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DOSSIERS PRESSE

Destructions de maisons

Bref résumé de la brochure publiée par Al-Haq en 2003.

Al-HAQ  PO BOX 1413 Ramallah ,West Bank

( Rédigé et traduit par D.Mourgue)

Al-haq est une organisation palestinienne de défense des droits de l'homme située à Ramallah, membre de la Commission Internationale des Juristes, basée à Genève. Elle possède un statut consultatif auprès de Conseil Economique et Social des Nations-Unies. Son but est de protéger et promouvoir les droits de l'homme et le respect de la loi dans les Territoires palestiniens Occupés.

La brochure intitulée " La politique punitive de démolition des maisons menée par Israël en violation du droit international", rédigée par Shane Darcy examine  les bases légales auxquelles se réfère Israël pour justifier la démolition des maisons, confronte cette pratique au droit international( en particulier la 4ème Convention de Genève), donne des exemples de cas de démolitions rassemblés par les travailleurs de terrain de al-Haq et examine les décisions de la Haute Cour de Justice israélienne au regard des démolitions punitives de maisons de Palestiniens.

Note: le texte ne concerne que les démolitions commises dans les Territoires Occupés.

Introduction de la brochure.

L'occupation militaire israélienne de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza entre maintenant dans sa quatrième décennie et la litanie de violations des droits de l'homme qui ont été commises durant cette occupation est largement connue et bien documentée. Une des pratiques à la fois les plus remarquables et les plus inhumaines que l'armée a sans cesse employée depuis 1967 est la démolition de maisons palestiniennes. Plus de 9000 maisons ont été totalement détruites depuis le début de l'occupation. Les maisons ont été rasées pour créer des zones " interdites de passage" autour des colonies israéliennes illégales, le long des routes des colonies et le long de la frontière entre l'Egypte et la Bande de Gaza. Des constructions ont été détruites ou endommagées au cours d'opérations militaires. Très fréquemment, une telle destruction n'était pas justifiée par une nécessité militaire. Des milliers de maisons ont été également détruites au prétexte qu'elles avaient été bâties en  violation des lois israéliennes d'autorisation de construire. On estime qu'actuellement plusieurs milliers de maisons dans Jérusalem Est seul sont menacées de démolition.

De façon notoire, au cours de l'occupation, Israël a mis en place une politique de démolition des maisons des Palestiniens suspects, détenus ou inculpés comme une mesure punitive pour leurs crimes réels ou suspectés. Ce texte examinera la légalité d'une telle pratique, qui punit des familles entières pour une action illégale de l'un de ses membres. Ces démolitions sont ordonnées par des Commandants militaires, menées par les soldats de l'armée d'occupation et ont été de manière répétée, légalisées par l'appareil judiciaire israélien. Nous démontrerons clairement que ces démolitions constituent des actes de punition collective, expressément interdits par la loi internationale.

Il faut noter que fréquemment, les forces d'occupation israéliennes, ont démoli des maisons en réponse à des actes illégaux, bien qu'elles aient dit que ces démolitions n'étaient pas punitives mais dues à des mesures militaires ou sécuritaires. Par exemple, le 10 Janvier 2002, 60 maisons ont été entièrement détruites et 4 partiellement démolies par l'armée dans le camp de réfugiés de Rafah dans la Bande de Gaza. Six cent personnes se sont retrouvées sans abri suite à ces démolitions. Ces démolitions ont été menées le lendemain du jour où deux soldats israéliens ont été tués dans cette zone par deux tireurs.  Bien que le motif officiel  donné ait été d'une autre nature, il est clair qu'il s'agissait d'une mesure punitive. De telles démolitions sont courantes. Toutefois, ce rapport se concentrera sur les démolitions que les autorités israéliennes reconnaissent ouvertement comme punitives.

