit suivre Israël pour réaliser
ses buts, sont les plus clairement exprimées. Depuis qu'il est arrivé
au pouvoir en Israël, il a affirmé que le temps n'est pas encore venu
pour un traité de paix global avec les Palestiniens. Il a proposé une
solution par étapes, de longue durée, pouvant s'étirer sur une décennie
et demi, et a essayé d'imposer cette solution au peuple palestinien.
Sharon a fait face, comme d'autres premiers ministres qui l'avaient précédé,
à une difficulté fondamentale qu'Israël n'a pu résoudre depuis
l'occupation des terres palestiniennes en 1967 jusqu'à maintenant.
Cette difficulté permanente est issue de la contradiction entre
l'exigence sioniste d'annexion d'une part, et la protection d'Israël en
tant qu'Etat Juif, d'autre part. L'annexion des terres palestiniennes
occupées supprime, sur le terrain, Israël en tant qu'Etat Juif et le
transforme, de fait, en un Etat bi-national, où le nombre des Arabes
Palestiniens augmente dans une grande proportion, pour devenir une
majorité de taille. Quant au retrait des territoires occupés, il est
en opposition avec l'idéologie sioniste.
Pour appliquer sa conviction basée sur le refus du retrait jusqu'aux
frontières du 4 juin 1967, et sachant la gravité ce que les sionistes
appellent "le danger démographique", Sharon a essayé
d'instaurer un système d'apartheid dans la Palestine historique. Selon
sa vision, Israël se retirerait de l'intérieur de la bande de Gaza et
de 42% des terres palestiniennes occupées en 1967. En contrepartie,
Israël annexerait les terres palestiniennes sur lesquelles il a
construit des colonies, et annexerait ce qu'il pourra d'autres régions
de la Cisjordanie.
Plusieurs facteurs ont contribué à influer sur Sharon pour établir
son plan, les plus importants étant qu'Israël ne doive affronter une
situation où la communauté palestinienne ne lui impose une solution,
comme la feuille de route, ou l'initiative arabe ou d'autres
initiatives. Ensuite, Israël a échoué à briser la volonté du peuple
palestinien et l'Intifada s'est poursuivie, avec ce que cela peut avoir
de conséquences à court et moyen terme sur Israël, et troisièmement,
la crainte de Sharon de ce que le crédo sioniste appelle "le
danger démographique".
Ce plan est venu dans un cadre stratégique de Sharon essayant d'annuler
tous les accords précédents, de détruire la volonté du peuple
palestinien, de le mettre à genoux et de changer sa direction, de
stopper la résistance palestinienne dans ses deux formes, armée et
populaire et d'intensifier la colonisation en Cisjordanie.
Plusieurs facteurs ont contribué à la réussite du plan de Sharon
consistant à geler la feuille de route et faire de son plan "le
seul jeu possible" dans la ville, ce sont :
1 - les relations étroites et spéciales d'Israël avec les Etats-Unis,
dans un monde unipolaire conduit par les Etats-Unis.
2 - La situation de faiblesse arabe et l'accentuation des conflits
structurels arabes, comme la course entre les régimes arabes pour se
rapprocher de la direction américaine et obtenir sa bénédiction et
son amitié.
3 - L'absence d'une opposition israélienne en Israël hors du Likoud et
de la droite extrémiste israélienne, la gauche sioniste ayant adopté
sans retenue le plan de Sharon, et sans proposer une autre vision pour
laquelle il se mobiliserait.
4 - L'absence de stratégie de lutte palestinienne unique où les
Palestiniens se mettraient d'accord sur un but à réaliser, où les
moyens de lutte seraient définis pour réaliser ce but.
Il était supposé que le plan de désengagement unilatéral soit rejeté
par ceux qui ont proposé la feuille de route, que ce soit l'Europe ou
les pays arabes, et il semble que cela n'a pas eu lieu. Après une
courte période d'hésitation, Washington a commencé de longues négociations
avec Sharon sur son plan, et très vite, les négociations ont tourné
sur le prix que paierait l'administration américaine à la partie qui gèlerait
son plan, le plan de la feuille de route, et le mettrait sur les étagères,
en proposant un autre qui lui soit opposé.
