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DOSSIERS PRESSE Un mur, un homme, une voix Par
Thomas L. Friedman New
York Times, 14 septembre 2003 Qalqilya,
Cisjordanie Plutôt
que de créer les contours d¹une solution prévoyant l'existence de deux États, ce mur va
détruire l'idée même de la coexistence des deux États aux yeux des Palestiniens et les pousser d¹ici peu a exiger la solution d¹un
Etat unique selon laquelle Arabes et Juifs jouiront des mêmes droits
dans un seul Etat. Étant donné que d'ici 2010 il y aura plus d'Arabes-palestiniens
que de Juifs vivant dans l'ensemble des territoires d'Israël, de
Cisjordanie et de Gaza réunis, cette transformation de la cause
palestinienne posera un véritable problème pour Israël. Si les Juifs aux
États-Unis pensent qu¹a l¹heure actuelle il est difficile de défendre la
cause israélienne dans les universités, imaginez la difficulté quand leurs
enfants devront trouver des arguments contre le principe du droit de vote
de chacun. Pourquoi
cela ? D'abord parce que la clôture n'est pas construite selon le trace
de la frontière de 1967. Elle est construite en terre palestinienne au-delà
de la frontière, a l'intérieur de la Cisjordanie. Et puisque
cette clôture est en réalité un couloir - qui peut avoir 100 mètres de
large -, de barbelés, de tranchées, de cameras et de détecteurs, les
Palestiniens se voient confisquer davantage de terres pour la construire et
des paysans sont séparés de leurs champs. «
Si les Israéliens veulent construire un mur sur la Ligne verte de 1967
pas de problème, ils peuvent construire un mur de 100 mètres de haut »,
nous dit Nidal Jaloud, le porte-parole le la ville de Qalqilya, sur la frontière
de la Cisjordanie, où les Israéliens ont construit un mur de 8 mètres de haut
après que cinq kamikazes sont venus de la. « Mais ils ne construisent
pas le mur sur la Ligne verte ils la construisent sur notre
terre ». Plus
grave encore, les Israéliens ne voient la clôture que de leur cote. Pour
les Palestiniens, la clôture fait partie d'un tissu de postes de contrôle
israéliens et de clôtures à l'intérieur de la Cisjordanie, de sorte que
beaucoup de villages palestiniens voient toutes leurs issues fermées a l¹exception
d¹une seule. La Cisjordanie a été transformée en une série de cages.
Qalqilya est entourée d'une clôture sur trois cotés pour l¹isoler non
seulement du territoire israélien a l¹ouest mais aussi des colonies
juives en Cisjordanie, au nord et au sud que la ville. Pour sortir de
Qalqilya il faut passer par un seul poste de contrôle israélien, ou les
Palestiniens attendent souvent pendant des heures. «
J'essaie d¹aller au village de Al Funduk a dix minutes de voitures »,
me dit Luay Tayyem, un employé d¹une organisation charitable, qui fait la
queue pour sortir de Qalqilya. «
Aujourd'hui cela me prendra trois heures. Quand je dis aux soldats que je
vais a Al Funduk, ils me demandent en mauvais hébreu "Ou est-ce
?". Ils parlent russe entre eux. Je parle mieux l¹hébreu qu¹eux
Je vis ici depuis trente ans, eux depuis deux ans ». Si
les Israéliens construisaient une clôture autour de la Cisjordanie et
supprimaient tous les postes de contrôle en Cisjordanie, ce serait très logique. Mais ils ne peuvent pas le faire parce que les colonies de
Cisjordanie doivent aussi être protégées d'ou les postes de contrôle
et les clôtures partout, qui étouffent le commerce et créent des cages
qui deviendront des fabriques de désespoir. Au fur et a mesure que les
Palestiniens se retrouvent isolés dans des poches de territoire à coté des
colons juifs qui eux bénéficient de l'état de droit et ont le droit de
vote, la sécurité sociale et les emplois -, et que l'espoir de voir un
jour un Etat palestinien s'estompe, il est inévitable qu¹un grand nombre
d¹entre eux y renoncent et demandent le droit de vote en Israël. Un
sondage effectué par le Palestinien Khalil Shikaki montre que 25 a 30% des
Palestiniens sont partisans de cette solution un pourcentage ahurissant
quand on pense que cette solution n'a jamais été proposée par aucun parti
israélien ou palestinien. Le
premier Arabe israélien a être greffier à la Cour suprême israélienne,
Mohammed Dahleh, m'a dit : « Si les Palestiniens doivent renoncer a leur rêve
de voir un Etat indépendant, la seule solution qui puisse leur
garantir une vie digne serait de réclamer le droit de vivre dans un seul
Etat avec les Israéliens. Quand la lutte pour cette solution commencera,
ils auront le soutien d'environ un million d'Arabes à l'intérieur d'Israël.
Nous dirons : "Inutile d'évacuer la moindre colonie en
Cisjordanie. Donnez-nous seulement le droit de vote et laissez-nous
devenir membres d¹une seule communauté", puisque Israël en a fait un
seul territoire de toute manière. Et ceci trouvera une grande résonance dans la
communauté internationale ». J'éprouve
une énorme sympathie pour les Israéliens qui essaient d'empêcher les
attentats. Mais construire une clôture sans frontière et sans réfléchir
à la contradiction qu'il y a à avoir des Juifs des deux cotés de cette clôture,
n'amènera que davantage de problèmes. Traduction
de Marie-Helene le Divelec |