C'est une pratique courante et récurrente de l'armée d'occupation dans les Territoires Occupés Palestiniens de détruire ou condamner les maisons de personnes qui ont commis des délits ou qui sont suspectées d'en avoir commis. En particulier, les maisons des personnes qui ont mené un attentat suicide à l'intérieur d'Israël ou contre des colons ou des soldats israéliens, sont systématiquement démolies après de telles attaques. Cette politique punitive de démolition prend aussi pour cible des personnes et donc des familles pour des délits moins graves ou en cas de suspicion de délits. Par exemple, en deux jours à la fin de Novembre 2002, l'armée a démoli 8 maisons dans la région de Bethlehem: la maison d'une personne qui avait tué dans un attentat suicide 11 personnes à Jérusalem la veille; la maison d'un militant du Jihad, la maison d'un membre du Fatah, la maison d'Abdullah abu-Hadid, suspecté d'être impliqué dans des attaques avant l'opération Bouclier de Défense, la maison d'un militant de l'aile militaire du Fatah, détenu en Israël à l'époque, les maisons de deux militants du "Tanzim" et la maison d'Ibrahim Abayat, un ancien leader du Fatah, déporté à Chypre après le siège de l'église de la Nativité. L'armée a démoli les maisons de personnes impliquées dans des délits récents mais aussi de personnes suspectées d'avoir commis des attaques "anciennes", ou qui  les avait commises, et de personnes déjà détenues ou déportées.

Quand une démolition doit être menée suite à un acte illégal, un Commandant militaire émet un ordre militaire ordonnant que la maison soit démolie ou scellée. L'armée d'occupation emploie différentes méthodes pour mener ces démolitions. La plupart du temps ce sont des bulldozers qui sont utilisés mais l'armée utilise aussi des explosifs. Pour faciliter ces démolitions, un couvre-feu est généralement imposé aux habitants et des tanks et des véhicules blindés accompagnent l'unité qui mène la démolition.. Dans un certain nombre de cas, on avertit très peu de temps avant les habitants que leur maison va être détruite. Parfois, on ne le leur laisse que quinze minutes pour rassembler leurs biens avant que la maison ne soit démolie. D'autres fois, les soldats avertissent des familles que leur maison pourrait être démolie dans le futur et aucune information n'est donnée ensuite.  Ces personnes sont obligées de vivre dans l'incertitude, sans savoir si ou quand leur maison va être démolie. Pour les personnes dont les maisons ont été démolies, l'impact déjà très grave est augmentée par le fait qu'il leur est interdit de reconstruire sur l'emplacement de leur ancienne maison. La terre est confisquée et déclarée ne plus appartenir à ses propriétaires. 

La sanction moins sévère de condamner une maison est aussi imposée comme mesure punitive. Des maisons entières sont fermées à l'aide de blocs de bétons ou de plaques de métal, rendant tout accès impossible à leurs anciens habitants. Il y a peu de cas de maisons fermées qui aient été réouvertes. Des familles entières n'ont plus accès à leur maison et sont donc sans abri.

Données empiriques sur la démolition des maisons

La démolition punitive des maisons a été utilisée très largement dès le début de l'occupation de 1967.

516 maisons ont été démolies, vidées de leurs occupants ou condamnées entre Juin 67 et le 1er Décembre 1969.

La Croix-Rouge internationale a rapporté en 1978 que 1224 maisons avaient été démolies depuis 1967.

Al-Haq estime à un millier le nombre de maisons démolies pendant les 10 premières années de l'occupation. 

Entre 1987 et la fin de la première Intifada, les autorités israéliennes ont totalement démoli près de 400 maisons, et en ont condamné partiellement ou totalement 400 autres comme mesure punitive. La politique de démolition conduite par Israël au cours de la première Intifada a provoqué le déplacement d'environ 8000 Palestiniens. 

Au cours de la seconde Intifada, d'Août 2002 à Janvier 2003, il y a eu plus de cent démolitions punitives de maisons en Cisjordanie et dans la Bande de Gaza. C'est le nombre le plus élevé dans une période aussi courte depuis plus de 10 ans. 

