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Ahmed, le Gazaoui ! Par Ziad Medoukh Ce poème est
un hommage à Ahmed, un jeune gazaoui du camp de Jabalya,
tué par des balles israéliennes en pleine trêve Une douce matinée
printanière réveille le camp de réfugiés. Les premières lueurs de
l’aube bleue, les gazouillis d’oiseaux Le petit matin trace un
trait rouge qui s’étire sur la ligne de l’horizon. Maison aux murs de pierres
millénaires. L’odeur généreuse du café
noir de sa mère mélangé au Parfum doucereux de la
cardamome le réveille. Ahmed ouvre l’étroite
fenêtre, il observe Les premières fraîcheurs
annonciatrices du matin. Quinze longues années de
précarité, d’attente, de vie entre parenthèses, Réfugiés à moins de cent
kilomètres de son village d’origine, Quinze longues années à
subir davantage de restrictions et d’humiliations, Les ultimes larmes de son
cœur, puisées dans les tréfonds de son malheur. Des années que ça dure. Les yeux d’Ahmed sont
hypnotisés par ces adversaires insaisissables Ils s’engouffrent dans la
pièce étroite partagée avec tant de ses frères Loin des désillusions et de
la fatalité qui s’installent dans L’esprit collectif des
réfugiés. Seule la flamme de l’espoir
l’a maintenu en vie Un rayon du
soleil réchauffe l’atmosphère fraiche de la matinée, En attendant des jours
meilleurs, Espoir réduit en poussière. Dans une impasse étroite d
camp, Les immeubles disgracieux
des quartiers alentours, Entassés les uns contre les
autres, Des rues et des maisons
entières englouties Par des monstres affamés, Entouré d’une
infranchissable barrière métallique de sécurité, Hérissée de miradors L’armée a crée un
gigantesque no man’s land de plusieurs centaines de mètres. Il se dirige vers les
ruelles du camp Sous les regards brûlants
des martyrs Figés dans leur héroïque
éternité Sur les grandes affiches
qui surplombent les rues. Agé de quinze ans, il est
devenu adulte d’un seul coup Brusquement, sans
transition, Eloigné des habitudes
d’adolescent. En fait, on agrandit vite
en Palestine. Un silence parfait,
cristallin, étouffant, envahit les alentours. Il prend dans sa main moite
la main malingre de sa mère. Il voit les longs nuages de
poussières soulevés par Les déplacements des
blindés israéliens. Des coups de feu crépitent
au loin Un gigantesque bulldozer
vient de commencer sa macabre besogne : Ecraser l’olivier, le
symbole de la paix, Le déraciner, le renverser,
l’étouffer et l’enterrer Le désespoir est à son
comble. Les murs et les fenêtres
tremblent un instant. Ses yeux vagabondent vers
les citronniers et les oliviers du jardin Touchés par les tirs. Ces arbres s’accrochent Aux bras de leurs racines Comme le nouveau-né Au ventre maternel. Son cœur est transpercé
d’une fine pointe d’angoisse, Angoisse de plus en plus
oppressante. Les soldats postés dans les
miradors ouvrent le feu. Ahmed est déjà par terre Son sang transperce l’abîme Victime d’un sniper qui
vide toutes les balles De son chargeur dans le
corps inerte de l’adolescent, Sans raison et sans
précipitation, Avec la précision d’un
horloger. Un corps ravagé,
déchiqueté, outragé Par la haine d’un barbare Caché derrière un mirador
dans son mans s’land. Un sifflement strident qui
s’atténue… Il esquisse un sourire Confusion des sens, Valse de souvenirs, Tourbillons d’émotions, Des heures au parfum
d’infini Il lève les yeux au ciel. Quelle honte et quelle
lâcheté ! Dix balles pour abattre une
simple branche d’olivier, Pour tuer un jeune
innocent, Pour anéantir une fleur de
jasmin Une plante de
lumière ! La lumière de la vie, La lumière de Gaza, La lumière de la Palestine, La lumière de la paix ! La lumière de l’espoir. |