Il est paradoxal que la principale entrave au plan de désengagement ait
été représentée par l'opposition importante et efficace à l'intérieur
de l'Etat d'Israël, et notamment à l'intérieur du Likoud et de la
droite extrémiste israélienne. Dans le cadre de l'adoption de son
plan, sur le plan international et régional, il ne restait à Sharon
que de le faire adopter par plusieurs paliers, le centre du parti
Likoud, l'alliance du parti Likoud à la knesset, le gouvernement israélien
et la Knesset. A chaque étape de ce plan et l'accentiaution de la lutte
entre les adeptes et les opposants au plan, Sharon renforçait sa
position sur les plan régional et international, en tant qu'homme de
"paix", et non en tant que criminel de guerre. De plus, à
plusieurs moments, certains Etats et notamment les Etats-Unis et
d'autres Etats de la région, ont contribué à faire adopter le plan au
niveau israélien.
Le message des garanties américaines
Les négociations israélo-américaines se sont focalisées
principalement sur les contenus du message des garanties américaines.
Israël a réussi à obtenir une réalisation historique importante qui
a dépassé toutes les attentes, y compris les attentes israéliennes.
Le président américain George Bush a accepté, dans ce message envoyé
au premier ministre israélien, sous la forme d'un communiqué présidentiel, la
plupart sinon toutes les demandes israéliennes. Nous pouvons résumer les
points essentiels du message des garanties ainsi :
- le message des garanties a adopté le plan de désengagement unilatéral,
le mettant à la tête de l'agenda politique pour de longues années. Il
en a fait, pratiquement, sinon officiellement, le seul
plan opérationnel sur la scène, et le seul plan imposé à toutes les
parties, locales, régionales et internationales, pour faire avec.
Ainsi, la feuille de route a été gelée, devenant une momie qui dégage
un état d'âme pour empêcher toute autre proposition. Le président américain
s'est engagé sur le fait que les Etats-Unis fourniraient tous les
efforts pour empêcher toute tentative venant de qui que ce soit, pour
imposer un autre plan.
- Le sujet du "terrorisme" et de la "lutte contre le
terrorisme" a occupé la première place, au lieu de l'occupation
et l'effort fait pour y mettre fin. Dans le message des garanties, on
lit que "la direction palestinienne doit être ferme envers les
actes terroristes, y compris envers les opérations effectives et
permanentes afin de mettre fin au terrorisme et démanteler son
infrastructure et ses capacités". Afin de ne pas laisser la place
à la discussion sur le sens du mot "terrorisme", et la différence
entre ce mot et la résistance armée, le message a insisté sur le fait
que "les Palestiniens doivent stopper toutes les opérations
militaires et toutes formes de violence envers les Israéliens, en tout
lieu". Ainsi, le message a insisté sur le fait que "ni les
Israéliens ni les Palestiniens ne jouiront de la sécurité s'ils ne se
rassemblent pas, avec les autres Etats de la région, pour unir leurs
efforts pour combattre le terrorism e et démanteler les organisations
terroristes".
- Bush s'est engagé que dans toute solution pacifique, il faudrait
qu'"Israël ait des frontières sûres et reconnues, qui soient
issues de négociations entre les parties, en s'appuyant sur les décisions
du conseil de sécurité 242 et 338, à la lumière des nouvelles réalités
sur le terrain et notamment la présence d'agglomérations israéliennes
habitées importantes et effectives. Il ne faut pas s'attendre à ce que
les négociations pour une solution durable aboutissent au retour entier
et global jusqu'aux lignes d'armistice de 1949". George Bush a
justifié sa position en disant "tous les efforts des négociations
précédentes pour trouver une solution sur la base de deux Etats ont
abouti au même résultat".
