- Suspension de l'accord d'association
signé entre l'Union européenne et l'État d'Israël
Argumentaire
2- Le ministère des
Affaires Etrangères
a- La position du MAE
- sur le conflit israélo-palestinien:
La position du ministère se
situe dans la droite ligne des positions de la France depuis plusieurs années.
Elle a été rappelée par le porte-parole du ministère des Affaires
Etrangères en juin dernier : « la France a toujours estimé que la
création d'un Etat palestinien viable, souverain et pacifique, suppose
une vraie réflexion sur la continuité territoriale des Territoires, la
constitution d'un Etat de droit, le contrôle des frontières, la libre
circulation des biens et des personnes sur le territoire national, la maîtrise
des ressources naturelles nationales, le développement de l'économie créatrice
d'emplois »
Au mois de juillet 2002, à la suite de sa tournée au Liban, en Syrie et
en Jordanie, M. De Villepin a déclaré qu’il y avait « un impératif
d'action au Proche-Orient qui s'imposait à toute la communauté
internationale ». Selon lui, il s'agirait tout d’abord de lutter
efficacement contre le terrorisme et d'aider à la préparation d'élections
palestiniennes en janvier 2003.
-
sur
la violation de l’article 2 de l’accord d’association UE-Israël:
En ce qui concerne la
violation des droits de l’Homme et des principes démocratiques, le
Ministre des Affaires étrangères déclarait récemment : « Nous déplorons
la persistance de l'armée israélienne à employer des moyens militaires
disproportionnés dans des zones très densément peuplées, et nous
appelons à nouveau les autorités israéliennes à tout mettre en œuvre
pour protéger et préserver en toute circonstance la population civile
palestinienne, conformément au droit international humanitaire ». Il en
appelle à un arrêt des opérations militaires et au respect des résolutions
des Nations Unies.
- sur
la violation de la règle d’origine.
D’après un article du
quotidien Ha’Aretz en date du
16 octobre 2002, suite à l'avis de la Commission européenne du 23
novembre 2001, la France aurait décidé d'imposer des droits de douane
aux produits originaires des colonies israéliennes de la Vallée du
Jourdain. Les douanes françaises auraient notamment demandé à Agrexco -
la coopérative israélienne d'exportation de produits agricoles qui possède
un bureau à Paris - que les dattes produites dans les moshavs et les
kibboutz de la Vallée du Jourdain soient étiquetées avec la mention «
Products of Palestine » et reçoivent le traitement douanier
correspondant à leur origine.
b- Les
moyens d’action dont dispose le gouvernement français.
-
Le Conseil de l’Union
européenne.
Celui-ci se réunit deux fois par an. Le conflit israélo-palestinien
est un sujet de discussion récurrent. Chaque fois, les représentants des
Etats membres y rappellent la position européenne sur ce sujet. Le
gouvernement français peut y sensibiliser à cette occasion ses
homologues européens aux violations de l’accord d’association par
l’Etat d’Israël.
-
Le Conseil
d’association.
Le Conseil d’association se réunit une fois par
an en session ordinaire ; des sessions extraordinaires sont également
possibles sur demande des parties. Il est le principal instrument de
promotion des relations bilatérales UE-Israël et le lieu privilégié du
dialogue politique bilatéral.
L'accord d’association prévoit d’autres
possibilités de rencontres entre parties. L’article 73 dispose :
« Le Conseil d’association peut décider de constituer tout groupe
de travail ou organe nécessaire à la mise en oeuvre du présent accord ».
Le
Conseil d’association du 21 octobre 2002.
Le Conseil d'association UE-Israël s’est réuni pour sa troisième
session annuelle le 21
octobre 2002 à Bruxelles, autour de représentants du gouvernement israélien
( dont Monsieur Shimon Pérès, ministre des Affaires étrangères), et
de la "Troïka" européenne (c'est-à-dire Monsieur. Solana,
haut-représentant de la PESC, Monsieur Patten, commissaire européen
chargé des Relations extérieures, et Monsieur Per Stieg Möller, pour
la Présidence de l'UE).
Le rapport du Conseil d’association n’ayant pas encore été publié,
nous ne savons pas aujourd’hui le détail des points discutés le 21
octobre 2002. Cependant, nous savions déjà après notre rencontre avec
Monsieur Lothar Jaschke, secrétaire du Conseil d’association, que les
violations par Israël de l’article 2 et de la règle d’origine étaient
à l’ordre du jour du Comité d’association 2002. Ont été discutées
notamment les conséquences de l’avis aux importateurs de la
Commission de novembre 2001 (JOCE 328/6, 23/11/2001). Comme le
gouvernement israélien n’a rien proposé pour remédier à ce litige,
les autorités douanières des Etats membres se retrouvent au pied du
mur.
