AFPS Nord Pas-de-Calais CSPP

   

 

Routes interdites : le régime discriminatoire des routes en Cisjordanie
 

B'Tselem. 12 août 2004.

Le rapport de B'Tselem se penche sur un des éléments primordial, quoique moins connu, concernant les restrictions de déplacements des palestiniens dans les territoires occupés : l'interdiction pour les palestiniens de voyager sur certaines routes en Cisjordanie

Le régime de routes interdites est une politique risquée en partie parce que les règles n'ont jamais été écrites : ni dans la législation de la Knesset, ni lors des décisions prises sur l'échelon politique, ni dans les directives militaires, ni dans les communiqués de presse, ni même sur les panneaux de signalisation pour prévenir les palestiniens que leur déplacement sur une route est interdite ou restreinte. Le régime est basé sur des ordres verbaux donnés aux soldats et dans les pratiques utilisées par l'armée en Cisjordanie depuis le début de la présente Intifada.

 

Les routes interdites

L'enquête de B'Tselem montre que les routes assujetties à ce régime peuvent être classifiées en trois catégories basées sur la sévérité des restrictions concernant les déplacements des palestiniens sur ces routes : totalement interdites, partiellement interdites, et utilisation restreinte de ces routes.

 Routes totalement interdites- La première catégorie comprend les routes réservées exclusivement aux citoyens israéliens. Cela comprend ce que l'armée appelle « des routes stériles » où l'interdiction envers les déplacements palestiniens est explicite et évidente : Israël place un check-point occupé par des soldats qui n'autorisent que le passage des seuls véhicules israéliens. Cette catégorie comprend aussi des routes sur lesquels les déplacements ne sont pas possibles, ou inutiles, parce que les routes d'accès menant ou partant de villages palestiniens sont bloquées.

 Routes partiellement interdites- La deuxième catégorie comprend des routes sur les quelles les palestiniens ont le droit de voyager s'ils ont des permis spéciaux délivrés par l'Administration Civile ou si les cartes d'identité du chauffeur et des passagers indiquent qu'ils résident dans des villages qui dépendent entièrement de la route sur laquelle ils se déplacent.

 Utilisation restreinte des routes- La troisième catégorie comprend des routes sur lesquelles les véhicules palestiniens ont le droit de circuler sans permis spécial mais l'accès à ces routes est restreint à cause de blocs de béton et autres obstacles. Dans la plupart des cas, un chauffeur qui veut accéder à cette route doit aller à une intersection ou des soldats vérifient les véhicules et les personnes qui veulent utiliser la route.

Le régime des routes est imposé à travers une variété de moyens : un renforcement agressif et discriminatoire des lois sur le trafic contre les seuls palestiniens, des délais prolongés des palestiniens et la confiscation de leurs véhicules sans autre forme de procès. Il en résulte que beaucoup de chauffeurs palestiniens s'abstiennent d'utiliser ces routes malgré le fait qu'elles leur soient ouvertes.

 

Délivrance de permis

L'Administration civils et les bureaux de Liaison Civile de District (DCLs) sont les offices qui délivrent aux palestiniens les permis dont ils ont besoin pour se déplacer sur les différents routes. Cette bureaucratie manque de transparence et se comporte d'une manière arbitraire patente. Il n'y a pas de critères fixes pour accorder ou refuser les demandes de permis et ainsi la décision est à la seule discrétion du personnel du DCL.

De même, l'avis de refus est donné verbalement et sans explication. Les demandes de palestiniens qui sont considérés comme « prévenus pour des raisons de sécurité » sont automatiquement refusées. Seul le Service Général de Sécurité (GSS) peut annuler ce motif de rejet. Le GSS exploite donc les besoins de permis de ces candidats et fait pression sur eux pour qu'ils servent de collaborateurs.

 

Perturbation de tous les aspects de la vie

Le régime des routes interdites a forcé les palestiniens de Cisjordanie à prendre des routes longues et sinueuses plutôt que des routes qui mènent directement d'une ville ou d'un district à un autre. Le déplacement sur ces routes alternatives perturbe tous les aspects de la vie quotidienne en Cisjordanie que ce soit au niveau de l'économie, de la santé et de l'éducation et affecte gravement la vie sociale et familiale. De plus, les palestiniens souffrent de l'insulte et de l'humiliation inhérents aux mesures utilisées par les forces de sécurité israéliennes pour appliquer le régime discriminatoire des routes.

Israël a construit un réseau de routes étendu afin de servir les colonies israéliennes. Pour justifier du fait d'avoir exproprié des terres appartenant à des palestiniens pour ces routes, Israël a soutenu que les routes bénéficieraient aussi à la population palestinienne. Aujourd'hui ces routes sont totalement hors accès pour les palestiniens.

Israël prétend que les restrictions sur les déplacements des palestiniens sur ces routes résultent de considérations impératives de sécurité et non de motivations racistes. En effet, depuis l'éruption de l'Intifada en septembre 2000, il y a eu une augmentation d'attaques d'organisations palestiniennes contre des civils israéliens à l'intérieur d'Israël et dans les territoires occupés. Plus de 600 civils israéliens dont 100 mineurs, ont été tués. Les attaques visant des civils violent les normes fondamentales légales et morales et constituent selon la loi humanitaire, des crimes de guerre. Les attaques sont injustifiables en dépit des circonstances. Non seulement Israël a le droit de prendre des mesures pour défendre ses citoyens contre de telles attaques, mais elle doit le faire. Néanmoins, ses actions doivent se conformer à la loi israélienne et internationale.

Le régime des routes enfreint les droits des palestiniens à la liberté de mouvement et au droit à l'égalité. Israël est donc en infraction vis-à-vis des principes fondamentaux de la loi internationale définis dans les traités qu'Israël a signé comme la Convention Internationale sur les Droits Civils et Politiques, la Convention sur l'Elimination de Toutes Formes de Racisme et la Quatrième Convention de Genève.

 

Discrimination basée sur la séparation : une pratique d'apartheid

Le régime des routes, qui est basée sur la séparation au moyen de la discrimination, comporte clairement des similitudes avec le régime raciste de l'apartheid qui existait en Afrique du Sud jusqu'en 1994. L'origine nationale d'un individu détermine son droit d'utiliser différentes routes. Cette politique est basée sur une idée raciste : que tous les palestiniens représentent un risque pour la sécurité et qu'il est donc justifié de restreindre leur mouvement. Et ainsi cette politique fait du mal arbitrairement à toute la population palestinienne, en violation de leurs droits humains et de la loi internationale.

B'Tselem demande que le gouvernement d'Israël mette fin immédiatement au régime des routes interdites et qu'il respecte les droits des palestiniens à la liberté de mouvement sur toutes les routes de Cisjordanie.

 

B'Tselem = le Centre  israélien  d'Information des Droits d'Homme dans les territoires occupés. 

Source: IPC

Retour - Ressources  - Accueil