Bush a refusé dans son communiqué présidentiel le droit au retour des
réfugiés palestiniens à leurs terres à l'intérieur des frontières
d'Israël. Il a entièrement adopté la position israélienne de façon
claire et manifeste, où il a déclaré : les Etats-Unis sont fortement
engagés pour la sécurité et le bien-être d'Israël, en
tant qu'Etat Juif". Concernant la judaïté de l'Etat d'Israël,
Bush a déclaré "qu'il est clair que dans le cadre d'une solution
négociée, juste et réaliste de la question des réfugiés
palestiniens, en tant que partie de toute solution durable, cette
solution sera réalisée par la création d'un Etat palestinien où
seront installés les réfugiés palestiniens, et non pas en Israël".
- Le communiqué présidentiel ne s'est pas opposé à la construction
du mur de la séparation et a adopté la promesse du gouvernement israélien
disant que "le mur sera sécuritaire, au lieu d'être politique, il
sera momentané au lieu d'être permanent, et qu'il n'occasionnera pas
de dommages sur la situation définitive, y compris sur les frontières
définitives".
- Le communiqué présidentiel a inclus la demande qu'Israël ait des
frontières sûres et reconnues, "des frontières assurant la
capacité de les défendre", et c'est la première fois que les
Etats-Unis adoptent une telle formule.
Document du désengagement unilatéral
Le document du désengagement est paru sous la forme d'une lettre adressée
par Sharon à Bush le 14 avril 2004. Sharon affirme, dans son préambule
que "Israël est engagé dans le processus de paix et tend à un règlement
négocié, sur la base du principe des deux Etats pour deux peuples : l'Etat
d'Israël en tant qu'Etat du peuple juif et un Etat palestinien pour le
peuple palestinien".
Sharon a justifié le désengagement unilatéral disant qu'Israël est
parvenu à la conclusion "qu'il n'y a pas de partenaire
palestinien pouvant avancer avec lui dans un processus de paix réciproque".
Il a affirmé que le plan n'est pas conditionné par une coopération
palestinienne et qu'il assurera à Israël une situation sécuritaire
meilleure. Il a clarifié qu'Israël se retirerait de la bande de Gaza
et de parties du nord de la Cisjordanie, et que "puisqu'il n'y aura
aucune colonie israélienne dans la bande de Gaza dans toute négociation
définitive, il est clair qu'en contrepartie, il restera en Judée et
Samarie (noms hébreux pour la Cisjordanie) des régions constituant une
partie de l'Etat d'Israël, y compris les colonies-villes et les régions
sécuritaires, ainsi que des lieux où Israël y voit d'autres intérêts
à la conserver". Sharon a ajouté que le plan de désengagement
"retirera le tapis dessous les prétentions adressées con tre Israël
concernant sa responsabilité envers les Palestiniens dans la bande de
Gaza". Sharon a clos son préambule en prétendant que "le
plan de désengagement ne touche pas aux accords conclus entre Israël
et les Palestiniens", et "lorsque des indices apparaîtront
que les Palestiniens sont prêts et sont capables de combattre
effectivement le terrorisme, d'exécuter les réformes selon la feuille
de route, le processus des négociations et du dialogue reprendra".
En expliquant les bases du plan, Sharon a affirmé qu'Israël évacuera
la bande de Gaza, y compris les colonies, à l'exception de la ligne
frontière entre la bande de Gaza et l'Egypte, ajoutant que lors de
l'achèvement du processus du retrat de Gaza "il n'y aura plus
aucune base pour prétendre que la bande de Gaza est une région occupée".
Concernant le redéploiement dans la Cisjordanie, Sharon a rappelé
qu'"Israël évacuera la région nord de la Samarie (les colonies
de Ganim, Kadim, Homesh et Sanour)" et "toutes les insta
llations militaires fixes dans cette région".
Concernant le mur, Sharon a affirmé qu'Israël poursuivra sa
construction selon les décisions du gouvernement et le parcours du mur
prendra en compte les considérations humanitaires.
La situation sécuritaire après l'évacuation
Après le retrait israélien de l'intérieur de la bande de Gaza, Israël
va l'encercler par terre, mer et air, selon le plan de désengagement.