Il existe une différence inquiétante dans la politique de démolition punitive entre les deux Intifadas.  Les autorités israéliennes ont choisi presque toujours la démolition totale plutôt que la mesure moins dure et réversible qui consiste à condamner les maisons. Cela constitue une tendance inquiétante dans l'emploi que font les autorités israéliennes de cette pratique illégale.

Base légale sur laquelle s'appuie Israël pour les démolitions

Israël s'appuie sur une loi datant du mandat britannique sur la Palestine: la loi 119(1) des Lois de Défense(Urgence. de 1945. Ces lois ont été révoquées par les Britanniques en 1948. Ces lois n'étaient donc plus en vigueur dans le pays à l'époque de la création de l'état d'Israël. Les autorités israéliennes ne peuvent donc se baser sur cette loi. Mais elle est appliquée par Israël dans les Territoires Occupés.

De plus,  l'article 64 de la 4ème convention de Genève stipule que toute loi locale ne peut être appliquée si elle est un obstacle à l'application de la 4ème Convention.

Interdiction de la punition collective par le droit international

Le principe fondamental de droit qui stipule que seul des individus peuvent être punis pour des délits qu'ils ont individuellement commis est souligné à la foi dans la plupart des systèmes judiciaires nationaux, dans le droit international sur les droits de l'homme, et le droit international humanitaire.

-Article 5 de la loi internationale sur les droits de l'homme.

-Article 87 de la 3ème Convention de Genève.

- Article 4(b) du Tribunal International pour le Rwanda

-Article 50 de la Convention de La Haye de 1907.

-Article 33(1) de la 4ème Convention de Genève.

C'est dans ces deux derniers articles que l'on trouve les interdictions les plus détaillées de la punition collective.

ARTICLE 33(1): aucune personne protégée ne peut être punie pour un délit qu'il ou elle n'a pas personnellement commis. Les punitions collectives et autres mesures similaires d'intimidation e de terreur sont interdites.

L'interdiction des punitions collectives en période d'occupation militaire est considérée comme une norme de la loi internationale coutumière. 

Conclusions

La politique punitive de démolition des maisons conduite par Israël remonte au début de l'occupation militaire de la Cisjordanie et de Gaza. Cette politique de démolition a étendu la punition collective sur une large échelle. Des milliers de Palestiniens innocents ont été privés de toit par l'armée d'occupation israélienne. La Cour Suprême, siégeant en tant que Haute Cour de Justice a validé ces actes et refusé de mettre un terme à des actes illégaux de punition collective. Les démolitions punitives de maisons sont une grave violation de la 4ème Convention de Genève et relève des crimes de guerre de destruction de propriété et de punition collective et du crime contre l'humanité de persécution.

La démolition ou la condamnation d'une maison ne détruit pas seulement un lieu mais éradique aussi un point central de la vie familiale et sociale. Les démolitions de maisons sont aussi un moyen pour les autorités israéliennes de détruire les liens du peuple palestinien à sa terre. Si on considère cette conséquence de démolition punitive en lien avec les démolitions administratives des maisons et les destructions causées par les opérations militaires israéliennes, on peut y voir un effort concerté de la part d'Israël pour rompre les liens du peuple palestinien à sa terre.

La politique illégale de démolition punitive des maisons doit s'arrêter. Toutes les parties signataires de la 4ème Convention de Genève ont le devoir de "respecter et faire respecter la Convention dans tous les cas".

Ces parties ont aussi l'obligation légale d'après l'article 146 d'agir face à des violations graves de la 4ème Convention.. Al-Haq demande aux membres signataires de remplir leurs obligations et de poursuivre ceux qui perpètrent ces crimes graves devant des cours de justice. ISraël agit en toute impunité depuis le début de l'occupation. Cela affaiblit l'efficacité et le respect du droit international dans d'autres contextes également. Si Israël est autorisé à poursuivre sa politique de démolition punitive, encore plus de Palestiniens innocents seront privés de toit. La punition collective doit être arrêtée.

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