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Leila Shahid : “La guerre est aussi économique”

La représentante palestinienne, récemment de passage à Lyon, apporte un éclairage moins connu du conflit israëlo-palestinien : la guerre économique.
15 mai. C’est le jour de la commémoration de la ”nakba”, ”le jour de la disparition de la Palestine des cartes, de la surface de la terre et du vocabulaire. Le jour de la confiscation des terres”, traduit Leïla Shahid. Ce jour là, invitée de l’Institut Aspen à Lyon, la Déléguée de l’Autorité Palestinienne en France déplore ”la disparition de toute négociation politique”. Parce que le gouvernement israélien a choisi la guerre, explique-t-elle. Avec des fusils, des chars et des missiles, mais pas seulement. ”Le prix de la guerre économique menée par le gouvernement israélien depuis 8 mois n’est pas moins tragique que les 500 morts et les 12 000 blessés Palestiniens, estime-t-elle. Entre 1994 et 1999, l’Autorité palestinienne (...) a essayé de mettre en place les éléments constitutifs d’une économie nationale qui ne soit plus à 100 % dépendante d’Israël. Mais ce redécollage ne peut avoir lieu : la restriction des mouvements physiques aux frontières extérieures des territoires autonomes mais aussi entre villes de ces territoires (la Cisjordanie est divisée en 64 cantons, Gaza en 4, tous séparés par des barrages militaires) empêche la circulation des hommes, des commodités et des capitaux. Nous ne pouvons importer ou exporter : l’aéroport est fermé et le projet de port, dans lequel sont impliqués la France et les Pays Bas aux côté de la Banque Européenne, est gelé”.
Résultat : l’économie palestinienne naissante aurait déjà perdu 3,5 milliards de dollars en 8 mois soit, notamment, la perte sèche des revenus des 120 000 travailleurs palestiniens qui travaillent en Israël et des 150 000 employés dans les territoires; mais aussi le non reversement à l’Autorité Palestinienne, par Israël, de la taxe prélevée à l’importation (50 millions de dollars) de marchandises. ”Il nous faudrait déjà 5 ans pour récupérer le niveau de septembre 2000”, considère Leïla Shahid qui rappelle que la Palestine était, pour Israël, un point d’exportation fort (2 milliards de shekels/an) qui lui fournissait en outre une main d’œuvre bon marché. Aujourd’hui, elle annonce un taux de chômage de 48 % de la population active et un tiers de la population (80 % dans la bande de Gaza) vivant en dessous du seuil de pauvreté (2$ / pers. / jour). ”Les chars rentrent en Cisjordanie pas pour tirer -ils pourraient le faire d’où ils sont- mais pour détruire les serres. Quant aux zones économiques que nous avions créées aux frontières afin qu’elles puissent employer la main d’œuvre palestinienne et intéresser les investisseurs israéliens, elles sont paralysées. Idem pour les initiatives conduites par la diaspora palestinienne en matière d’hôtellerie, d’agro-alimentaire, de téléphonie... L’Union Européenne nous a aidés, sans atteindre les résultats prévus : elle sait maintenant qu’avant de parler d’investissements économiques, il faut assurer un minimum de normalisation israélo-palestinienne et lever cette menace perpétuelle de bouclage des territoires sous prétexte de sécurité : il s’agit en fait d’un châtiment collectif par la guerre économique”. Une guerre conduite par Ariel Sharon qu’elle fustige. ”Palestiniens et Israéliens sont comme les deux revers d’une même médaille, frères siamois : je ne vois pas d’autre issue que la coexistence. A long terme, nous n’avons d’autre choix que de faire la paix. La seule question est : combien de temps faudra-t-il perdre encore ?
 
Source: http://www.brefonline.com/numeroERA_affichearticle.asp?idA=661

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