Dans le document, Israël affirme qu'"il va contrôler et préserver
l'enveloppe externe terrestre, il va dominer de façon exclusive tout
l'espace aérien de Gaza, et va poursuivre des activités militaires
dans l'eespace maritime de la bande de Gaza". De plus, la bande de
Gaza, selon le plan, "doit être démilitarisé selon les accords
passés", et Israël se réserve le droit "de se défendre"
y compris en "menant des pas préventifs et de riposter" en
utilisant la force contre les dangers issus de l'intérieur de la bande
de Gaza.
En ce qui concerne la Cisjordanie, Sharon a plus d'une fois répété
"le droit d'Israël à se défendre", "à riposter",
"le droit d'utiliser la force contre les dangers issus de la région
évacuée". Pour les autres régions de la Cisjordanie, il a affirmé
que "les opérations sécuritaires en cours" se poursuivront,
et a promis en même temps qu'Israël fait en sorte de réduire les
points de contrôle dans toute la Cisjordanie.
Le plan de désengagement accorde à quatre Etats un rôle sécuritaire,
qui sont les Etats-Unis, la Grande-Bretagbne, l'Egypte et la Jordanie.
Après que ces Etats aient eu l'approbation d'Israël et après la
coordination avec Israël, il leur sera autorisé d'aider et de former
les forces de la sécurité palestinienne "en vue de combattre le
terrorisme et de préserver la sécurité générale". Le plan de désengagement
a inclus qu'il n'y ait pas de présence sécuritaire en Cisjordanie et
dans la bande de Gaza de n'importe quel Etat sans coordination avec Israël
et sans autorisation préalable d'Israël.
En ce qui concerne la région de la frontière entre la bande de Gaza et
l'Egypte, le plan affirme le maintien de la présence militaire israélienne
le long de cette frontière (l'axe philadelphia, selon la dénomination
israélienne) et indique la possibilité de l'étendre, ce qui signifie
la destruction de centaines voire de milliers de maisons palestiniennes.
Le plan n'exclue pas qu'Israël procède à l'évacuation de la région
frontalière, mais a lié cela et a posé comme condition "la
situation sécuritaire et le degré de coopération égyptienne pour créer
un autre règlement sécuritaire", ajoutant que "lorsque les
conditions d'évacuation de cette région seront assurées, Israël sera
prêt à étudier les possibilités de la construction d'un port et d'un
aéroport dans la bande de Gaza, et selon les arrangements décidés
avec Israël.
Concernant les propriétés immeubles dans les colonies israéliennes évacuées,
le plan prévoit la constitution d'une commission internationale, avec
l'accord d'Israël et des Etats-Unis, dont le rôle serait de superviser
la propriété de ces colonies et d'évaluer le montant. Le but étant
qu'Israël se réservera le droit "de réclamer la valeur économique
de ces propriétés qui resteront dans la région". Concernant les
infrastructures et les arrangements civils, le plan prévoir que
l'infrastructure de l'eau, de l'électricité, des canalisations et des
communications, qui serviraient les Palestiniens, seront maintenus,
qu'Israël autorisera que les Palestiniens soient alimentés par l'électricité,
les eaux, le gaz et autres énergies, selon les accords passés. Le plan
affirme que les arrangements économiques en cours entre Israël et les
Palestiniens resteront tels quel, ceci comprenant le déplacement des
ouvriers et des marchandises, le systèm e monéraire, les impôts, le régime
douanier, la poste et les communications.
Concernant la zone industrielle Erez, située à l'extrême nord de la
bande de Gaza, le plan pose deux conditions pour qu'elle demeure telle
quelle : prendre des mesures sécuritaires appropriées et la
reconnaissance internationale que le maintien de cette zone industrielle
sous sa forme actuelle ne sera pas considéré comme la poursuite de la
domination israélienne sur la zone". Dans tous les cas, le
gouvernement d'Israël n'a pas attendu que les conditions soient
remplis, il a décidé d'évacuer la zone industrielle et de la
transplanter vers plusieurs zones à l'intérieur d'Israël, suite à
des opérations de résistance dans la zone industrielle. En ce qui
concerne le passage Erez, situé à l'intérieur de la bande de Gaza, à
son extrême nord, le plan affirme que ce passage sera transplanté à
l'intérieur des terres de l'Etat d'Israël selon un agenda fixé.
