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16 juillet 2014 Le compte à rebours
avant la prochaine confrontation a déjà commencé Par Benjamin
Barthe "
Pluies d'été " en 2006, " Plomb durci " en 2008-2009, "
Pilier de défense " en 2012, " Bordure de protection " en 2014
: l'histoire des relations entre Israël et Gaza, depuis que les colons juifs
ont été évacués de ce petit territoire côtier en 2005, semble se résumer à
une succession d'opérations militaires. A peine un cycle de violences se
termine-t-il qu'un nouvel épisode semble en préparation. A
qui la faute ? Chacun des protagonistes défend son bon droit, son récit des
origines, donnant le tournis aux observateurs. La confusion du public est
entretenue par les réactions des chancelleries occidentales. Quand elles ne
versent pas dans un soutien quasi explicite à l'opération militaire
israélienne, celles-ci se cantonnent à un parallélisme scrupuleux. Insensiblement
s'impose l'idée qu'Israéliens et Palestiniens sont prisonniers d'une moderne
loi du talion. Un atavisme archaïque qui les inciterait à s'étriper à
intervalles réguliers. Et dispenserait donc la communauté internationale de
toute responsabilité. Pour
échapper à ce fatalisme, il faut raconter une autre histoire. L'occupation de
la bande de Gaza, contrairement à ce qu'affirme Israël, n'a pas pris fin avec
le départ du dernier de ses soldats, le 11 septembre 2005. Comme le rappelle
opportunément l'ONG israélienne Gisha sur son site
Internet, l'Etat hébreu continue de contrôler des pans entiers de la vie des Gazaouis : le registre d'état civil, les eaux
territoriales, l'espace aérien et l'unique terminal commercial. L'armée
israélienne interdit à la quasi-totalité des habitants de se rendre en
Cisjordanie, en violation des accords d'Oslo, qui faisaient des deux
territoires palestiniens une seule et même entité juridique. Les habitants de
l'enclave sablonneuse n'ont pas non plus le droit de pénétrer dans la "
zone tampon ", bande de 500 m à 1 km de large le long de la frontière
avec Israël, où ils possèdent souvent des terres agricoles. Ceux qui s'y
risquent se font systématiquement tirer dessus. L'anthropologue
Jeff Halper, figure du camp de la paix israélien,
use d'une métaphore carcérale pour résumer l'effet paradoxal du désengagement
de 2005 : " Dans une prison aussi, les détenus contrôlent l'essentiel
de l'espace, aime-t-il à dire. Ils ne sont pas libres pour autant. " De
cet état de fait, la plupart des experts en droit international ont conclu
que la bande de Gaza est toujours sous occupation. C'est la position
officielle des Nations unies. Un tel statut requiert de l'occupant qu'il
assure le " bien-être " de la population occupée. Mais à ces
obligations, Israël s'est constamment soustrait. Grâce au renfort de l'Egypte
du maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, farouchement
hostile au Hamas, et à l'apathie de la communauté internationale, le bouclage
de Gaza s'est même aggravé. Selon le bureau des statistiques palestinien, le
taux de chômage pour les jeunes de 15 à 29 ans y a atteint 58 % durant le
premier semestre de cette année. 70 % de la population dépend des
distributions d'aide humanitaire pour sa survie. Les
éruptions de violence de 2006, 2008, 2012 et 2014 étaient toutes, directement
ou indirectement, liées à l'enfermement des Gazaouis.
Un état qui ne remonte pas à l'élection du Hamas, en 2006, mais à la première
guerre du Golfe en 1991. C'est à cette date, avant le début des attentats-
suicides, que les Palestiniens de Gaza ont perdu le droit de circuler
librement. Toutes
les trêves négociées par le passé ont comporté des clauses de levée ou d'allègement
du blocus, comme la réouverture du terminal de Rafah, avec l'Egypte, ou
l'élargissement de la zone de pêche. Et toutes ont été ignorées,
partiellement ou entièrement, par Israël et son allié égyptien. Celle qui est
en cours d'élaboration ne fera pas exception. Le
Hamas a sa part de responsabilité. Il a lui aussi violé les accords de
cessez-le-feu, en important, via les tunnels de Rafah, tout un arsenal de
missiles iraniens. Plutôt que de construire des bunkers souterrains, à
l'usage exclusif de leurs responsables, les islamistes auraient mieux fait de
bâtir des abris antibombes, ouverts à leurs
administrés. Saigné par le blocus, le Hamas est tenté, à intervalles
réguliers, de redorer son blason de mouvement de " résistance " en
défiant Israël. La
seule manière de rompre ce cercle vicieux – et notamment de marginaliser le
Hamas – consiste à relancer le processus de paix. Pas un processus
d'extorsion régi par la loi du plus fort, ce à quoi la plupart des séances de
négociations des vingt dernières années ont ressemblé. Mais des pourparlers
sur un pied d'égalité, avec le droit international comme référence. Or
vendredi 11 juillet, en marge d'une conférence de presse consacrée à Gaza, le
premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, a
déclaré qu'il était catégoriquement opposé à la création d'un Etat
palestinien souverain. Un accès de franchise rare, signalé par le site
d'information Times of Israel, mais
passé sous silence dans les médias occidentaux. En l'absence d'un tel
horizon, l'armée israélienne peut déjà réfléchir au nom de code de la
prochaine opération contre Gaza. |