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DOSSIERS
PRESSE
Les
accords de Genève
Beilin
le lievre et Ayalon la tortue
par
Ron Skolnik
Haaretz,
20 octobre 2003
"Rien ne sert de courir, il faut partir a point", dit la
tortue au lièvre
dans la célèbre fable d'Ésope (1) sur les vertus de l'opiniâtreté face
au
leurre de la vitesse.
(...)
Deux projets de paix cherchent actuellement a gagner les peuples israélien
et palestinien aux compromis douloureux qu'ils devront faire si un
accord
définitif entre les deux parties doit jamais voir le jour. Bien qu'ils
se
dirigent tous deux vers la même ligne d'arrivée (plus ou moins), leur
stratégie pour y arriver sont aussi différentes que celles des
personnages
d'Ésope.
Le "lièvre" israélo-palestinien est incarne par les anciens
ministres Yossi
Beilin et Yasser Abed Rabbo, qui doivent le 4 novembre prochain révéler
en
grande pompe leur "pacte de Genève". Le projet a démarré
comme un sprint.
Heureux de cette aubaine, les médias israéliens lui ont consacre toute
leur
attention. Les journaux israéliens sont noyés d'informations sur ses
différentes clauses, les éditorialistes et les analystes louent ses
vertus
ou déplorent ses déficiences, tandis que Beilin et ses amis israéliens
travaillent au corps la télévision et la radio, accordent des
interviews,
fournissent des explications, et ripostent aux critiques émanant des
cercles
gouvernementaux.
Pendant ce temps, un autre projet marche tranquillement, une
"tortue"
israélo-palestinienne, en quelque sorte. Connu sous le nom de
"Voix des
Peuples", il est dirige par Ami Ayalon, ancien commandant en chef
du Shin
Bet, et par Sari Nusseibeh, président de l'université palestinienne
Al-Qods.
Il a moins de glamour, a genere moins de publicité, et encore moins de
pompe, mais l'approche lente et tranquille semble pour les chercheurs
de
paix israéliens et palestiniens la seule manière de pouvoir gagner un
jour.
L'approche Ayalon-Nusseibeh se fonde sur le constat que si l'on veut bâtir
un immeuble stable, il faut commencer par établir une fondation solide.
Les
deux hommes pensent que si les Israéliens et les Palestiniens peuvent
être
convaincus d'accepter le raisonnement qui est derrière les compromis
qui
font mal, ils trouveront beaucoup plus facile de tolérer lesdits
compromis.
Et donc, au lieu de concocter tous les détails entre soi, et de présenter
aux deux peuples qui n'en peuvent mais un accord clés en mains, Ayalon
et
Nusseibeh ont choisi de partir du terrain. Ils ont formule une "Déclaration
de Principes" générale, pour un accord définitif, et se sont mis a
affronter
les opinions israélienne et palestinienne en une dure entreprise de
discussion, de dialogue et de persuasion.
En juin dernier, Ayalon et Nusseibeh ont demande aux Israéliens et aux
Palestiniens de signer une pétition acceptant leur "Déclaration de
Principes". A l'heure actuelle, plus de 80.000 Israéliens et plus
de 65.000 Palestiniens l'ont fait. Le processus est long et laborieux. Du cote
israélien, le message est diffuse dans des stands de signature sur les
trottoirs, dans des soirées privées ou des petits groupes se réunissent,
et dans des conférences régionales. Les Palestiniens font du porte-à-porte.
Les
recrues se font une par une. Les organisateurs savent que cela peut
prendre
plusieurs années, mais ils sont prêts pour un long voyage.
Bien sur, les grands titres consacres au pacte de Genève ont leur
valeur.
Ils aiguisent encore plus la prise de conscience que trop de temps et
d'efforts ont été gâchés dans des initiatives de paix fondées sur des
mesures par étapes sans objectif final, qui s'embourbent dans des
discussions sans fin sur "qui fait quoi le premier".
Mais dans un Israël qui tangue de crise en crise, les grands titres
d'aujourd'hui seront vite oublies, et remplaces par le dernier
attentat, le
dernier assassinat ou la dernière crise gouvernementale.
Les médias peuvent
donner a une initiative de paix le coup de pouce final vers la ligne
d'arrivée, mais ils ne peuvent pas l'y amener. Si le progrès vers une
réconciliation entre Palestiniens et Israéliens est une course, c'est
une
course de fond et non un sprint, et les qualités requises pour vaincre
ressortent davantage de l'endurance que de la légèreté de pied. Si le
pacte
de Genève doit être plus qu'un feu de paille, ses auteurs doivent avoir
a
l'esprit la morale de la fable.
* Ron Skolnik cite Esope. Nous francophones avons la chance d'avoir eu
La
Fontaine. La citation reprend donc l'adaptation de Jean de La Fontaine.
http://www.haaretz.com/hasen/spages/351940.html
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