Pour les passages internationaux, entre la bande de Gaza et l'Egypte ou
entre la Cisjordanie et la Jordanie, le plan affirm que les arrangements
en cours se maintiendront. Le plan indique qu'Israël souhaite
transplanter le passage de Rafah, situé entre la bande de Gaza et l'Egypte,
vers un point situé entre la bande de Gaza, l'Egypte et Israël, et
cela après un accord avec l'Egypte.
Concernant le délai, il est prévu d'exécuter le plan de désengagement
jusqu'à la fin de l'an 2005. Le document s'achève par le fait qu'Israël
s'attend à un large soutien au désengagement, "ce soutien vital
est nécessaire pour pousser les Palestiniens à exécuter ce qui leur
est demandé effectivement, dans la lutte contre le terrorisme et l'exécution
des réformes selon la feuille de route".
Suite à l'échec de Sharon lors du référendum à l'intérieur du
Likoud, en mai 2004, la majorité des membres participant ayant voté
contre le plan de désengagement, adressant une gifle non seulement à
Sharon mais aussi à Bush, Saeb Urayqat, l'un des principaux négociateurs
palestiniens s'est dirigé vers Bush et lui a demandé de revenir sur
son message de garanties. Dans sa réponse à cette demande, le
porte-parole de la maison blanche a affurmé que l'administration américaine
ne changera pas son opinion suite au vote à l'intérieur du Likoud. Le
porte-parole de la Maison blanche a ajouté que l'administration américaine
mènera des consultations avec le premier ministre israélien pour étudier
comment poursuivre le processus. Et effectivement, Condoliza Rice a eu
des consultations avec les responsables israéliens, ce qui a décidé
la Maison Blanche à poursuivre son soutien au plan.
En mai 2004, les membres du Quartet, représentant le ministre des
affaires étrangères des Etats-Unis, Colin Powell, le ministre des AE
de la Russie, la ministre des AE d'Irlande (présidente à l'époque de
l'Union européenne) et Javier Solana, responsable des relations extérieures
dans l'Union européenne, ainsi que le secrétaire général des
Nations-Unies, Kofi Anan, ont étudié le plan de désengagement. Ils
ont demandé à Israël d'exécuter le plan de désengagement comme décidé
bien qu'il gèle pour un long moment le plan du Quartet, qui est la
feuille de route. Il est ainsi devenu clair que le plan de désengagement
unilatéral n'est plus seulement un plan israélien soutenu et béni par
l'administration américaine mais il est devenu un plan soutenu par la
communauté internationale, et notamment par le Quartet auteur de la
feuille de route.
Après que le plan de désengagement soit devenu "le seul jeu dans
la villeé, les auteurs du plan de la feuille de route ont essayé de réunir
les deux opposés, en appelant Israël à exécuter le plan de désengagement
comme prélude à l'exécution du plan de la feuille de route. Il semble
que la nature du plan de désengagement unilatéral ait mis les
Etats-Unis et le Quartet dans une impasse concernant la question :
qu'est-il demandé aux Palestiniens de faire ? Le plan de désengagement
unilatéral s'appuie sur la négation des Palestiniens, et sur la
supposition que la direction palestinienne n'est pas concernée, qu'Israël
ne négociera avec aucune partie palestinienne, et qu'il va exécuter
son plan sans prendre en considération la présence d'une partie
palestinienne. Tout ceci après que l'administration américaine ait
alimenté sa pensée, il est parvenu à la nécessité d'exécuter le
plan unilatéral, comme décidé, et selon son agenda, et selon les décisions
et les méthodes israéliennes. Quant à la partie palestinienne, selon
la vision américaine, il devra accepter ce plan car sinon, il ne pourra
pas parvenir à la feuille de route. Il lui faut coordonner avec Israël
les mesures exécutives. L'administration américaine a justifié son
heurt de la "sacralité" du caractère unilatéral en disant
qu'elle craignait un retrait israélien unilatéral, sans coordination
avec l'Autorité palstinienne pouvant mener à une anarchie dans les
territoires ayant été évacués, ou que cela amènera à la mainmise
de Hamas sur ces territoires. Par rapport à cette conception américaine,
l'administration américaine a affirmé que la coordination avec
l'Autorité palestinienne permettra à cette dernière de se préparer
de manière appropriée et suffisante pour recevoir la responsabilité
sur les territoires desquels se retirerait Israël.
