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DOSSIERS
PRESSE
Les
accords de Genève
Ils
ont peur
Amram Mitzna
La
Paix Maintenant (France)
16 octobre 2003
Si le chef du gouvernement choisit d'appliquer l'initiative de Genève,
il
entrera dans les annales de l'Histoire comme celui qui a fondé Israël en
tant qu'État juif et démocratique, avec accord. Cet événement sera
encore
plus important que la Déclaration d'Indépendance de 1948, car il
s'agissait
alors d'un geste unilatéral, qui n'avait été reconnu que par quelques
États
dans le monde.
L'initiative de Genève prouve qu'il existe bel et bien un partenaire de
l'autre côté, et qu'il y a une alternative au bain de sang. L'attaque
paniquée du chef du gouvernement et de ses ministres à l'encontre du
Parti
travailliste, de l'opposition et des initiateurs de ce document ne peut,
par
conséquent, être interprétée que d'une seul manière: comme de la
couardise.
Ils craignent la paix, car l'essence même de ces gens du refus, c'est la
provocation, l'intimidation et le combat. Et ils ont peur. Car désormais
nombreux sont ceux qui sont susceptibles de comprendre que durant trois
ans,
on les a trompés.
Durant trois ans, le chef du gouvernement s'est livré à un lavage de
cerveau, en faisant croire au public que seule la force pouvait apporter
la
victoire. Lui et ses amis ont fait croire «qu'il n'y avait vraiment
personne
à qui parler», que «Tsahal était en mesure de vaincre», et que si
l'on
persistait à employer la force, les Palestiniens finiraient par se
briser.
Ils ont dit aux citoyens que s'ils étaient forts, le terrorisme
cesserait.
Mais la situation n'a fait qu'empirer. Les liquidations (qui sont devenues
l'unique politique du gouvernement), non seulement n'ont pas liquidé le
terrorisme, mais menacent de liquider ce qui reste encore debout dans
notre
État. Les actes de terreur se multiplient, l'économie continue de
sombrer et
la société de se désagréger. La réalité démographique menace
l'existence
d'Israël comme État juif. Mais tout cela n'a pas poussé le gouvernement
à
essayer une autre voie.
Nous avons abouti à cette initiative de Genève après de longs mois de
dur
labeur. Bien que nul d'entre nous n'ait pensé que dès le lendemain matin
nous commencerions à appliquer cet accord, nous avons mené une guerre
sur
chaque détail, chaque centimètre, comme s'il s'agissait d'un accord réel.
C'était une guerre, mais sans morts. Nous avons transpiré, mais sans
uniformes. Nous avons mené un combat pour Jérusalem, pour le Mont du
Temple
et pour le Goush Etsion (groupe d'implantations au-delà de la Ligne
verte,
construit par les descendants et les survivants d'un groupe de kibboutzim
conquis et détruits lors de la guerre d'indépendance par la Légion
jordanienne, NdT). Nous avons combattu pour les frontières définitives
de
l'État d'Israël, pour son existence et son identité, et nous avons
obtenu de
nombreux succès.
Pour la première fois dans l'Histoire, les Palestiniens ont reconnu
publiquement et officiellement qu'Israël était l'État du peuple juif
pour
l'éternité. Ils ont renoncé au droit au retour dans les frontières de
l'État
d'Israël. Une majorité juive ferme et stable lui est ainsi garantie. Le
Mur
des lamentations, le quartier juif de Jérusalem et la tour de David
resteront entre nos mains. Le nœud coulant qui enserre Jérusalem sera
éliminé, et la chaîne d'implantations qui l'entoure, Givat Zeev, le
vieux et
le nouveau Giv'on, Maale Adoumim, Goush Etsion, Neve Yaakov, Pisgat Zeev,
la
Colline française, Ramot, Gilo et le Palais du gouverneur, feront partie
du
grand Jérusalem pour toujours. Aucun habitant de ces quartiers ne
quittera
sa maison.
Il est très facile de critiquer ces résultats, il est très facile de
faire
de la provocation, mais tout cela n'est que l'expression de la panique. Il
y
a bel et bien avec qui parler, et il est possible de transformer la réalité
dès demain matin, si seulement le gouvernement le désire. Le problème,
c'est
qu'Ariel Sharon ne veut pas aboutir à un accord, et il n'a pas le courage
qui est nécessaire aux leaders pour regarder de l'avant. Sa prise de
décision s'effectue selon des considérations politiciennes, et reflète
la
soumission aux extrémistes. Le courage du chef du gouvernement et de ses
ministres s'exprime dans leur capacité à mentir et à prétendre qu'il
n'y a
pas d'autre choix. D'ou tirent-ils cette audace d'envoyer des soldats à
la
mort dans une guerre qui n'est nullement imposée par la réalité?
L'initiative de Genève est un petit enfant qui crie que le roi est nu et
que
le gouvernement nous conduit à la catastrophe. Ses réactions furieuses
le
prouvent. Il se panique, et à juste titre. Un leader qui consciemment et
intentionnellement conduit son peuple à la guerre, et laisse couler pour
rien le sang de ces citoyens, n'est plus un chef légitime. Et
aujourd'hui,
tout le monde le comprend. Au lieu de nous expliquer pourquoi il n'a pas
agi
lui-même en vue d'obtenir un accord semblable, ce gouvernement fait de la
provocation. Il excelle en provocation. Tout comme ce fut le cas place de
Sion il y a huit ans (à Jérusalem, manifestation au cours de laquelle
furent
tenus des propos haineux envers Yitzhak Rabin, alors chef du gouvernement,
NdT). Maintenant, le gouvernement fait cela depuis sa table de réunion,
mais
les mots restent les mêmes.
L'initiative de Genève est un modèle, non un document officiel entre
gouvernements. C'est une proposition pour un accord définitif, agréé
par les
deux parties. Elle a deux particularités: elle signe la fin du conflit,
et
ne laisse subsister aucun point d'interrogation; les détails, jusqu'au
dernier, ont été réglés, et aucune partie n'a de revendication
supplémentaire à formuler. Un autre avantage est le fait que la partie
palestinienne est représentée par une direction authentique et large,
qui
bénéficie de l'appui et du soutien de l'Autorité palestinienne et des
militants de terrain.
Le gouvernement d'Israël peut se saisir de cette initiative telle quelle
et
l'appliquer demain matin, et il peut également en faire une base de
nouvelle
négociation. Le devoir du public est d'exiger du gouvernement qu'il fasse
l'une de ces deux choses. J'espère vivement que les citoyens israéliens,
qui
recevront chacun le texte de l'accord et pourront en examiner tous les
détails, ne se laisseront pas entraîner par la folle provocation de ce
gouvernement en panique, et de ceux à gauche qui soutiennent sa
politique.
L'initiative de Genève représente un tournant historique, car elle
permet
aux gouvernements, s'ils le veulent, de comprendre exactement ce que
chaque
partie est prête à concéder pour aboutir à la fin du conflit. S'ils
n'adoptent pas cet accord et ne prennent aucune initiative alternative,
nous
continuerons à vivre par le glaive. La décision est entre nos mains.
[Traduit de l'anglais par Gérard Eizenberg]
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