Position
de l’Union européenne
Lors de cette réunion,
l'Union européenne a souligné « la grande importance qu'elle attache
à l'application en bonne et due forme de l'accord d'association, en
particulier pour ce qui est de la portée territoriale de l’accord »
Elle reconnaît que les efforts entrepris pour résoudre cette
question de manière satisfaisante n'ont pas abouti et elle affirme que
« si le Conseil ne parvient pas à trouver une solution, l'UE reverra
sa position conformément aux dispositions de l'accord d'association ».
En qui concerne les violations par Israël de l’article
2, elle
engage
instamment l’Etat d’Israël à « mettre immédiatement fin aux actions qui ne sont pas compatibles
avec le droit humanitaire international et les droits de l'homme ».
En effet, « de tels
actes alimentent la méfiance et la haine et compromettent encore
davantage les efforts réalisés pour rechercher une solution politique »
et « portent préjudice à la réputation d'Israël en tant que démocratie
fondée sur l'état de droit ».
c-
Pourquoi
demander la suspension de l’accord d’association ?
Dans
sa déclaration lors du dernier Conseil d’association, l’Union
européenne dit regretter « qu'aucun progrès n'ait été accompli,
depuis la dernière session, vers une solution de la question des règles
d'origine conformément à l'accord d'association ». Lors de notre
rencontre du 11 septembre 2002, les représentants de la Commission ont réitéré
leur volonté de maintenir et d’approfondir un dialogue politique avec
l’Etat d’Israël.
L’Union européenne a les
moyens d’arriver à cette fin. Mais, jusqu’ici rien n’a été mis en
place pour qu’Israël se conforme à ses obligations. C'est
pour cela que nous considérons que la suspension de l’accord
d’association UE-Israël constitue un moyen de pression politique et économique
approprié.
-
la
violation de la règle d’origine.
En ce qui concerne la règle d’origine, l’UE déplore la persistance
de divergences d’interprétation, sur le champ d’application
territoriale de l’accord, entre l ’Union européenne et Israël, et
l'absence de progrès sur la résolution de cette question. Les propositions israéliennes
n’ont pas offert la base d’une solution viable. Pourtant, les représentants
de l'UE, comme ceux de la France, sont juridiquement tenus de garantir la mise en œuvre de l’accord et de
protéger les ressources propres de l’UE.
La solution de la Commission européenne, à savoir la publication
de l’avis aux importateurs du 23 novembre 2002,
n’a fait que déplacer la responsabilité du
problème sur les importateurs, mais ne règle en rien celle des
autorités israéliennes qui certifient les produits des colonies comme
d’origine israélienne.
Comment la France pourrait-elle contraindre
Israël à respecter les
clauses de l’accord, si ce n’est en en demandant la suspension ?
-
la
violation de l’article 2.
Dans le cadre du processus euro-méditerranéen entamé, en 1995,
à Barcelone, l’UE a signé des accords d’association avec les pays du
Sud et de l’Est de la Méditerranée. Depuis, dans ces Etats aussi sont
constatées des violations des droits de l’Homme.
Ne pas suspendre l’accord
d’association entre Israël et l’Union européenne en raison des
violations de l’article 2
(celui qui impose le respect des droits de l’Homme et des principes démocratiques),
qui est pourtant qualifié d’ « essentiel » par
l’accord lui-même, cela crée un précédent grave pour l’ensemble
des accords signés.
Fondé sur l’engagement des parties d’établir leurs relations sur le
respect des droits de l’Homme, des principes démocratiques et d’agir
en conformité avec les engagements internationaux antérieurement
souscrits, le processus euro-méditerannéen est ainsi mis à mal.
-
le
non-respect du droit international humanitaire.
Il convient de rappeler constamment aux responsables
français que le droit international humanitaire impose
l'obligation d’assurer le respect de ce droit, ce qui implique pour un
Etat de ne pas faciliter, même indirectement la violation de la IV
convention par autre Etat.
Au même titre que l’Union européenne, les Etats membres, dont la
France, sont parties à l’accord d’association signé avec Israël.
Ils sont responsables de sa mise en œuvre.
En ne réagissant pas aux exactions commises par Israël, l’Union
européenne et les Etats membres se rendent complices des violations.
Jusqu’ici, la réponse de l'Union européenne, et notamment de la
Commission, aux violations de l’accord s’est soldée par la tentative
de résoudre ce problème sans porter préjudice aux intérêts des parties.
Par une telle attitude, la Commission a altéré son droit de dire le
droit face aux violations flagrantes commises par Israël.
De ce fait, l’accord a été peu à peu édulcoré, voire vidé de sa
substance, sans qu’il y ait eu consultation
des Parlements qui ont ratifié l’accord.
La France, à la fois membre de l’Union
européenne et partie à la IVème convention de Genève, a le devoir
d’exiger des institutions communautaires qu’elles agissent en
conformité avec les textes internationaux. La demande de suspension de l’accord par la France serait ainsi
l’exercice d’un droit fondé sur
l'accord d’association lui-même et sur le droit international
humanitaire.
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