Dans une tentative d'aller au-devant de la décision de la cour
internationale de justice à propos du mur de la séparation qui aétait
prévue en juillet 2004, la cour suprême israélienne a décidé que la
construction du mur, en tant que principe, est légal, prétextant des
besoins sécuritaires israéliens, mais elle a décidé en même temps,
en plus des considérations sécuritaires, qu'il était nécessaire de définir
le tracé du mur en prenant en compte les besoins humanitaires
palestiniens. Sur cette base, la cour suprême a décidé que le
ministre de la défense israélienne devra définir le tracé du mur en
fonction de ces deux critères.
En contrepartie de la décision de la cour suprême israélienne, dont
les décisions sont généralement influencées par la politique israélienne
et les besoins de l'institution sécuritaire, la décision de la
cour internationale de justice de La Haye est venu clair et décisif, où
a été décidé que le mur de la séparation n'est pas légal et qu'il
faut le détruire et le supprimer, et payer des compensations aux
victimes.
La veille et après la promulgation de la décision de la cour
internationale de justice, Israël et l'administration américaine ont
poursuivi leur coordination d'abord pour influer sur la décision même,
ensuite pour éviter ses conséquences légales et politiques, après sa
promulgation. Le 12 juillet 2004, deux responsables américains arrivent
en Israël et rencontrent Weisglasse lors de leur arrivée, puis
rencontrent Sharon, Mofaz, Moshe Yalon et le directeur de la Shabak, le
lendemain, ainisi que le conseiller à la sécurité nationale. Les
pourparlers abordent plusieurs questions dont celle de la coordination
entre les deux Etats par rapport à la décision de la cour
internationale de justice contre le mur, la lenteur avec laquelle Israël
évacue les colonies "sauvages", la question du gel de la
colonisation en Cisjordanie et les développement du désengagement.
La politique suivie par l'administration américaine concernant la
colonisation s'appuie sur l'attitude américaine sur le maintien d'une réserve
de terres pour l'Etat palestinien qu'il est prévu de former selon la
vision de Bush. Pour cela, l'adminitration américaine a demandé à
Israël de geler la construction des colonies et de supprimer les
colonies dites sauvages. De son côté, Sharon s'est engagé à ne pas
étendre la construction dans les colonies hors des limites des terres déjà
construites, et a accepté de négocier avec les Etats-Unis sur la
construction des colonies, s'appuyant non seulement sur la revendication
traditionnelle d'Israël affirmant qu'il n'est pas possible de geler la
construction dans les colonies à cause de l'augmentation naturelle de
la population, mais il s'est mis à expliquer les garanties américaines,
parues dans le message de Bush, qui dit que la délimitation des frontières
d'Israël et de l'Etat palestinien pou r une solution finale prendra en
compte les nouvelles réalités sur le terrain, y compris la présence
"de grandes agglomérations habitées israélienes". Sharon a
expliqué cela disant qu'il s'agit d'une reconnaissance américaine
future pour l'annexion des grands blocs de colonisation à Israël. Sur
la base de ses conclusions, il s'attendait, et c'est ce qui est arrivé
effectivement, que l'administration américaine soit plus compréhensive
et souple lorsqu'elle aborde la question de la construction dans les
"grandes agglomérations habitées israéliennes".
Le plan de désengagement selon ses auteurs
En octobre 2004, l'architecte du plan de désengagement et de la
coordination israélo-américaine relatives à ce plan, a dévoilà à
Haaretz ses buts. Weisglass a déclaré que le but du plan est de faire
face aux plans politiques proposés afin de les geler, pour poser la
question du terrorisme en tant que problème essentiel, pour matérialiser
la vision israélienne sur l'absence d'un partenaire palestinien, et
stopper les "concessions" israéliennes. Répondant à la
question de savoir quelle est l'importance de l'idée du désengagement,
il dit : le désengagement est... une bouteille de formol dans laquelle
on y rentre la tête du président afin qu'elle se fige pendant un long
moment. Le désengagement est en réalité du formol. C'est une
injection de formol nécessaire afin qu'il n'y ait pas de processus de
paix avec les Palestiniens... Il permet à Israël de rester debout à
l'aide pendant une période au cours de laquelle seront écartées
autant que possible toutes les pressions politiques. Il accorde
une légalité à nos déclarations qu'il n'est pas possible de négocier
avec les Palestiniens. Il y a ici une décision de faire le minimum réclamé
pour maintenir notre situation politique, et cette décision se
confirme. Les Américains peuvent s'adresser au monde qui proteste et
leur dire : que vouslez-vous ? Que voulez-vous ? Comme elle oblige le
monde à agir selon notre idée à nous, avec le scénario que nous
avons écrit. Elle pose les Palestiniens sous une énorme pression. Elle
les place dans un coin où ils détestent être mis."
Résumé
Plusieurs facteurs ont contribué à influencer sur le premier ministre
israélien pour qu'il propose le plan de désengagement unilatéral, les
principaux étant :
- Crainte qu'Israël ne doive faire face à une situation où la
communauté internationale lui impose une solution représentée par la
feuille de route.
- Echec d'Israël à détruire la volonté du peuple palestinien, la
poursuite de l'Intifada et des conséquences néfastes sur Israël.
- Crainte de Sharon de ce qui se nomme le "danger démographique".
Le plan de désengagement unilatéral s'accorde avec la stratégie de
Sharon visant à fonder un régime d'apartheid sur les terres
palestiniennes, où Israël démantèle l'occupation et la colonisation
à l'intérieur de la bande de Gaza pour le construire et le renforcer
en Cisjordanie occupée. Sharon vise à annexer les terres
palestiniennes sur lesquelles ont été construits des blocs de
colonies, à Israël, et annexer ce qu'il peut des terres palestiniennes
relativement peu peuplées.
Pour réaliser ce but, Sharon a accordé une importance cruciale à ses
relations avec les Etats-Unis où il a coordonné tout pas avec celui
des Etats-Unis. Dans le cadre de cette relation, au vu, au su et avec la
protection des Etats-Unis, le gouvernement israélin a commencé par exécuter
une politique d'agression visant, sur le terrain, à construire un système
d'apartheid qui se concrétise par la construction d'un mur, le
renforcement de la colonisation, l'augmentation de la colonisation
"sauvage", la construction de routes pour l'utilisation des
colons, l'encerclement des Palestiniens, les privant d'utiliser ces
routes et en détruisant leurs maisons.
Plusieurs facteurs ont contribué au succès de Sharon en gelant la
feuille de route, en faisant de son plan "le seul jeu autorisé
dans la ville", les plus importants étant : la relation d'Israël
avec les Etats-Unis, la faiblesse arabe, l'absence d'une opposition véritable
à Sharon hormis à l'intérieur de son parti, l'absence d'une stratégie
palestinienne de lutte unie qui s'accorde sur un but auquel tendraient
les Palestiniens, et sur les moyens de la lutte qu'il faudrait utiliser
pour réaliser ce but.
Dans le cadre d'une approbation du plan de Sharon, sur le plan
international et régional, il ne lui reste qu'à la faire passer et à
l'exécuter, sur le plan israélien. Il ne semble pas réaliste de
considérer que l'opposition israélienne à ce plan puisse l'empêcher
ou le retarder, dans les semaines qui viennent.
Traduit par : Centre d'Information sur la Résistance en Palestine
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